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Mozilla dresse un bilan sombre de la santé d’Internet

De moins en moins sûr, exposé à la censure et à la fragmentation, menacé par les intérêts privés, le réseau verrait sa qualité se dégrader. La fondation américaine va observer sa santé dans un rapport qu’il publiera régulièrement.

Par Nicolas Rauline

Publié le 19 janv. 2017 à 09:00

La fondation Mozilla , qui édite notamment le navigateur Firefox, prend le pouls d’Internet. Elle va désormais publier, régulièrement, un rapport sur la « santé d’Internet », en étudiant plusieurs critères : le degré d’ouverture du réseau, l’accès à Internet et la liberté d’expression, le contrôle du réseau et des contenus, la sécurité et le respect de la vie privée, l’égalité des chances...

Mozilla a, pour cela, compilé des données, des travaux de chercheurs, des articles et les a croisés avec ses propres observations. L’objectif : « faire de la santé d’Internet un sujet aussi grand public que la protection de l’environnement », selon Mark Surman, directeur exécutif de la fondation Mozilla . « Il faut que les gens comprennent qu’un Internet libre, ouvert et sûr, c’est la garantie d’opportunités pour eux. Et que, tout comme la pollution, le mauvais comportement de certains a des répercussions sur l’ensemble de la société. »

D’après lui, la santé globale d’Internet s’est dégradée ces dernières années, même si l’on a avancé sur certains critères. « De plus en plus de gens ont accès à Internet, les barrières pour y développer des projets sont de plus en plus basses. Tout cela, c’est positif. Mais, d’un autre côté, le poids pris par certaines entreprises privées comme Google, Facebook ou Apple peut générer des craintes. » Dans le détail, le rapport se décompose en cinq grandes parties, ci-dessous. La version publiée ce jeudi est une version « 0.1 » : Mozilla va réunir dans les mois qui viennent des experts pour plancher sur une première version définitive, qui sera publiée à la fin de l’année, puis régulièrement.

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Un Internet ouvert ?

D’après Mozilla, le développement d’un certain nombre de technologies vont dans le bon sens. Internet conserve un esprit de gratuité qui fait que l’on peut y prendre librement des cours, se former... Ainsi, ce sont plus de 1,1 milliard de sites Web qui existent à travers le monde, souligne le rapport.Les technologies ouvertes ont aussi permis l’émergence de projets comme Wikipedia ou Wordpress. Et des Etats (dont l'Inde, le Royaume-Uni ou les Etats-Unis) ont développé des politiques de promotion du logiciel libre ou d’ouverture des données publiques. Pourtant, dans le même temps, celui-ci affirme que certaines réglementations menacent cette ouverture, comme la rigidité dans certains pays du copyright, l’omniprésence des brevets, des DRM. Pire : la création d’écosystèmes fermés pourrait conduire à un Internet fragmenté.

Un Internet libre, accessible à tous ?

Dans ce domaine, le rapport rappelle quelques réalités. S’il y a désormais plus de gens qui ont accès à Internet dans les pays émergents que dans les pays riches, une majorité d’habitants de la planète en est encore privée, essentiellement pour des raisons économiques (il y a 3,3 milliards d’internautes en tout).

Et ceux, nombreux dans les pays en développement, à y avoir accès uniquement via le mobile, sont bridés dans leur utilisation et peuvent difficilement utiliser certains services (postuler à un emploi, par exemple, écrire et publier des articles longs...) En outre, la censure est une réalité dans une majorité des pays, à des degrés différents.

L’an dernier, selon AccessNow, il y a eu 51 coupures volontaires d’Internet de la part de gouvernements à travers le monde, dans 18 Etats différents. Enfin, le rapport note un déséquilibre linguistique au profit de l’anglais, qui prive une grande partie de la population mondiale de l’accès à certains contenus : 52 % des sites Internet sont en anglais (en 1998, cette proportion était même de 75 %), alors que 25 % de la population mondiale comprend l’anglais. A l’autre extrémité, le chinois, deuxième langue la plus parlée par les internautes, ne représente que 2 % des contenus sur le Web.

Un Internet décentralisé ?

Mozilla souligne que, si la structure d’Internet demeure décentralisée, les habitudes de consommation tendent à se focaliser sur quelques entreprises privées, comme Google, Apple, Amazon, Facebook, Alibaba ou Tencent. Il en résulte un déséquilibre économique : 95 % de la valeur créée dans l’économie des applications mobiles va à dix pays riches, quand 1 % seulement va aux pays émergents.

Un Internet sûr ?

Mozilla rappelle que le traçage se généralise sur Internet et qu’il commence aussi à être relié à des phénomènes offline (caméras de vidéo-surveillance par exemple), malgré la hausse du cryptage.

Le rapport ajoute que plusieurs lois de surveillance ont été votées, en France, au Royaume-Uni ou au Pakistan, même après les révélations d’Edward Snowden et le rôle des agences américaines, dans la surveillance du Net. Et un tiers de la population mondiale n’est protégé par aucune loi sur ses données. Enfin, la cyber-criminalité est à la hausse, avec des exemples de demandes de rançon en ligne, de piratage de données, qui concernent tous les secteurs de l’économie et de la société.

Un Internet équitable ?

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Selon le rapport, la technologie est plus facile d’accès qu’il y a vingt ans. Et de nombreuses options existent pour s’y former gratuitement, au codage notamment. Mais une large majorité de gens ne comprennent pas encore comment le réseau et la publication de contenus fonctionnent.

Et de citer l’exemple de la propagation des « fausses informations ». Ainsi, un sondage a montré qu’une majorité de gens confondent, dans certains pays (le rapport cite notamment le Nigeria ou l’Indonésie) Facebook et Internet. Certaines populations se trouvent, en outre, encore à l’écart des programmes d’accès à la technologie dans le monde, comme les femmes ou les populations rurales. L’Europe n’est pas la mieux lotie : 37 % de la population y a des compétences numériques « insuffisantes », 13 % n’en a pas du tout.

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