Publicité

Les voitures volantes prêtes à décoller

La Silicon Valley se passionne pour les petits aéronefs électriques. Le cofondateur de Google Larry Page investit dans des startups et Uber se rêve en opérateur d'une flotte d'engins volants.

7099_1485339088_voitures-volontes-proto.jpg
Vue d'artiste du prototype d'engin volant électrique S2 du californien Joby Aviation. A mi-chemin entre l'avion et l'hélicoptère, il peut décoller et atterrir à la verticale. (Joby Aviation)

Par Anaïs Moutot, Anaïs Moutot

Publié le 27 janv. 2017 à 11:00

"Nous voulions des voitures volantes, à la place nous avons eu 140 caractères." Dans la Silicon Valley, tout le monde connaît cette phrase de Peter Thiel, le cofondateur de PayPal et de Palantir, qui exprime régulièrement sa déception face aux ambitions des entrepreneurs au XXIe siècle.

Mais la multiplication des annonces sur le développement de petits aéronefs pour effectuer les trajets du quotidien pourrait lui donner tort. Il y a deux semaines, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a annoncé que des taxis survolant la Seine seraient testés dès le mois prochain, tandis que Tom Enders, le PDG d'Airbus, a fait savoir qu'il comptait faire voler un prototype d'ici à la fin de l'année. Le groupe aéronautique a créé un laboratoire dans la Silicon Valley il y a un an, dans l'objectif précis de plancher sur le sujet.

La diversification de l'high-tech dans les transports

Publicité

Les petits engins volants intéressent aussi les entreprises high-tech, qui cherchent à se diversifier dans les transports. L'été dernier, le magazine "Bloomberg Businessweek" révélait que Larry Page, le cofondateur de Google, finançait à hauteur de plus de 100 millions de dollars Zee.Aero et Kitty Hawk, deux startups installées juste à côté du siège du géant de l'Internet, à Mountain View.

Le PDG d'Alphabet avait même initialement installé un appartement au deuxième étage de Zee.Aero avec chambre, salon et mur d'escalade ! Quant à Kitty Hawk, son président est Sebastien Thrun, l'un des pionniers de la voiture autonome de Google et le fondateur de Google X, son laboratoire de "moonshots".

Preuve que le secteur semble prêt à décoller, la Nasa a organisé trois séminaires au cours de l'année 2016 pour rassembler les différents acteurs travaillant sur le sujet, qu'il s'agisse des autorités de l'air américaines et européennes ou de la vingtaine de start-up travaillant sur le sujet.

Un prototype entre avion et hélicoptère

La majorité des prototypes ressemble à un croisement entre un hélicoptère (avec décollage et atterrissage à la verticale) et un avion (avec l'intégration d'ailes), mais peu d'entre eux disposent de roues. "Si vous voulez construire une voiture volante, vous obtenez un mauvais avion et une mauvaise voiture", estime Daniel Wiegand, l'un des cofondateurs de Lilium, une start-up allemande qui prévoyait à l'origine de développer un modèle roulant. "Les deux ont des besoins contradictoires : l'avion doit être extrêmement léger, alors que la voiture nécessite des suspensions, des roues et une structure protégeant des crashs", explique-t-il.

C'est l'une des raisons expliquant que, jusqu'à présent, "très peu de tentatives ont réussi, et que celles qui ont abouti s'accompagnaient de mauvaises performances", selon Kaushik Rajashekara, professeur en ingénierie à l'université du Texas à Dallas.

Car l'envie de construire une voiture volante n'est pas nouvelle : le véhicule peuple les ouvrages de science-fiction et les rêves d'ingénieurs au profil d'inventeurs fous depuis un siècle avec, à la clef, une longue liste de fiascos.

Une mise sur le marché dans les dix ans ?

Mark Moore, un ingénieur de la Nasa, responsable d'une équipe mettant au point deux prototypes, estime que les avancées récentes dans le secteur automobile ont changé la donne : "Nous avons désormais des moteurs électriques très légers, des technologies de batteries de plus en plus efficaces et des logiciels de conduite autonome", explique-t-il. Selon lui, cette combinaison rend une première mise sur le marché plausible "à l'horizon des dix prochaines années".

Publicité

Les moteurs électriques offrent un gros avantage : "Leur efficacité ne dépend pas de leur taille, contrairement aux moteurs à combustion ou aux turbines", explique Mark Moore, ce qui permet d'en utiliser plusieurs afin d'alimenter des hélices disposées un peu partout sur l'aéronef pour le propulser, au lieu d'avoir recours à un immense rotor sur le toit comme pour un hélicoptère. "Le rotor est un élément composé d'une myriade de pièces, donc très complexe à entretenir", explique Mark Moore.

Conduite autonome

Cela contribue au coût élevé de ce mode de transport, expliquant en partie sa production limitée (de l'ordre du millier d'hélicoptères civils livrés par an dans le monde) et l'impossibilité de l'utiliser au quotidien. Ce nouveau design permet également de mieux contrôler le véhicule lorsqu'il vole à des vitesses peu élevées et d'avoir un avion beaucoup moins polluant et plus sûr.

"La multiplication des moteurs offre une grande redondance", assure Mark Moore. Le X-57 Maxwell, prototype d'avion électrique de la Nasa, qui doit voler au-dessus du désert californien pour une vingtaine de minutes en 2018, possède 14 moteurs. "Si l'un tombe en panne, ce n'est pas un problème", assure-t-il.

Autre avancée majeure : l'élaboration de logiciels de conduite autonome pour l'automobile, qui pourraient trouver une application encore plus rapide dans les airs, où les obstacles sont moins nombreux que sur la route. Ils permettront eux aussi de réduire le coût, en évitant l'embauche de pilotes - ou, tout du moins, en diminuant dans un premier temps la durée de formation.

Le concept S2 de Joby Aviation

Les possibilités restent cependant limitées par la capacité des batteries, qui, si elles sont de plus en plus efficaces, ne permettent pas encore d'envisager des trajets de plus de 160 kilomètres, avant que l'engin ait besoin d'être rechargé pendant au moins une vingtaine de minutes.

Mais le principal obstacle reste le bruit, qui, s'il est moins élevé que celui d'un hélicoptère, demeure encore trop important pour que les autorités donnent leur accord pour des vols en zone urbaine.

Quant au modèle économique, l'idée est de commencer par vendre ces engins à de riches particuliers "pour qui la valeur du temps est élevée", explique Patrick Pelata, l'ex-numéro deux de Renault désormais à la tête d'une agence de conseil dans la Silicon Valley. L'étape suivante sera de proposer un service de transport aérien à la demande. Le sujet intéresse beaucoup Uber, qui a publié un Livre blanc d'une centaine de pages en novembre dernier. Il y imagine que l'on pourra un jour réserver une voiture volante avec un simple smartphone.

Vue d'artiste du prototype d'engin volant électrique S2 du californien Joby Aviation. A mi-chemin entre l'avion et l'hélicoptère, il peut décoller et atterrir à la verticale.Joby Aviation

Anaïs Moutot, correspondante à San Francisco

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres

Nos Vidéos

xx0urmq-O.jpg

SNCF : la concurrence peut-elle faire baisser les prix des billets de train ?

xqk50pr-O.jpg

Crise de l’immobilier, climat : la maison individuelle a-t-elle encore un avenir ?

x0xfrvz-O.jpg

Autoroutes : pourquoi le prix des péages augmente ? (et ce n’est pas près de s’arrêter)

Publicité