Financement libyen de Sarkozy : l'hypothèse d'une comptabilité secrète

Palais de l'Elysée, 10 décembre 2007. Quelques mois après son élection, Nicolas Sarkozy recevait Mouammar Kadhafi en visite officielle, pour cinq jours.
 
Palais de l'Elysée, 10 décembre 2007. Quelques mois après son élection, Nicolas Sarkozy recevait Mouammar Kadhafi en visite officielle, pour cinq jours.   (ARCHIVE LP/Aurélie Audureau.)

    Un élément accablant? Médiapart révèle de nouvelles informations concernant les soupçons de financement illégal, par la Libye, de la campagne présidentielle de 2007 de Nicolas Sarkozy.


    Selon le site d'investigation, le juge d'instruction parisien Serge Tournaire et les policiers de l'Office central de lutte contre la corruption (OCLCIFF) ont récupéré, des mains de la justice norvégienne, une copie du carnet noir d'un ancien ministre de Mouammar Kadhafi, où il est consigné une série de versements au profit de l'ancien chef de l'Etat, dont le montant avoisinerait 6,5 millions d'euros.

    Choukri Ghanem, ancien chef du gouvernement (2003-2006) et ancien ministre du pétrole libyen (2006-2011), a rédigé en arabe, le 29 avril 2007, une semaine avant le premier tour de l'élection présidentielle, le compte-rendu d'une réunion avec plusieurs autres personnalité du pouvoir libyen. L'un deux, Bachir Saleh, directeur de cabinet de Kadhafi et patron de l'un des fonds souverains du pays, y affirme avoir transféré 1,5 millions d'euros à Nicolas Sarkozy.

    Le carnet mentionne d'autres sommes importantes, envoyées par d'autres caciques du régime : 3 millions envoyés par Saïf al-Islam Kadhafi, l'un des fils du « guide », et 2 millions par Abdallah Senoussi, chef des services secrets intérieurs libyens et beau-frère de Kadhafi.

    En 2011, lorsque la France déclenche une opération militaire en Libye, Choukri Ghanem est l'un des premiers à faire défection. A la différence de Bachir Saleh, qui trouve refuge en France puis en Afrique du Sud, Ghanem se réfugie à Vienne (Autriche), où est situé le siège de l'Opep. Le 29 avril 2012, son corps était repêché dans le Danube. La police autrichienne avait envisagé la piste de l'assassinat mais l'enquête avait conclu à une crise cardiaque provoquant la chute de Ghanem dans le fleuve, puis sa noyade.

    Son carnet a été découvert chez son gendre, aux Pays-Bas, dans le cadre d'une enquête liée à un scandale de corruption impliquant le géant chimique norvégien Yara. Un procès a eu lieu en Norvège. Après quoi, selon Médiapart, la procureure Marianne Djupesland a transmis les notes à la France.

    Dans cette affaire, l'entourage de Nicolas Sarkozy a toujours accusé Médiapart d'orchestrer des mensonges pour lui nuire. Depuis avril 2013, pourtant, la justice enquête sur l'éventualité d'un financement occulte par le régime de Mouammar Kadhafi, du candidat de l'UMP. Son ancien plus proche collaborateur, devenu ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, est dans cette affaire mis en examen pour faux et usage de faux, ainsi que blanchiment de fraude fiscale. D'autres personnes sont visées, notamment l'intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine, dont les révélations -dans nos colonnes- sur l'origine de fonds libyens avaient justifié l'ouverture de l'enquête.

    Nicolas Sarkozy ne fait l'objet d'aucune mise en examen dans ce dossier.