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ETA : les cinq personnes interpellées transférées au parquet antiterroriste

Cinq personnes ont été interpellées vendredi soir à Louhossoa, dans les Pyrénées-Atlantiques, au cours d’une opération contre ETA. Leurs gardes à vue ont été prolongées dimanche et elles ont été transférées lundi au parquet antiterroriste de Paris.

Le Monde avec AFP

Publié le 16 décembre 2016 à 23h59, modifié le 19 décembre 2016 à 10h05

Temps de Lecture 5 min.

Des agents du RAID et de la police judiciaire lors de l’opération contre ETA à Louhossoa, dans la nuit du 16 décembre.

Les gardes à vue de cinq personnes interpellées dans la nuit du 16 au 17 décembre ont été prolongées, dimanche 18 décembre, après l’opération menée par les forces de police françaises et espagnoles contre l’organisation clandestine et séparatiste basque Euskadi ta Askatasuna (ETA) à Louhossoa, dans les Pyrénées-Atlantiques. Une enquête préliminaire a été ouverte vendredi soir pour « association de malfaiteurs terroriste », « infraction à la législation sur les armes en bande organisée et en relation avec une entreprise terroriste » et « infraction à la législation sur les explosifs en bande organisée et en relation avec une entreprise terroriste ». Les cinq personnes interpellées ont été transférées lundi de Bayonne au parquet antiterroriste à Paris, selon des sources proches du dossier citées par l’agence France-Presse.

Selon des sources du Monde, il s’agirait de Jean-Noël Etcheverry, dit Txetx, militant écolo-alternatif et animateur de Bizi à Bayonne et du réseau Alternatiba ; Michel Berhocoirigoin, actuellement président de la chambre d’agriculture alternative du Pays basque (EHLG), syndicaliste agricole, ex-président du syndicat agricole basque ELB (localement majoritaire) et ex-secrétaire général national de la Confédération paysanne ; Michel Bergouignan, viticulteur dans l’appellation Irouléguy et ex-président de la coopérative des vins d’Irouléguy ; Béatrice Molle-Haran, journaliste professionnelle, éditorialiste de l’hebdomadaire Médiabask (print et Web), et Stéphane Etchegaray, journaliste audiovisuel, qui « était là pour filmer la destruction des armes ».

L’avocat de Béatrice Molle-Haran, Jean-Michel Baloup, a demandé au parquet la levée de la garde à vue de sa cliente, qui peut aller jusqu’à quatre-cingt-seize heures, arguant qu’elle n’avait fait que louer une partie de sa maison de Louhossoa à Txetx et ignorait tout de l’existence du stock d’armes.

Des sources proches du dossier, citées par les agences de presse, mentionnaient la présence du président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme (LDH), Michel Tubiana, parmi les cinq personnes interpellées. Mais, joint au téléphone par Le Monde dans la nuit, l’avocat a expliqué qu’il n’était pas présent sur les lieux lors de l’intervention. « J’aurais dû y être », a-t-il cependant déclaré. M. Tubiana devait participer à ce qu’il décrit comme « une démarche volontaire d’ETA de se désarmer ». Les armes devaient être « neutralisées », avant d’être « remises ultérieurement aux autorités françaises ».

Pour le ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux, qui a publié un communiqué dans la nuit de vendredi à samedi, l’interpellation des cinq personnes est « un nouveau coup dur porté à ETA ». Michel Tubiana considère au contraire que, « si les autorités étaient informées, elles ne pouvaient ignorer que la démarche était celle d’une neutralisation [des armes] ».

« Personne n’a le droit de se proclamer destructeur d’armes et éventuellement de preuves, a réagi M. Le Roux dans l’après-midi. En matière de terrorisme, toutes les preuves doivent pouvoir concourir à la justice. »

Saisie d’armes et de munitions

L’opération policière, sous l’autorité du parquet antiterroriste de Paris, a été menée par des enquêteurs de la police française, notamment de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), de la brigade de recherche et d’intervention (BRI) de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques) et des policiers de l’unité d’élite du RAID, assistés de policiers de la garde civile espagnole.

Les interpellations se sont déroulées dans une maison isolée de la bourgade de Louhossoa, sur la route de Bayonne, à Saint-Jean-Pied-de-Port, dans les Pyrénées-Atlantiques. Trois personnes ont été interpellées dans la maison et deux autres sur le chemin qui mène à la maison. Au cours de la perquisition, un important arsenal a été découvert dans la maison, dont « 29 armes de poing, 9 fusils d’assaut, 12 pistolets mitrailleurs, des chargeurs, des munitions, des détonateurs, plusieurs kilos de produits explosifs dont de la poudre d’acétone et d’aluminium, du chlorate et du penthrite », selon une source proche de l’enquête. Paris et Madrid se sont félicités de l’arrestation « d’individus en relation avec l’organisation terroriste ETA ».

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Michel Tubiana voit dans les interpellations de ce vendredi « la volonté des gouvernements français et espagnol de transformer une démarche volontaire en une prise ». « C’est une opération de communication », dénonce-t-il. Il ajoute que plusieurs tentatives ont été faites pour demander aux autorités françaises de déterminer les conditions matérielles dans lesquelles la totalité de l’arsenal du groupe pouvait être « neutralisée et remise ». Tentatives restées sans suite, selon lui.

« Processus de désarmement »

Peu après l’annonce de l’opération, les milieux nationalistes basques avaient eux aussi donné cette version des faits. Le site Mediabask, proche du quotidien basque espagnol Gara, qui exprime parfois les positions d’ETA, publiait une lettre que lui ont adressée Michel Tubiana, Txetx et Michel Berhocoirigoin.

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Dans ce courrier, ils assurent avoir décidé « d’enclencher le processus de désarmement de l’organisation et procéder à la destruction d’un premier stock d’armes », qui correspond, disent-ils, « à environ 15 % de l’arsenal » du groupe. Tous trois justifient leur action par leur volonté de « contribuer à un avenir sans violence et démocratique pour le Pays basque ». Ils précisent n’avoir « aucun lien ni subordination » avec ETA. En juin 2015, la LDH avait ainsi coorganisé une conférence humanitaire pour la paix au Pays basque, à l’Assemblée nationale.

Plusieurs mouvements nationalistes considèrent que « les polices française et espagnole ont empêché la destruction des armes » et appellent à une riposte dans une manifestation prévue samedi à 16 heures à Bayonne.

La sénatrice des Pyrénées-Atlantiques Frédérique Espagnac (PS) a apporté son soutien aux militants arrêtés :

Dans un communiqué commun, les députés européens écologistes José Bové, Pascal Durand et Yannick Jadot demandent la « libération immédiate » des militants interpellés dans la nuit.

Des élus du Pays basque réunis dans le collectif « Le chemin de la paix » ont fait savoir samedi dans un communiqué qu’ils apportaient leur « soutien collectif aux personnes interpellées » et qu’ils demandaient aux Etats français et espagnol de « s’impliquer dans le processus de désarmement » du conflit.

Campagne d’attentats

Le 12 octobre, une importante cache d’armes d’ETA avait été découverte en forêt de Compiègne, dans l’Oise. Le 5 novembre, un des derniers chefs d’ETA encore dans la clandestinité, Mikel Irastorza, a été arrêté à Ascain, près de Saint-Jean-de-Luz, puis mis en examen et écroué à Paris. Le 14 décembre, un autre militant basque espagnol a été interpellé à Marseille. Là encore, il s’agissait d’opérations conjointes des polices française et espagnole.

Au nom de sa lutte pour l’indépendance du Pays basque et de la Navarre, ETA – qui signifie Pays basque et liberté – a mené une campagne d’attentats qui a causé la mort de 829 personnes, selon Paris et Madrid. Les années 1980 ont été les plus sanglantes.

En octobre 2011, l’organisation a renoncé définitivement à la violence. Indépendamment de son désarmement, qui est un processus « unilatéral et volontaire », rappelle Michel Tubiana, l’ETA souhaiterait négocier avec les Etats espagnol et français le sort de ses quelque 400 membres détenus dans ces deux pays. Les autorités refusent et exigent la dissolution de l’organisation.

Le Monde avec AFP

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