Marne : une éducatrice mise à pied pour avoir dénoncé les conditions d'accueil des mineurs isolés

Une éducatrice spécialisée mise à pied pour avoir dénoncé publiquement les conditions d'accueil des mineurs isolés étrangers dans un foyer d'hébergement à Châlons-en-Champagne, dans la Marne.
Une éducatrice spécialisée mise à pied pour avoir dénoncé publiquement les conditions d'accueil des mineurs isolés étrangers dans un foyer d'hébergement à Châlons-en-Champagne, dans la Marne. © AFP
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avec AFP , modifié à
Elle avait alerté le Défenseur des droits après le suicide d'un jeune Malien, début janvier, qui avait sauté par la fenêtre de sa chambre.

"On veut me faire taire". C'est en ces quelques mots qu'a réagi lundi l'éducatrice spécialisée mise à pied pour avoir dénoncé publiquement les conditions d'accueil des mineurs isolés étrangers dans un foyer d'hébergement à Châlons-en-Champagne, dans la Marne, géré par son employeur et où un jeune Malien s'est suicidé ce mois-ci.

"Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive". Convoquée lundi pour un entretien en vue d'une sanction disciplinaire, Btissame Bouchaara a été "mise à pied à titre conservatoire dans l'attente de la terminaison de la procédure de licenciement pour faute grave", indique un courrier de sa direction, dont l'AFP a eu copie. Cette éducatrice spécialisée, par ailleurs déléguée du personnel, travaille depuis 16 ans pour La Sauvegarde de la Marne, une association financée par le Conseil départemental et dont l'une des missions est l'accueil des mineurs isolés étrangers.

"Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive, je ne comprends pas pourquoi, au lieu de se remettre en cause, on veut me faire taire", a réagi Btissame Bouchaara. Une cinquantaine de personnes se sont rassemblées pour la soutenir, lundi, devant le siège de l'association, selon la préfecture.

"Aucune prise en charge psychologique". Le 11 janvier, elle avait participé aux côtés de 200 personnes à une marche en mémoire de Denko Sissoko, un jeune Malien qui s'était tué cinq jours plus tôt en sautant par la fenêtre de sa chambre, l'une des 73 réservées aux mineurs dans le foyer. Le parquet de Châlons-en-Champagne avait conclu à un suicide.

L'éducatrice s'était exprimée dans les médiaux locaux et avait alerté le Défenseur des droits pour dénoncer des conditions d'accueil insuffisantes selon elle: "aucune prise en charge de la souffrance psychologique des mineurs" suite au drame et, plus globalement, un manque de personnel au quotidien. "Le conseil départemental n'a pas supporté des critiques qui pourtant sont fondées", a-t-elle estimé. De son côté le conseil départemental n'a pas souhaité s'exprimer, laissant à l'association la responsabilité de sa décision.

Des "déclarations irraisonnables et fallacieuses". Dans un courrier distribué le 17 janvier au personnel et que l'AFP a pu consulter, la direction avait réprouvé "des attaques infamantes et répétées" de la part de "certains des siens". "Ces déclarations irraisonnables et fallacieuses portent atteinte à la légitimité et à la crédibilité de toutes nos activités", avait-elle ajouté, demandant "réparation du préjudice". La direction de l'association n'a pu être jointe lundi. Btissame Bouchaara saura "sous dix jours" si sa mise à pied sera suivie d'un licenciement.