Bayrou, plutôt Macron que Fillon ?

De plus en plus d'indices montrent que François Bayrou ne serait pas si hostile à un rapprochement avec Emmanuel Macron plutôt qu'avec François Fillon.
De plus en plus d'indices montrent que François Bayrou ne serait pas si hostile à un rapprochement avec Emmanuel Macron plutôt qu'avec François Fillon. © LOIC VENANCE / AFP
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Très dur envers l’ex-ministre de l’Economie il y a quelques semaines, le président du MoDem a clairement nuancé son discours. Alors qu’il critique le candidat de la droite à l’envi. 

Et si François Bayrou se ralliait finalement à Emmanuel Macron, plutôt qu’à François Fillon ? D’inenvisageable il y a quelques semaines, cette hypothèse a doucement glissé pour changer de statut et passer aujourd’hui au stade de "plausible". Car le président du MoDem, tout en critiquant vertement le candidat de la droite,  a considérablement nuancé son discours sur le fondateur d’En Marche !. Dont les positions centristes ont, il est vrai, toute matière à le séduire, bien plus en tout cas que le projet très droitier du vainqueur de la primaire des Républicains.

Fillon, l’inflexible et le "chrétien", l’agace

Ces derniers jours, François Bayrou n’a pas caché son agacement face à la posture adoptée par François Fillon. Sur sa volonté de ne rien changer à son programme d’abord. "Autrement dit, c’est à prendre ou à laisser. Or, si on dit aux millions de Français qui s’interrogent ‘c’est à prendre ou à laisser’, il y a beaucoup de probabilités qu’ils disent ‘on laisse’. Et c’est tout à fait fondé", a déclaré le maire de Pau sur Europe 1 mercredi matin. "Fillon devrait réfléchir à la différence qu’il y a entre le candidat d’un camp et celui qui veut être le président de tout un pays", a-t-il insisté en guise de conseil "amical".

Et puis il y a cette affaire de religion. François Bayrou n’a pas vraiment apprécié que le candidat de la droite ait avancé le fait qu’il soit chrétien, le 3 janvier sur TF1, pour affirmer qu’il ne prendrait "jamais une décision qui sera contraire au respect de la dignité humaine, de la personne, de la solidarité". Et il l’a redit mercredi matin. "Quand on est interrogé sur le sujet de la religion, il est naturel de dire ce qu’on est, ce qu’on croit. Mais lorsqu’il s’agit de transformer une conviction religieuse en position politique, alors là on manque aux principes qui sont ceux de notre pays depuis deux siècles", a lâché le président du MoDem.

Et le problème, c’est qu’à son tour, François Fillon s’est montré agacé, doux euphémisme, par les critiques de François Bayrou. "Bayrou ne manque pas d’air, il est ridicule. Il a dit la même chose vingt-cinq fois, il suffit d’aller sur les réseaux sociaux pour retrouver les séquences", s’est-il emporté mardi en marge de ses vœux à la presse, selon Marianne. Un conflit qui accrédite les dénégations des deux hommes sur un éventuel accord politique. "Je ne négocierai pas des morceaux de programme contre des circonscriptions", a d’ailleurs lancé le député de Paris lors de ses vœux. Bref, entre ces deux-là, un rapprochement ensemble pas d’actualité.

Macron, d’"hologramme" à "on va voir"

Alors que concernant Emmanuel Macron, la tendance est inverse. Très virulent en fin d’année 2016, le maire de Pau est désormais beaucoup moins catégorique quand il s’agit de l’ancien ministre de l’Economie.

En septembre, il se disait ainsi "absolument sceptique sur cette affaire. Et quand je dis sceptique, c'est le mot le plus modéré que je puisse choisir", avait-il insisté, poussant à s’interroger à ce qu’il y avait derrière cet "hologramme". "Il y a là une tentative qui a déjà été faite plusieurs fois par plusieurs grands intérêts financiers et autres, qui ne se contentent pas d'avoir le pouvoir économique, mais qui veulent avoir le pouvoir politique. Il y a la séparation de l'Église et de l'État. Moi je suis pour la séparation de l'État et de l'argent." Et de conclure, on ne peut plus clair : "Cela ne marchera pas. Je mènerai la bataille pour qu'il n'en soit pas ainsi".

Quelques semaines plus tard, la donne a changé. Si François Bayrou semble toujours méfiant, le discours est beaucoup plus amène. "J’ai deux interrogations : est-ce qu’il est armé pour être président de la République ? Et quel est son projet ? Pour l’instant, sur ces deux interrogations, je n’ai pas de réponses affirmées. On va voir", a-t-il expliqué sur Europe 1. "Le jour où Emmanuel Macron dira ce qu’il veut faire, quels sont les axes, les choix qu’il va faire, à ce moment-là on verra si les idées du centre sont compatibles ou ne le sont pas". En clair, la porte est ouverte.  

Et elle l’est d’autant plus que dans son propre camp, la balance penche pour Emmanuel Macron plutôt que pour François Fillon. Mardi, une quinzaine de personnalités MoDem, certes pas forcément de premier plan, ont signé dans le Huffington Post un "appel à responsabilité à François Bayrou" et à l’ensemble du parti pour que tous rejoignent le fondateur d’En Marche!. "Nous, militants du MoDem, nous vous appelons à accompagner, dès maintenant, Emmanuel Macron et à vous mettre En Marche !, écrivent les signataires. Ou quand la petite musique d’un rapprochement Bayrou-Macron devient de plus en plus audible.