La comédienne Michèle Morgan est morte

    «T'as d'beaux yeux, tu sais» lui disait Jean Gabin dans «Quai des brumes» de Marcel Carné. L 'actrice Michèle Morgan s'est éteinte aujourd'hui. «Dans sa 97ème année, les plus beaux yeux du cinéma se sont fermés définitivement ce matin, le mardi 20 décembre», a annoncé sa famille dans un communiqué.

    Claude Lelouch : «Michèle Morgan était celle qu'on avait tous envie d'avoir dans nos bras»

    «Pendant plus de cinquante ans, Michèle Morgan a été l'actrice française la plus importante. Elle restera la star de l'avant-guerre, de la guerre et de l'après-guerre. Dans le monde entier, Michèle Morgan a été l'image de la France», a ajouté Claude Lelouch, «très peiné» par cette disparition.

    «Ce qui la distinguait, c'est son élégance de jeu, sa spontanéité devant la caméra. On croyait à tout ce qu'elle faisait. Elle a été la comédienne que tout le monde voulait pour faire un film à succès. Il fallait avoir Michèle Morgan au générique», selon Claude Lelouch qui l'a dirigé dans le «Le Chat et la Souris» (1975).

    François Hollande a tenu à saluer «une légende» du cinéma. Michèle Morgan «était bien plus qu'un regard, c'était une élégance, une grâce, une légende qui a marqué de nombreuses générations», a réagi l'Elysée dans un communiqué. «Tout au long de sa carrière, elle a interprété ses rôles avec autant d'humanité que de passion», poursuit la présidence de la République. «Les plus grands réalisateurs ont fait appel à elle et Michèle Morgan a participé à des chefs-d'oeuvre qui sont dans toutes les mémoires», ajoute le président.

    Des partenaires comme Jean Gabin, Gérard Philippe ou Humphrey Bogart

    Elle était née le 29 février 1920, une année bissextile. A 18 ans, Simone Roussel, de son vrai nom, s'e rend célèbre dans «Quai des brumes (1938). En 1946, elle devient la toute première actrice à remporter le Grand prix d'interprétation féminine au festival de Cannes, pour sa composition d'une jeune femme aveugle dans «La Symphonie Pastorale» de Jean Delannoy. Alors au sommet de sa gloire, elle incarne la femme française distinguée, le contraire d'une scandaleuse, dans laquelle un large public féminin se retrouvait. Elle brille aussi dans «Les Grandes Manœuvres» (1955).

    Elle avait joué avec Jean Gabin, Gérard Philipe ou Humphrey Bogart. Mais sa carrrière à Hollywood n'avait pas pris.

    Des mauvais choix

    La star au regard de chat, était avec Arletty et Danielle Darrieux, une des très grandes vedettes du cinéma hexagonal entre 1940 et 1960. Dans les années 60, sa filmographie s'était étiolée. Michèle Morgan avait refusé de travailler avec Luchino Visconti pour «Senso» et Michelangelo Antonioni pour «La Nuit».

    Retour en grâce

    Michèle Morgan avait de l'humour : elle souriait quand on l'appelait le «frigidaire ambulant» ou la «grande bourgeoise». «Je n'ai jamais eu l'occasion de jouer les femmes sexy. Il faut croire que mon charme ne se trouvait pas dans mes fesses», relevait-elle.

    «De cette image est venue ma difficulté à accepter des scénarios de folles vieillissantes qui sombrent dans l'alcool ou l'hystérie sous prétexte qu'elles n'ont plus l'âge de jouer les jeunes premières : il ne faut jamais casser l'image que les gens ont de vous», ajoutait-elle, admettant au passage n'avoir pas tourné que des chefs d'oeuvre.

    A la fin de sa carrière, deux films, «Benjamin ou les mémoires d'un puceau» (1967), de Michel Deville, et «Le Chat et la Souris» (1975), de Claude Lelouch, lui avaient permis de se délivrer de l'image d'Epinal dans laquelle elle s'était enfermée. Puis elle s'éloigne lentement des plateaux de tournage pour trouver de la sérénité dans la peinture.