Bien connus pour les dégâts qu’ils occasionnent sur les abeilles, les pollinisateurs sauvages ou encore les organismes aquatiques, les insecticides néonicotinoïdes sont aussi soupçonnés d’effets délétères sur les humains. C’est ce que suggère la première analyse systématique de la littérature scientifique sur le sujet, publiée le 2 février dans la revue Environmental Health Perspectives.
Imidaclopride, thiaméthoxame, thiaclopride, acétamipride… les sept molécules de cette famille connaissent, depuis leur introduction sur le marché, au milieu des années 1990, une croissance fulgurante, représentant aujourd’hui plus de 40 % du marché mondial des insecticides agricoles. Pourtant, notent Melissa Perry (George Washington University, Etats-Unis) et ses coauteurs, « on en sait jusqu’à présent peu sur les effets de l’exposition humaine » à ces produits.
Mais « peu », ce n’est pas rien du tout. Après avoir épluché l’ensemble des études disponibles, les chercheurs en ont identifié huit donnant des éléments de réponse. Dont quatre offrent des indices sur les effets d’une exposition chronique à ces substances. Elles rapportent « des associations avec des conséquences développementales ou neurologiques défavorables » : augmentation du risque d’autisme, de troubles de la mémoire et de tremblements, d’une malformation congénitale du cœur (dite « tétralogie de Fallot »), ainsi que d’une autre anomalie congénitale grave, l’anencéphalie (absence partielle ou totale de cerveau et de crâne à la naissance).
Des effets neurologiques, ou sur le développement du cerveau, ne seraient pas si étonnants. D’une part, les « néonics » ont précisément été conçus pour interagir avec certains récepteurs cérébraux que les insectes ont en commun avec les mammifères. D’autre part, dit-on à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), « deux de ces substances, l’acétamipride et l’imidaclopride, ont déjà vu leurs niveaux d’exposition acceptables être abaissés, à la suite de travaux de 2012 montrant leurs effets sur le développement du cerveau ». L’étude en question portait sur des neurones de rat.
Plante insecticide
En ce qui concerne les humains – dans les conditions d’exposition réelle de la population générale, mais surtout des travailleurs agricoles et des jardiniers –, Melissa Perry et ses coauteurs insistent sur le caractère seulement indicatif de ces suspicions. Les études auscultées sont en effet « limitées en nombre » et présentent des limites méthodologiques, notamment en raison de la petite taille des échantillons de population étudiés. « Notre message principal consiste à attirer l’attention sur le manque de connaissances scientifiques sur l’exposition humaine aux néonics, dit Mme Perry. Leur utilisation est si généralisée que la recherche doit s’organiser rapidement pour savoir dans quelle mesure les hommes sont exposés, et avec quels effets sanitaires potentiels. »
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