Djihad : dans le bourbier de la prévention de la radicalisation

Le Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam (CPDSI) a publié un enregistrement pirate d'une réunion interministérielle de février 2016...

Par

Dounia Bouzar, anthropologue controversée, est à la tête du Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam (CPDSI).  
Dounia Bouzar, anthropologue controversée, est à la tête du Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam (CPDSI).   © AFP

Temps de lecture : 4 min

"Déradicalisation" ? "Désembrigadement" ? "Désengagement" de l'islam radical ? Trop de terminologies, on s'y perd ! On cherche le meilleur mot – le moins mauvais – pour désigner... quoi en fait ? La meilleure manière de réinsérer des djihadistes dans la société ? Leur faire comprendre la nocuité de leur discours ? La nécessité qu'ils renoncent à toute idée de violence et qu'ils se contentent d'une radicalité religieuse apaisée ? Sur le fond, tout le monde est d'accord.

Le point du soir

Tous les soirs à partir de 18h

Recevez l’information analysée et décryptée par la rédaction du Point.

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

La méthode, maintenant. "Les programmes de déradicalisation sont une tartufferie", accusait en décembre le journaliste David Thomson, qui vient de publier un ouvrage référence sur le djihad. Selon lui, le principal programme lancé entre 2014 et 2016, celui de Dounia Bouzar, a "été totalement discrédité par plusieurs échecs spectaculaires" et n'avait qu'un seul but, pour le ministère de l'Intérieur : développer une communication d'action, une manière de dire nous faisons quelque chose".

Des djihadistes considérés comme des "alcooliques anonymes"

En 2014, les pouvoirs publics, qui n'avaient pas anticipé le phénomène djihadiste, se retrouvent effectivement dans une impasse. Comment prévenir la radicalisation ? Sur qui s'appuyer, psychologues, psychiatres ou religieux ? À quelles structures ou associations confier le chantier ? C'est ainsi que Dounia Bouzar, qui s'était forgé une petite réputation dans le milieu et pour qui le djihadisme est avant tout question de dérive sectaire, était entrée en scène.

Jusqu'à ce qu'elle claque la porte du gouvernement en février 2016, pour manifester son opposition à la réforme de la déchéance de nationalité. À l'heure des premiers bilans et sur la base de plusieurs entretiens menés avec des djihadistes "revenants" qui ont eu affaire aux méthodes de Bouzar, David Thomson considère aujourd'hui que la chercheuse est "décrédibilisée sur le plan institutionnel". Le journaliste estime qu'il ne "faut pas évacuer la composante psychiatrique du phénomène, mais [que] la détermination politique et religieuse [des djihadistes] est centrale dans leur engagement". Tenter de les déradicaliser en s'adressant à eux comme des "alcooliques anonymes", comme le fait Bouzar, est donc totalement ridicule, ajoute-t-il.

Un enregistrement pirate

Des critiques qui trouvent un large écho chez les acteurs de terrain, notamment Marik Fetouh, porte-parole du Centre d'action et de prévention contre la radicalisation (Capri) à Bordeaux, qui rejette la théorie de l'emprise mentale : "Nous, on veut croire que les jeunes qui se radicalisent font un choix, restent maîtres d'eux-mêmes. C'est très important, car cela laisse supposer qu'ils peuvent se positionner autrement. Faire le choix inverse", explique-t-il.

Échaudé par ces critiques, le Centre de prévention des dérives sectaires liées à l'islam (CPDSI), dirigé par Dounia Bouzar, a publié jeudi 5 décembre un enregistrement pirate d'une réunion interministérielle qui s'est tenue le 5 février 2016. C'est lors de cette réunion, en présence de plusieurs membres de cabinet et du préfet Pierre N'Gahane, que Dounia Bouzar avait annoncé arrêter son partenariat avec le gouvernement en matière de lutte contre la radicalisation. La chercheuse, comme l'indique le tweet de sa fille, entend ainsi prouver qu'elle n'a jamais été décrédibilisée sur le plan institutionnel, mais que c'est bel et bien elle qui avait souhaité mettre fin à la collaboration.

"Ceci doit figurer dans le compte rendu ?"

Outre la méthode employée – l'enregistrement clandestin d'une réunion au cœur du pouvoir –, l'initiative du CPDSI interroge. Car si l'enregistrement ne dit rien sur la qualité du travail de Dounia Bouzar, il révèle cependant à quel point le gouvernement était démuni en février 2016 face à la radicalisation. Un an après l'attentat contre Charlie Hebdo et quatre ans après les premiers départs de jeunes Français pour faire le djihad, on entend ainsi distinctement un membre du gouvernement déplorer : le travail de Dounia Bouzar, "personne d'autre n'est capable de le faire".

Une Dounia Bouzar qui, fustigeant le manque de soutien du gouvernement et l'incapacité de ce dernier à épauler son action, s'était vu répondre, lors de cette même réunion, par un conseiller inquiet : "Ceci doit figurer dans le compte rendu ?"

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation

Commentaires (12)

  • yen a marre

    Comme l'alcoolisme, l'agressivité, la drogue ect... , certains se félicitent lorsqu'ils arrivent à en faire sortir 5%.
    Mais le djihadisme c'est autre chose, ce sont des fous prêts à tuer femmes, enfants, personnes âgées ou non, si on en sauvent 5%, cela voudra dire que 95% sont dans la nature et prêts à exécuter leurs basses besognes.
    Il n'y a pas trente six solutions pour éradiquer ce phénomène, dès qu'une personne fait état de djihadisme, il faut lui retirer immédiatement la nationalité Francaise s'il l'a possède et immédiatement l'expulser.

  • lucien43

    Il faut leur supprimer la nationalité Française et les empêcher de revenir.

  • papilolo

    . FH n'a qu'à le décorer de la légion d'honneur avant de quitter l'Elysée.