La vie bien engagée de Danielle Mérian, voix symbole de l'après Bataclan

On la découvrait au micro de BFMTV au lendemain des attentats qui ont ensanglanté Paris le 13 novembre 2015. Surnommée “la mamie du web”, Danielle Mérian, avocate à la retraite, est d'abord et avant tout une femme qui marche la tête haute, dont la seule ambition est d'agir pour les autres.

Par Christine Ferniot

Publié le 08 novembre 2016 à 07h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 03h11

Elle revient de trois semaines en Iran, expliquant que depuis la mort de son mari, il y a plus de vingt ans, elle « court le monde ». Danielle Mérian a ce même visage énergique, cette même parole directe que lorsque nous l’avons découverte, au lendemain du 13 novembre 2015. Elle était sortie déposer une fleur devant le Bataclan, en hommage aux victimes. Elle venait en voisine et le micro de BFMTV s’est tendu vers cette dame de 78 ans, bien mise, bourgeoise au foulard sage, à l’imperméable fermé jusqu’au col, au milieu de la foule si jeune, si triste.

Ses paroles de fraternité allaient faire le tour du monde et ses joues rondes, ses boucles bien coiffées, devenir le symbole d’un Paris en deuil qui veut se relever. Un Paris et un pays où les hommes et les femmes de tous âges et de toutes catégories sociales sont des résistants, chacun à sa manière. Les réseaux sociaux en ont fait leur grand-mère idéale et Danielle a vu soudain des gens l’arrêter dans la rue ou l’autobus pour la saluer, l’embrasser. « J’ai découvert ainsi les selfies et le monde des internautes », raconte-t-elle en souriant. En échange, tous ceux qui avaient retenu ses propos pleins de sagesse ont compris qui était vraiment cette femme au regard droit.

Danielle Mérian fut interrogée au hasard. Avocate à la retraite, militante associative pour les droits de la femme, elle semble prendre la suite de Stéphane Hessel qui, en 2010, rédigeait un livre bref au titre évocateur : Indignez vous. Aujourd’hui, elle signe un court récit intitulé Nous n’avons pas fini de nous aimer, comme « un murmure à la jeunesse, car j’aimerais que ce soit elle qui le lise », dit-elle, assise bien droite sur une chaise dans son salon, à quelques mètres de la place de la Bastille. C’est la romancière Tania de Montaigne qui a recueilli ses propos au fil des jours en respectant fidèlement sa personnalité, son optimisme, sa leçon de vie, à l’instar d’un Georges Bernanos cité au premier chapitre : « On ne subit pas l’avenir, on le fait. »

“Mains tendues, cœur ouvert, s’il est un pari à faire, c’est bien celui de l’amour.”

Non, Danielle Mérian n’est pas « la mamie du web » mais une femme qui marche tête haute, ne mâche pas ses mots et n’a qu’une ambition : agir avec les autres. Elle balaye les idées reçues, refuse des phrases comme « c’était mieux avant » , évoque son passé et celui de sa famille : son père, Claude Darget, journaliste à la radio et à la télévision, la guerre de 39-45, les camps de concentration, la torture en Algérie, son métier d’avocate, son travail dans les associations Prisonniers sans frontières ou SOS Africaines en danger, contre l’excision. Danielle refuse qu’on lui souhaite « bon courage », expliquant qu’elle n’a jamais souffert, qu’elle a la chance d’être croyante et que le bonheur se construit.

Ce matin, elle est allée chez le coiffeur car « trois semaines sous le voile, en Iran, ça n’arrange rien ». Chaque heure de sa journée est occupée. Il y a tant de livres à lire, de familles à écouter, d’amis à voir, de choses à faire, dit-elle. « Faisons, c’est là qu’est la réponse, c’est la clé qui ouvre toutes les portes. Mains tendues, cœur ouvert, s’il est un pari à faire, c’est bien celui de l’amour. »

A lire

Nous n’avons pas fini de nous aimer de Danielle Mérian (éd. Grasset, 144 p., 15 €).
Paris sera toujours une fête, anthologie préfacée par Danielle Mérian.

Sur le même thème

Cher lecteur, chère lectrice, Nous travaillons sur une nouvelle interface de commentaires afin de vous offrir le plus grand confort pour dialoguer. Merci de votre patience.

Le magazine en format numérique

Lire le magazine

Les plus lus