Photographie de la façade de la Cour des comptes le 22 janvier 2013 à Paris

Dans un référé publié le 20 décembre 2016, la Cour des comptes recommande de réformer les régimes fiscaux et sociaux des indemnités de licenciement et de rupture conventionnelle.

afp.com/THOMAS SAMSON

Trop peu lisible pour le contribuable, trop coûteux pour l'Etat... le régime fiscal et social actuel, s'appliquant aux indemnités de licenciement et de rupture conventionnelle, n'est pas du goût de la Cour des comptes. Dans un référé qu'elle rend public ce 20 décembre, elle recommande de le réformer. Si ses indications étaient suivies, les salariés perdraient au change.

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Selon la juridiction administrative, le système d'exonérations est devenu trop complexe, du fait d'un empilement de mesures législatives: la loi de finances de 2000 a commencé par fixer des grands principes, puis cinq lois de financement de la sécurité sociale sont venues, entre 2006 et 2012, modifier encore les règles en vigueur. Au final, le régime social des indemnités des indemnités de licenciement diffère de leur régime fiscal, rendant le tout peu limpide. L'institution pointe aussi du doigt le fait qu'il existe une différence de traitement entre salariés selon que leur licenciement intervient dans le cadre d'un Plan de sauvegarde de l'emploi ou pas (seuls les PSE donnent lieu à exonération fiscale totale, les salariés d'entreprises dont l'effectif est inférieur à 50 sont donc privés de cet avantage en cas de licenciement économique).

En ce qui concerne les indemnités de rupture conventionnelle, l'institution présidée par Didier Migaud considère qu'il ne va pas de soi qu'elles bénéficient comme aujourd'hui du même traitement fiscal et social que les indemnités de licenciement, notamment quand elles interviennent, de manière un peu abusive, pour financer des "situations de chômage ou de pré-retraites choisies".

Les indemnités imposées dès 80 000 euros

Les exonérations ne sont néanmoins pas dans le collimateur de la Cour des comptes au point qu'elle veuille les supprimer totalement. D'ailleurs, elle rappelle qu'elles ont une justification: épargner la part des indemnités correspondant à la réparation du préjudice subi du fait de la rupture du contrat. Sous couvert d'harmonisation, elle préconise toutefois un coup de rabot. Les régimes sociaux et fiscaux devraient idéalement être alignés, avec un plafond d'exonération à 2 PASS (soit 78 456 euros en 2017). Ce plafond s'appliquerait aussi aux indemnités de licenciement dans le cadre d'un PSE.

La réponse du ministère du Travail à cet arrêté est claire: pas question d'aller dans le sens des pistes évoquées. D'abord parce que "l'harmonisation proposée aboutirait à un système moins avantageux que le système actuel d'exonération qu'il s'agisse des salariés licenciés dans le cadre d'un PSE ou hors PSE". Mais aussi parce qu'elle pourrait avoir un effet pervers, dans le cadre des "plans sociaux". (...) "Le recours aux indemnités supra-légales représente un élément central de négociation au moment des PSE. (...) Taxer de manière plus importante (ces indemnités) ne permettra pas de dissuader les parties d'y avoir recours. C'est bien au contraire l'inverse qui pourrait se produire: à budget constant, les entreprises pourraient décider de minorer, dans les PSE, la part des budgets formation et de cellule de reclassement, au profit des indemnités, au vu de la demande des salariés." Dit autrement, les salariés souhaitant que leur net "net" soit le plus important possible, ils pourraient encourager l'employeur à augmenter les indemnités brutes octroyées. Conséquence, l'argent consacré à la formation et au reclassement se réduirait pour ne pas faire gonfler l'enveloppe consacré au PSE.

Quelles économies l'Etat pourrait-il réaliser s'il suivait les recommandations de la Cour des Comptes? S'appuyant sur les travaux du Trésor, de l'Inspection générale des finances et de la direction de la législation fiscale, les magistrats estiment que "le coût de la dépense fiscale et de la niche sociale (que constitue les exonérations dans le cadre des indemnités de rupture) (serait) compris entre 1 et 2 milliards d'euros" mais invitent l'administration à préciser ces évaluations.

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