Un scénario inédit de Bergman tourné par sa grande rivale

La réalisatrice Suzanne Osten va tourner un scénario inédit du cinéaste suédois, “Soixante-quatre minutes avec Rebecca”. L'histoire d'une enseignante en quête d'une relation sexuelle violente… A découvrir pour le centième anniversaire de la naissance du cinéaste, en juillet 2018.

Par Frédéric Strauss

Publié le 22 novembre 2016 à 17h45

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 03h17

69 année érotique de Gainsbourg et Birkin en fond sonore, nous voici dans un club échangiste où une jeune femme, professeur pour des sourds-muets et enceinte depuis peu, cherche un homme avec qui elle pourrait avoir une relation sexuelle violente… Et ce n'est qu'un exemple des surprises que semble réserver le scénario de Soixante-quatre minutes avec Rebecca, dont la plus belle est le nom de l'auteur : Ingmar Bergman. Dans le sillage des révolutions de 1968, le réalisateur suédois imagina un portrait de femme avide d'expériences nouvelles, libératrices, extrêmes. Ces aventures de Rebecca devaient trouver leur place dans un film collectif impliquant rien moins que Fellini et Kurosawa, mais le projet termina dans un tiroir. Où la Fondation Bergman, en charge des archives du cinéaste, l'a finalement retrouvé.

“Il a toujours eu des femmes fortes dans les films de Bergman mais là, il va plus loin encore”, Suzanne Osten

La découverte de ce scénario inédit peut être comparée à celle « d'un manuscrit d'Hemingway jamais publié ou d'un tableau inconnu de Picasso », a déclaré au quotidien Dagens Nyheter Jan Holmberg, le directeur de la Fondation. « A la fin des années 60, Bergman était à son sommet, il n'y a pas d'autre œuvre inédite datant de cette période, c'est une totale nouveauté ». La stupéfaction de tous les admirateurs du maître a laissé place à la stupeur quand fut révélé le nom de celle qui allait s'emparer de Soixante-quatre minutes avec Rebecca pour en faire une pièce radiophonique puis un film : Suzanne Osten, ennemie déclarée de Bergman, qu'elle a longtemps accusé d'utiliser son pouvoir pour barrer la route à d'autres artistes, à commencer par elle. Mais cette femme de 72 ans, auteure de pièces de théâtre et de films reflétant son engagement féministe, s'est passionnée pour ce scénario inédit qui révèle justement, dit-elle, un Bergman totalement féministe : « Il a toujours eu des femmes fortes dans ses films mais là, il va plus loin encore ».

Soixante-quatre minutes avec Rebecca sera prêt pour fêter le centième anniversaire de la naissance du cinéaste, le 14 juillet 2018. Un biopic racontant sa vie pourrait également prendre forme d'ici là et les célébrations de toutes sortes se multiplieront dès 2017. Dans ce concert d'hommages, le film de Suzanne Osten promet déjà d'être un choc intéressant, à travers le clash de deux forts tempéraments. Si elle garde pour l'instant secrètes toutes ses intentions visuelles, la réalisatrice se réjouit de passer bientôt derrière la caméra sans avoir à demander son autorisation à Bergman : « Il ne m'aurait jamais laissé faire, il se serait battu avec moi ! Il aurait dit : “quelle honte, comment cette sacrée salope pourrait-elle faire ça ?” ».

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