Politique
L'Asie du Nord-Est dans la presse

Iran, mer de Chine : Pékin réagit à la diplomatie de Trump

Le président chinois Xi Jinping lors d'une réunion avec des décideurs économiques durant la Conférence de l'Apec à Lima, le 20 novembre 2016. (Crédits : AFP PHOTO / Brendan Smialowski)
Le président chinois Xi Jinping lors d'une réunion avec des décideurs économiques durant la Conférence de l'Apec à Lima, le 20 novembre 2016. (Crédits : AFP PHOTO / Brendan Smialowski)
Double démonstration de force et de colère. D’un côté, pour décourager Trump et Tillerson de « bloquer » son accès à la mer de Chine du Sud, Pékin fait naviguer trois navires gardes-côtes près des îles Senkaku/Diaoyu, que le Japon administre. De l’autre, le gouvernement chinois proteste contre les nouvelles sanctions imposées par les Américain à l’Iran. Les choses sérieuses commencent.
Montrer les muscles et donner de la voix. Pékin ne va pas attendre que ça se passe après deux semaines de présidence Trump. Ce lundi 6 février, le Japon a indiqué la présence de trois navires gardes-côtes chinois dans ses eaux territoriales, autour des très disputées îles Senkaku/Diaoyu, rapporte le Straits Times. Cette incursion a eu lieu deux jours après la visite du secrétaire américain à la Défense James Mattis à Tokyo. Ce dernier s’était voulu rassurant avec l’allié nippon, et surtout très clair : les îles dépendent de l’alliance militaire entre les États-Unis et le Japon. Et d’enfoncer le clou : le gouvernement Pékin « a déchiqueté la confiance » des pays de la région avec la fortification militaire des îles qu’il contrôle. Réponse le même jour des Chinois via le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Lu Kang : « Washington devrait cesser de faire de mauvaises remarques, d’exacerber le problème et de provoquer de l’instabilité » en mer de Chine du Sud.

Pékin ne s’arrête pas là : d’après le South China Morning Post, un missile balistique chinois capable de menacer les bases américaines et japonaises en Asie a fait de nouveau apparition lors des derniers exercices de la Rocket Force. Présenté pour la première fois en 2015, le missile DF-16 aurait une portée de 1000 km, capable donc d’atteindre Okinawa, où se trouve une grande partie des bases militaires américaines au Japon, ainsi que Taïwan et les Philippines.

Dans une tribune, le quotidien hongkongais accuse le président américain. Si Mattis a tenu des propos apaisants, Trump et son secrétaire d’État Rex Tillerson ont menacé de « bloquer » l’accès de la Chine aux îles qu’elle occupe en mer de Chine du Sud. Sous-entendu : par la force si nécessaire. Trump semble « déconnecté » de la réalité dans la région, déplore le journal : la Maison Blanche est prête à « mépriser de vieilles alliances », sous-pesant leurs contributions à l’aune des bénéfices que Washington peut en tirer. Cependant, les nations de l’Asie du Sud-Est qui revendiquent des îles en mer de Chine méridionale préfèrent la diplomatie. Aucune ne cherche une démonstration de force des États-Unis, ni ne réclament leur intervention, avertit le South China Morning Post. Il est donc difficile de dire au bénéfice de qui Washington constituerait un « blocus de grande ampleur » contre la Chine.

Les Philippines sont l’exemple le plus spectaculaire de la diplomatie bilatérale avec la Chine. En novembre dernier, après la visite du président Rodrigo Duterte à Pékin, un retrait des navires chinois a été observé au récif Scarborough. Par ailleurs, au Vietnam, le secrétaire général du Parti communiste Nguyen Phu Trong s’est rendu en Chine le mois dernier pour convenir d’une « meilleure gestion » des différends maritime entre les deux pays.

Cependant, la Chine n’a pas fini de protester contre Washington. Elle n’a guère apprécié Le récent raidissement américain contre l’Iran. « Les sanctions ne contribueront pas à renforcer la confiance entre les différentes parties concernées et ne résoudront pas les problèmes internationaux », a déclaré ce lundi 6 février Lu Kang, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, cité par le South China Morning Post. Ces nouvelles sanctions imposées par Washington à l’Iran pourraient mettre en péril les relations économiques sino-iraniennes, selon Pékin. De fait, elles interdisent l’accès au système financier américain ou les relations avec les entreprises américaines à 25 compagnies et hommes d’affaires. Les firmes étrangères ou les personnes qui font du commerce avec ces derniers risquent eux aussi d’être « blacklistés » par les Américains.

Problème pour Pékin : deux entreprises de Chine et trois personnalités chinoises sont touchées par ces sanctions. « Je ne sais pas ce que mon entreprise a fait qui mènerait à des sanctions américaines, déclare Yue Yaodong, dirigeant de la Cosailing Business Trading de Qingdao dont les comptes bancaires ont été gelés. Je n’ai pas été engagé dans le commerce avec des clients iraniens pendant des années. » L’entreprise de Yue, assure-t-il, n’a fait qu’envoyer des devis à des prospects iraniens il y a trois ans. « Maintenant, Trump a pris ses fonctions, a noté ce dimanche l’agence officielle Chine Nouvelle. L’incertitude dans les relations entre les États-Unis et l’Iran a augmenté, et cela peut devenir une bombe à retardement pour la paix et la stabilité au Moyen-Orient. »

Par Joana Hiu

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