Le ministre argentin du Budget des Finances, Alfonso Prat-Gay, lors de la réunion annuelle du FMI et de la Banque Mondiale, le 6 octobre 2016 à Washington

Le ministre argentin du Budget des Finances, Alfonso Prat-Gay, lors de la réunion annuelle du FMI et de la Banque Mondiale, le 6 octobre 2016 à Washington

afp.com/SAUL LOEB

Mardi, le ministre argentin du Budget et des Finances, Alfonso Prat-Gay, a revendiqué "un record historique", "un succès au-delà des espoirs" du gouvernement de centre-droit, motivé selon lui par une confiance retrouvée dans les institutions.

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Les Argentins avaient jusqu'au 31 décembre pour transmettre au fisc leur déclaration de patrimoine, moyennant une pénalité réduite. Ils peuvent encore le faire jusqu'au 31 mars, avec une pénalité supérieure.

Certains ont choisi de rapatrier l'argent placé sur des comptes en Uruguay, aux Etats-Unis ou en Europe vers l'Argentine, d'autres ont choisi de déclarer au fisc argentin les dépôts bancaires et les maisons ou appartements à Miami ou à Punta del Este (Uruguay), la cité balnéaire chic des Latinoaméricains.

Sans nier une confiance accrue des Argentins les plus aisés, l'économiste Dante Sica considère que la peur du gendarme fiscal est la principale motivation.

"A l'heure où se renforce dans le monde la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue, il est chaque jour plus difficile d'avoir des biens non déclarés", fait-il remarquer.

"Il y a une grosse pression, il y a de plus en plus d'échange d'informations entre les administrations fiscales", ajoute-t-il.

L'ampleur du phénomène de régularisation fiscale atteint un niveau correspondant à un tiers de l'estimation officielle de fonds argentins - non déclarés - à l'étranger, 250 à 300 milliards de dollars, selon l'Indec, l'institut de statistiques.

- Fraude fiscale généralisée -

Sur les 90 milliards déclarés, 5,6 iront directement dans les caisses de l'Etat argentin au titre de pénalités, les avoirs bancaires et immobiliers à l'étranger étant taxés par le fisc argentin.

"C'est très positif, car la base imposable en Argentine augmente fortement. Avant, ces actifs n'étaient pas imposés", relève l'économiste argentin, qui pense que le chiffre peut atteindre 150 milliards de dollars en mars.

Les Argentins ont la réputation d'être des champions de la fraude fiscale. Par obligation, disent-ils souvent.

L'hyperinflation des années 1980/1990 (jusqu'à 3.000% en 1989), le gel des avoirs bancaires pendant la crise économique de 2001, une instabilité économique et monétaire chronique, le contrôle des changes de 2011 à 2015 ont poussé de nombreux Argentins à placer leurs économies hors du pays ou hors du système, par sécurité.

D'après Dante Sica, la démonstration de confiance témoignée par les Argentins est "un élément de plus qui joue en faveur" de l'Argentine, alors que le gouvernement veut attirer des investisseurs étrangers encore rétifs, qui s'interrogent si c'est le moment d'engager des investissements.

Le patron de l'administration fiscale, Alberto Abad, a précisé que 235.000 déclarations avaient été déposées. Sur les 1.700 biens immobiliers recensés comme appartenant à des Argentins aux Etats-Unis, 70% ont été régularisés.

Autre effet positif, l'afflux de devises permet également de renforcer les réserves monétaires de la troisième économie d'Amérique latine.

Après l'accord trouvé en février avec les fonds vautours sur la dette, le boom fiscal de décembre constitue un succès de taille pour le gouvernement du président de centre-droit Mauricio Macri.

De quoi tempérer une première année de mandat difficile, où les résultats annoncés au moment de lancer des réformes économiques tardent à se matérialiser.

Dante Sica s'attend à ce que le rapatriement des fonds dans le pays se traduise en 2017 par des investissements dans l'immobilier, ce qui serait une aubaine à l'heure où le gouvernement cherche à relancer une économie en récession, avec un PIB attendu en recul de 2,4% cette année par l'Indec.

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