Publicité

No Logo, le retour

Les ennemis des marques et des logos se manifestent à nouveau aux Etats-Unis, rappelant les grandes luttes anti-consuméristes de la fin des années 90.

0211646824718_web.jpg
Ennemis des logos clinquants et rutilants, un nombre croissant de consommateurs (plutôt happy few et bobo) partagent vidéos et billets de blogs enseignant comment les retirer sans dommage, à l’aide d’un cutter et de patchs absorbants.

Par Véronique Richebois

Publié le 30 déc. 2016 à 18:27

Abercrombie & Fitch a réduit la taille de son logo. Une manière de se prémunir du mal qui, ces dernières semaines, s’attaque à l’industrie de la mode sur le marché américain et pourrait menacer de se transformer en cauchemar pour les marques, rapporte le Wall Street Journal dans son édition du 26 décembre 2016. Ennemis des logos clinquants et rutilants, un nombre croissant de consommateurs (plutôt happy few et bobo) partagent en effet vidéos et billets de blogs enseignant comment retirer sans dommage, à l’aide d’un cutter et de patchs absorbants, le crocodile Lacoste, le joueur de polo Ralph Lauren, la griffe Ray-Ban sur les lunettes de soleil ou le swoosh de Nike. « Pourquoi ferais-je de la publicité gratuite pour quelqu’un ? », interpelle Marx Ilitch, 47 ans, consultant et consommateur rebelle, confessant au quotidien américain avoir ôté le fameux crocodile d’une bonne dizaine de ses chemises Lacoste.

Une réminiscence de la fin des années 90, lorsque Naomi Klein se taillait un beau succès en pourfendant la tyrannie des marques avec son « No Logo » et que l’heure était à « l’anti mode » ? Il y a un peu de cela, bien sûr. Dans son livre, l’essayiste altermondialiste insistait sur les origines du « branding » apparu aux Etats-Unis à la fin du XIXème siècle en réponse à une production industrielle de produits uniformes, presque impossibles à distinguer les uns des autres. Tout au long des années 1880, avaient surgi, un à un, les logos commerciaux personnalisant les produits de grande consommation, comme la soupe Campbell, les cornichons H.J.Heinz ou les céréales Quaker Oats.

Riposte des « anti-pub »

Il avait fallu toutefois attendre une bonne centaine d’années et les « eighties », avant de voir, dans l’univers du prêt-à-porter, les logos de marque jusqu’ici discrètement placés à l’intérieur des cols, débouler dans la rue. Désertant les terrains de polo et de tennis, Ralph Lauren et Lacoste avaient lancé la tendance, bientôt rejoints par les logos de Calvin Klein, Esprit, Roots, Tommy Hilfiger... En retour, la riposte des anti-pubs et des anti-consuméristes avait été violente... et brève, car freinée par la crise financière de 2008. Pour dégriffer un polo Ralph Lauren, encore faut-il en posséder un.

Publicité

Mix de « love & hate »

L’incursion des internautes sur des sites délivrant des astuces pour « dé-logoïser » son polo ou son sac a donc des allures familières, alors que par ailleurs, le nombre d’adblockers, ces logiciels qui bloquent les pubs en ligne, ne cesse de croître. « Il existe un mix de « love & hate » autour des marques iconiques, qui est le fait de consommateurs éduqués et ultra-informés par les réseaux sociaux, relève Olivier Altmann, président de l’agence Altmann + Pacreau. De façon paradoxale, ils vont désirer acheter la basket dernier cri ou la casquette portée sur son compte Instagram par Jay Z, mais préféreront louer leur sac à main, et n’hésiteront pas à boycotter une entreprise branchée si elle n’a pas respecté leurs valeurs morales. » Ce sont ces adeptes de « coolitude » qui à l’étranger font le succès de la styliste anti-fourrure Stella McCartney. Voire, en plus pointu, de Supreme, la marque de streetwear qui mélange habilement la culture élitiste et la culture rap et a ouvert sa première boutique en France en mars.

Contre- culture

Et eux encore qui plébiscitent la griffe Vetements, qui marie artisanat et sous-culture en tout genre. Deux poids lourds des réseaux sociaux, les américains Jared Leto et Kanye West, assistaient récemment à Paris au défilé de l’une de ses collections. « Ces marques sont appréciées par une génération qui continue d’avoir une revendication identitaire, à travers les grands noms statutaires du luxe et de la high-tech, tout en refusant les codes imposés par les marques », souligne Georges Lewi, spécialiste des marques et des mythologies contemporaines. Une génération pétrie de contradictions, tâtonnant entre l’anticonformisme, la tentation de la contre-culture et l’adéquation aux valeurs morales partagées par le plus grand nombre.

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres

Nos Vidéos

xx0urmq-O.jpg

SNCF : la concurrence peut-elle faire baisser les prix des billets de train ?

xqk50pr-O.jpg

Crise de l’immobilier, climat : la maison individuelle a-t-elle encore un avenir ?

x0xfrvz-O.jpg

Autoroutes : pourquoi le prix des péages augmente ? (et ce n’est pas près de s’arrêter)

Publicité