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SYRIE

À la morgue d’Alep-Est, 70 cadavres et des documents précieux abandonnés

Entrée de la morgue d'Alep-Est. La bâtiment a été bombardé à plusieurs reprises et est presque totalement détruit aujourd'hui. Image Facebook.
Entrée de la morgue d'Alep-Est. La bâtiment a été bombardé à plusieurs reprises et est presque totalement détruit aujourd'hui. Image Facebook.
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Mohamed Kehil a quitté Alep-Est dans la précipitation, lundi 19 décembre. Il était le directeur du service de médecine légale d’Alep-Est, où des bénévoles ont documenté la mort de milliers de personnes tombées sous les bombes du régime tout au long de ces dernières années.

Mohamed Kehil a été évacué avec des milliers d’autres civils dans des autocars, lundi 19 décembre. Il a pu rejoindre la province voisine d’Idleb sans encombre et il a été accueilli par des proches dans de bonnes conditions. Mais il part le cœur lourd. Le sort de milliers de rapports, photos et comptes-rendus documentant les morts non-identifiés des quartiers Est d’Alep est incertain.

 

 

 

 

"Nous avons laissé 70 corps de personnes décédées"

 

 

 

 

À la veille de mon départ, le bâtiment qui abrite le service de médecine légale d’Alep-Est a été attaqué. Dans la nuit de samedi 17 décembre, deux de mes collègues qui étaient à l’entrée du bâtiment ont été tués par des snipers. Cette nuit-là, plusieurs de mes collègues étaient restés coincées à l’intérieur et ne pouvaient pas sortir à cause des snipers du régime, qui étaient déployés en face du bâtiment dans la zone de Cheikh Saïd.

Avec des amis, nous avons finalement pu creuser un trou à l’arrière du bâtiment – qui n’était pas à portée de tirs de combattants pro-Assad – pour évacuer mes collègues.

Photos de la morgue d'Alep-Est. Le bâtiment a été sérieusement endommagé par les bombardements ces derniers mois.

La morgue d’Alep-Est a été bombardée à plusieurs reprises par l’aviation du régime syrien et ses alliés russes ces derniers mois. Les réfrigérateurs servant à conserver les corps ont été détruits au cours de l’un de ces raids en août 2016. Depuis, les bénévoles étaient contraints d’enterrer les corps des victimes rapidement, pour éviter que des maladies se propagent.

Mohamed Kehil poursuit :

 

 

Nous avons laissé 70 corps de personnes décédées dans des bombardements ces derniers jours à l’intérieur du bâtiment. Nous devions les enterrer vendredi, mais nous n’avons pas pu le faire car le cimetière était à portée de tirs des forces pro-Bachar.

 

 

"Nous constituons cette base de données pour aider les familles à identifier leurs proches décédés"

 

Nous n’avons pas non plus pu emporter les milliers de documents rédigés ces dernières années. Il s’agit de rapports contenant des informations détaillées sur les victimes des bombardements. Quand une personne mourait et qu’on trouvait un document d’identité sur elle, on rédigeait un rapport détaillé contenant des photos et des informations sur sa constitution, la taille, la couleur des yeux, tout signe distinctif qui pouvait aider à l’identifier. Dans ces rapports, on consignait également des informations sur le quartier où la personne a été retrouvée morte et la personne qui l’a amenée au service. Après enquête, on enterrait la personne et on lui attribuait un numéro de tombe qu’on mettait dans son dossier.

 

Images montrant les bénévoles en train de documenter les morts à la morgue d'Alep-Est. Images Facbook.

 

Nous avons donc constitué cette base de données notamment pour aider les familles à identifier leurs proches décédés, et ainsi faire leur deuil. Maintenant, si le bâtiment est brûlé ou saccagé, ces informations seront détruites et tout le travail que nous avons effectué partira en fumée.

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