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Veut-on vraiment relancer le tourisme en France ?

Par Francois Bacchetta (directeur général France d’easyJet)

Publié le 22 déc. 2016 à 01:01Mis à jour le 6 août 2019 à 00:00

Face à la diminution d'environ 8 % de sa fréquentation touristique internationale en 2016, chacun s'accorde à dire que la France doit réagir. Les mesures et moyens supplémentaires annoncés lors du comité interministériel et de la conférence nationale du tourisme, notamment pour la promotion de la destination et la sécurité des visiteurs, doivent permettre d'améliorer son attractivité. Ils seront cependant insuffisants s'ils ne s'accompagnent pas d'une stratégie pour renforcer sa compétitivité en tant que destination. A cet égard, le transport aérien est un atout majeur, depuis longtemps négligé.

Comme l'a rappelé la Cour des comptes le 12 octobre dernier dans son rapport sur la compétitivité du transport aérien, l'Etat est, à ce sujet, tiraillé entre des intérêts souvent contradictoires. A la fois actionnaire des infrastructures aéroportuaires, actionnaire du pavillon national et régulateur d'un secteur de plus en plus privatisé, il peine à jouer son rôle d'Etat stratège, capable de définir une politique touristique cohérente. Ce rôle est pourtant plus essentiel que jamais.

En effet, la baisse des prix dans l'aérien, permise par l'émergence de nouveaux acteurs, a démocratisé le tourisme international et multiplié les destinations potentielles. Avec 67 millions d'Européens parmi ses 84,5 millions de visiteurs internationaux en 2015, la France est particulièrement concernée. Elle doit rester attractive auprès d'une clientèle qui compare les destinations sur la base d'un budget fixe et voyage en liaisons directes de court et moyen-courrier. Or la France est en retard en matière de pénétration du low cost : moins de 30 % du court et moyen-courrier contre 47 % en moyenne en Europe. Trop chère, elle décourage la création de nouvelles liaisons pour des entreprises dont les marges sont déjà faibles.

Cette situation est, d'une part, le résultat de redevances aéroportuaires très élevées, sous l'effet de la privatisation des grands aéroports qui a conduit à l'instauration de « doubles caisses ». Cette pratique, qui consiste à séparer les revenus du transport aérien et ceux des recettes commerciales, est inflationniste par nature. Elle se fait au bénéfice des aéroports, qui ne sont que très peu encouragés à trouver des gains de productivité, et au détriment des passagers. Ces derniers ont donc tendance à se tourner vers d'autres destinations, moins coûteuses, notamment en Europe du Sud. Certains l'ont bien compris, comme l'aéroport d'Amsterdam, qui a baissé ses tarifs de 25 % en trois ans et observe cette année 10 % de passagers de plus qu'en 2015.

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C'est d'autre part la conséquence des nombreuses taxes qui pèsent directement sur le passager. Alors que l'on cherche à attirer plus de visiteurs, celles-ci ne font que croître. Il faut repenser en profondeur cette fiscalité, bien au-delà des habituelles exemptions sur les voyageurs en transit.

Cela concerne en premier lieu la taxe d'aéroport, qui a augmenté de plus de 600 % en dix ans et dont les passagers sont les seuls à s'acquitter. D'un montant de plus de 6 euros par passager sur les vols européens, elle se trouve à équivalence avec la marge moyenne par siège court-courrier d'une compagnie rentable ! Il serait logique que tous ceux qui bénéficient des services aéroportuaires qu'elle finance, par exemple les commerces et hôteliers de l'aéroport, participent à l'effort.

C'est aussi le cas de la taxe d'aviation civile appliquée à chaque passager, alors que son application sur la base des mouvements d'avion, quel que soit le nombre de passagers à bord, inciterait les compagnies à atteindre de meilleurs taux de remplissage. Une telle mesure permettrait, à revenu fiscal constant, d'améliorer la compétitivité touristique et de limiter les émissions de CO2 par passager.

Pour que les touristes choisissent la France, l'Etat doit retrouver son rôle de stratège et assumer une politique du tourisme clairement orientée vers les visiteurs.

François Bacchetta

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