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Ça se passe en Europe : le laborieux projet suédois d’un quota de femmes au CA des entreprises cotées

Pour faire bouger les choses, le gouvernement a prévu une loi qu’il aura du mal à imposer face aux résistances… notamment féminines.

Par Antoine Jacob

Publié le 5 janv. 2017 à 06:03

L’image d’une Suède à cheval sur la parité entre femmes et hommes en prend pour son grade. Du moins dans le monde des entreprises cotées en Bourse. En 2015, leurs conseils d’administration ne comptaient en moyenne que 28% de membres féminins. Pas assez, selon la coalition au pouvoir, qui réunit sociaux-démocrates et verts. Le gouvernement, lui, ne compte-t-il pas une moitié de femmes ministres, le Parlement, 43% de députées ?

Pour faire bouger les choses, un projet de loi a donc été concocté. Quelque 280 entreprises cotées et une cinquantaine d’entreprises détenues par l’Etat devront aligner 40% de femmes au sein de leurs conseils d’administration d’ici à 2019. Sous peine, le cas échéant, d’écoper d’une amende pouvant aller de l’équivalant de 26.000 à 525.000 euros, selon la taille des contrevenantes.

Vives critiques

« Cela ne suffit pas de promettre une amélioration à longueur d’année, il faut des résultats ! », a lancé le ministre de l’Economie, Mikael Damberg, au moment de la présentation du projet de loi à la presse, en septembre dernier. Avant même cette initiative, des visages bien connus du monde des affaires suédois étaient montés au créneau pour dénoncer la méthode gouvernementale. Un concert de protestations dans lequel les voix des femmes ne sont pas les moins audibles. « Le droit des actionnaires de choisir par eux-mêmes le conseil d’administration d’une entreprise est un pilier de la libre entreprise », ont ainsi insisté quatre des plus influentes femmes d’affaires du royaume, dans une tribune publiée dans le « Dagens Nyheter » .

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Dans l’opposition de centre-droit également, les critiques sont vives. Et puisque trois des quatre partis la composant sont présidés par des femmes, ce sont elles qu’on entend le plus. Au lieu de se mêler de ce dossier ne concernant qu’un faible nombre de personnes, le gouvernement ferait mieux de « lutter contre les inégalités rencontrées au quotidien par les femmes ayant un travail et des revenus normaux », a objecté Annie Lööf, la chef du Parti centriste. Pour la chrétienne-démocrate Ebba Busch Thor, « les femmes n’ont pas la même expérience de diriger » des entreprises que les hommes, en raison des inégalités passées. « On ne peut pas prétendre que les Suédoises ne sont pas à la hauteur, a rétorqué la ministre de l’Egalité, Åsa Regnér . Même les entreprises n’affirment plus une telle chose… »

Un tiers de femmes dans les conseils fin 2016

Le problème pour le gouvernement, qui se proclame « féministe » depuis son arrivée au pouvoir en 2014, c’est qu’il est minoritaire au Parlement. Y compris en additionnant les sièges détenus par son allié, le Parti de gauche. Aucun projet de loi ne peut passer sans l’abstention ou le soutien de partis de l’opposition. Et dans le cas particulier des quotas, l’heure n’est pas au compromis. Le gouvernement assure croire en un possible geste de la part du Parti conservateur, lui aussi dirigé par une femme, Anna Kinberg Batra. Mais c’est loin d’être gagné. Même si, de l’autre côté de la frontière norvégienne, c’est un autre parti conservateur qui avait initié une loi imposant un quota identique de 40%, en vigueur depuis 2008.

Dans l’éventualité d’un accord politique sur le sujet en Suède, les entreprises concernées par le projet de loi se préparent, plus ou moins rapidement. En un an, la proportion des femmes dans leurs conseils d’administration est passée de 28% à 32% (fin 2016). Et la quête de profils féminins intéressants est en cours dans la perspective des assemblées générales d’actionnaires qui se tiendront au printemps. Avec un peu de chance pour le gouvernement minoritaire, l’objectif des 40% pourrait être approché, si ce n’est atteint, sans même avoir à trouver une improbable majorité au Parlement.

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