Penelopegate : la semaine où la droite a paniqué
Comment, en quelques heures, la droite est passée de la sidération à l’affolement. Voire pire.
Alain Juppé et Virginie Calmes entourent François Fillon ce mercredi, près de Bordeaux. (Thibaud Moritz/IP3/MAXPPP)
Après deux mois de faux plat et de critiques, cette semaine devait être celle du rebond pour François Fillon. La séquence avait été soigneusement préparée : photo avec la chancelière Angela Merkel lundi, déjeuner avec Alain Juppé à Bordeaux mercredi, puis lancement de la campagne dimanche avec un grand meeting parisien à la Villette. Des bus ont été affrétés dans toute la région parisienne et les départements limitrophes pour l'occasion. "La Villette, c'est le coup de feu du début de la campagne", explique un filloniste sur l'air du "vous allez voir ce que vous allez voir"
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En fin d'après-midi, le candidat partage une galette des rois avec son équipe au QG de campagne quand tombe la dépêche de l'AFP : "Mme Fillon était rémunérée comme attachée parlementaire et par la Revue des deux mondes, selon Le Canard enchaîné." Cri du cœur d'un parlementaire LR, "atterré" : "Putain, pas lui!"
Deux heures plus tard, la riposte s'ébauche. Oui, Penelope Fillon a "bien été la collaboratrice de François Fillon" et elle "a travaillé à la Revue des deux mondes", affirme le porte-parole Thierry Solère à l'AFP. "Il est fréquent que les conjoints des parlementaires soient leurs collaborateurs." Circulez, y a rien à voir. Fillon n'a pas encore compris, alors, que la machine infernale est lancée.
Hasard du calendrier, c'est en plein "Penelopegate" que les sarkozystes se retrouvent pour un petit déjeuner chez Françoise, près de l'Assemblée. Ils sont une cinquantaine à avoir répondu à l'invitation de Brice Hortefeux. À la table d'honneur : François Baroin, Luc Chatel ou Laurent Wauquiez. Ce dernier donne le ton : "Ni frondeur ni courtisan." Puis les critiques pleuvent sur la campagne du candidat.
"Il n'est jamais sur le terrain", râle un élu parisien. "On avait un plateau en argent et on est en train de le transformer en assiette en carton", s'inquiète le centriste Maurice Leroy. Sous cape, certains s'amusent de l'article du Canard. "Qui imagine tante Yvonne assistante parlementaire?" : la blague née à gauche fait florès à droite. Elle a un goût de revanche pour les sarkozystes, qui gardent en travers de la gorge les attaques de Fillon contre leur champion sur le thème des affaires. Et l'un d'eux de rappeler ce que Sarkozy disait au sujet de Dominique Strauss-Kahn quand il faisait encore figure de favori à la présidentielle : "Plus la lumière est intense, plus on voit les pellicules sur le costume."
Au même moment, un mur de caméras attend Fillon à Bordeaux. Regard noir colère, le candidat fustige la "misogynie" et dénonce les "boules puantes". Au fil des heures, la riposte des fillonistes vire à la cacophonie. La journée, qui avait commencé avec Bernard Accoyer expliquant avoir "souvent vu" Penelope Fillon "y compris à l'Assemblée nationale" quand Florence Portelli assurait que "Mme Fillon était dans la Sarthe", s'achève avec Valérie Boyer concédant avoir, elle aussi, embauché son fils, "mais pour des activités réalisées". La droite passe de la sidération à l'affolement. "À chaque fois qu'ils parlent, ils font des bourdes, s'énerve un député LR. Voilà ce qui arrive quand on a des porte-parole de division d'honneur!" C'est alors que le parquet financier annonce l'ouverture d'une enquête. "Là, on sait que c'est grave", soupire un éminent élu LR.
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Jeudi "Son équipe a explosé en vol"En off, les langues se délient à une vitesse folle. La gestion de la crise par l'équipe Fillon est stigmatisée. "Son équipe a explosé en vol mercredi. On a vu qu'il n'y avait aucun poids lourd autour de lui. Ce n'est pas à la hauteur", s'indigne un sarkozyste.
Et un élu parisien de renchérir : "Cette élection était imperdable et on a réussi l'exploit de rendre notre défaite possible!" Les parlementaires regagnent leur circonscription avec inquiétude. "Pour l'instant, c'est un sale coup, mais c'est sur le terrain qu'on mesurera vraiment l'impact auprès des gens", souligne un député juppéiste.
Un centriste relativise : "Vous voulez que je vous rappelle ce qu'a subi Chirac? Et Sarkozy? Dans huit jours on n'en parlera plus." Pour tenter d'éteindre l'incendie, Fillon change de stratégie. Celui qui, la veille, estimait qu'il n'y avait "rien à commenter" est annoncé au 20 Heures. Sur le plateau de TF1, le candidat fait tapis. "Maintenant, c'est entre les Français et lui", résume un ancien ministre.
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Vendredi "Quel plan B?"Vendredi matin, le soulagement domine. "Il y a un avant- et un après-20 Heures de TF1, assure Jérôme Chartier, conseiller spécial du candidat. S'il pouvait y avoir des doutes avant, ils ont été levés." Et d'évoquer les nombreux messages de soutien. "Il s'en est bien sorti", estime un député juppéiste. "Il ne pouvait pas faire mieux dans ce contexte", ajoute un sarkozyste. Mais l'évocation par le candidat lui-même de son retrait en cas de mise en examen autorise ipso facto les spéculations autour d'un éventuel "plan B".
À tel point qu'Alain Juppé s'est senti contraint d'y couper court en excluant "définitivement" de jouer les candidats de secours en cas de renonciation de Fillon. "Il a bien fait. Si Alain Juppé avait laissé se développer cette hypothèse, cela aurait affaibli François Fillon", juge le juppéiste Dominique Bussereau. "Le vrai problème, c'est qu'il n'y a pas un plan B mais dix plan B, et aucun ne ferait l'unanimité", soupire un député sarkozyste. "On n'en est pas là!", tempère un ancien ministre.
Puis, après un silence : "Et puis, quel plan B? On n'aurait pas le temps d'organiser une autre primaire. Ce serait entériner notre défaite." Cette petite musique ravageuse, Fillon doit tenter d'y couper court dimanche à la Villette. Sept mille personnes sont attendues, dont Alain Juppé, François Baroin, Valérie Pécresse, Jean-Christophe Lagarde, Laurent Wauquiez et… Penelope Fillon.
Source: JDD papier
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