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Sommet de l'économie
Stratégie

Georges Plassat (Carrefour) et Philippe Wahl (La Poste) n'ont pas peur du digital

Invités du Sommet de l'économie, Georges Plassat, PDG de Carrefour et Philippe Wahl, PDG de la Poste sont d'accord pour reconnaître la vague du digital. Mais ils s'efforcent d'y voir une opportunité, pas une menace.

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Georges Plassat (à gauche), PDG de Carrefour, débat avec Philippe Wahl, PDG de La Poste, débat sous le regard de Pierre-Henri de Menthon (au centre), directeur délégué de Challenges lors de la conférence "Le digital près de chez vous" au 3ème Sommet de l'Économie de Challenges au Palais de Tokyo à Paris.

Georges Plassat (à gauche), PDG de Carrefour, débat avec Philippe Wahl, PDG de La Poste, débat sous le regard de Pierre-Henri de Menthon (au centre), directeur délégué de Challenges lors de la conférence "Le digital près de chez vous" au 3ème Sommet de l'Économie de Challenges au Palais de Tokyo à Paris.

Marc Bertrand pour Challenges

Avec 17.000 points de contact en France pour le premier, 10.000 points de vente pour le deuxième, des centaines de milliers de collaborateurs chacun, La Poste et Carrefour ont plus de points communs qu'on ne l'imagine. Et l'un deux n'est pas des moindres: il s'agit de se trouver confrontés à un véritable raz-de-marée digital au cours des dernières années.

"Le digital, grand perturbateur"

"Pour nous le digital est le grand perturbateur car il fait disparaître le message physique, et notre entreprise a été créé pour transmettre le message physique", rappelle en souriant Philippe Wahl, PDG de la Poste. 500 millions d'euros de chiffre d'affaires, c'est ce que la Poste perd chaque année, en raison des lettres que les Français ne s'envoient plus, préférant utiliser les emails. En parallèle, le modèle historique de Carrefour, basé sur des hypermarchés situés en périphérie des villes, où le client se rend en voiture, est également bousculé. "Ce que change le digital, c’est d’abord un rapport avec la distance, aussi avec le temps, et enfin une accélération dans la compétitivité entre les enseignes", énumère Georges Plassat, PDG de Carrefour. 

Amazon, une obsession?

Derrière le terme vague de digital, se situe en réalité un acteur qui, avec sa progression tentaculaire, concerne désormais autant La Poste que Carrefour: Amazon. A l'évocation du géant américain, les deux interlocuteurs répondent différemment. Georges Plassat réagit à l'obsession d'Alexandre Bompard, PDG de la Fnac, pour Amazon, sans citer le nom du géant américain. "Chacun ses obsessions", répond-il, parlant de "cet opérateur", et ajoutant, avec l'humour qui le caractérise: "Il faut évoluer mais pas avoir des obsessions nocturnes sinon on ne sera pas bien le lendemain pour travailler! Il ne faut pas se jeter dans une digitalisation effrénée." Le service Carrefour Livraison Express lancé tout récemment par le distributeur ressemble pourtant bel et bien à une riposte au service de livraison Amazon Prime Now.

De son côté, Philippe Wahl répond du tac au tac: "Amazon, nous, on ne l’ignore pas du tout, c’est notre premier client et c’est en train de devenir notre principal concurrent! Amazon s’adresse à nous, nous faisons de la croissance avec lui, et en même temps, dans les marchés les plus mûrs, au Royaume-Uni, par exemple, il existe une en concurrence avec nous, car notre filiale DDP est deuxième du marché, et Amazon déjà quatrième."

Le digital, un outil, une opportunité

Les deux patrons sont cependant unanimes: hors de question de paniquer! Le digital n'est pas qu'une révolution, c'est aussi un outil, une opportunité. A La Poste, les 90.000 facteurs sont désormais équipés de smartphones pour enregistrer les transactions, la liste de tournée, badger les colis... "Le smartphone est devenu leur seul outil de travail avec le véhicule!", pointe Philippe Wahl. Son entreprise profite d'ailleurs aussi du numérique pour lancer de nouveaux produits, comme Digiposte, le coffre fort digital qu'a lancé la Poste pour conserver des documents numériques à vie. Résultat: le chiffre d'affaires de la Poste augmente de 2% après avoir perdu 6% sur le cœur de métier du groupe.

Du côté de Carrefour, à la faveur du rachat de Rueducommerce il y a quelques mois notamment, le chiffre d'affaires dans le digital atteint désormais 1 milliard d'euros. Le distributeur a aussi acquis récemment le pureplayer spécialiste du bio Greenweez, et reste ouvert à d'autres possibilités d'acquisitions. Face à la place croissante que prend le numérique, Georges Plassat identifie donc bien sûr une opportunité de business. "La complexité qu’il y aura demain à relier digital et relais physiques, va apporter une liberté pour le client de choisir s'il veut être livré chez lui, en magasin, à n'importe quel endroit. Cette liberté, fondamentale, nous oblige à continuer à développer nos réseaux physiques car l’aspect humain n’est pas géré par le digital." Le PDG pointe également une opportunité géographique: "les frontières disparaissent. Vous pouvez commercialiser en dehors des territoires qui étaient jusqu'à présent les vôtres." Plus original, le PDG pointe enfin l'atout écologique qu'apporte le digital, lorsqu'il est associé au réseau de magasins de proximité. "Le maillage dans les territoires permet de prendre soin de l'environnement, il raccourcit le transport, permet de mutualiser les déplacements."

Et les emplois?

Reste une question qui fait encore débat: le numérique crée-t-il des emplois, ou en détruit-il? Pour Philippe Whal, les années à venir vont être décisives à La Poste. "Tout l’enjeu, c’est de transformer le portefeuille de métiers pour qu’en 2020 les métiers en croissance aient plus que compensé les métiers en attrition. La clé c’est la pédagogie, et la pédagogie appliquée par la formation." Georges Plassat, approuve, et pointe une problématique: "Le seul sujet sur la transformation des emplois, c’est qu'il n'y a pas de synchronisation entre ceux qui disparaissent, et ceux qui seront créés, et que ce ne sont pas les mêmes personnes, donc l’entreprise doit être proche de ses employés, leur parler." Mais au-delà de la problématique sociale, le PDG de Carrefour assure qu'il est hors de question que le digital supprime tous les emplois. Car sans salaire, comment les clients de Carrefour pourront-ils continuer à faire leurs achats?

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