Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Etienne Balibar : « L’universel ne rassemble pas, il divise »

Pour l’intellectuel postmarxiste Etienne Balibar, l’universalisme, qu’il soit religieux ou politique, contient une violence intrinsèque.

Propos recueillis par 

Publié le 09 février 2017 à 15h29, modifié le 09 février 2017 à 15h44

Temps de Lecture 11 min.

Article réservé aux abonnés

Le philosophe Etienne Balibar.

Philosophe de renommée internationale, Etienne Balibar est l’un des rares intellectuels français dont les textes sont traduits et discutés aux Etats-Unis. Il s’interroge ici sur les contradictions qui minent de l’intérieur tout discours à prétention universaliste.

Vous avez récemment publié un livre sur la question de l’universel (« Des Universels », Galilée, 2016). Or cette notion qui semble si familière demeure souvent obscure. ­Si vous deviez en donner une définition devant des élèves de terminale, vous diriez quoi ?

Je dirais que c’est une valeur qui désigne la possibilité d’être égaux sans être forcément les mêmes, donc d’être citoyens sans devoir être culturellement identiques.

Justement, à notre époque, l’universalisme est parfois associé au consensus, et d’abord ­à une gauche « bien-pensante », présumée molle et naïve… Or, chez vous, l’universalisme est tout autre chose qu’un idéalisme. A vous lire, tout universalisme est porteur de tension, voire de violence.

D’abord, mon objectif n’est pas de défendre une « position de gauche », mais de débattre de l’universalisme comme d’une question philosophique. Mais, bien sûr, je suis de gauche, or la gauche est traversée par tous les conflits inhérents à la question de l’universel. L’universel ne rassemble pas, il divise. La violence est une possibilité permanente. Mais ce sont les conflits internes que je cherche d’abord à décrire.

Quels sont les principaux ?

Le premier, c’est que l’universalisme s’inscrit toujours dans une civilisation, même s’il cherche des formulations intemporelles. Il a un lieu, des conditions d’existence et une situation d’énonciation. Il hérite de grandes inventions intellectuelles : par exemple, les monothéismes abrahamiques, la notion révolutionnaire des droits de l’homme et du citoyen, qui fonde notre culture démocratique, le multiculturalisme en tant que généralisation d’un certain cosmopolitisme, etc. Je soutiens donc l’idée que les universalismes sont concurrents, de telle sorte que ça n’a pas de sens de parler d’un universalisme absolu.

« Un universalisme qui se constitue n’en remplace jamais complètement un autre, c’est pourquoi les conflits sont susceptibles d’être réactivés »

C’est presque une loi de l’histoire : un universalisme qui se constitue n’en remplace jamais complètement un autre, c’est pourquoi les conflits sont susceptibles d’être réactivés. C’est aussi la raison pour laquelle je trouve Hegel si intéressant, à condition de le lire à rebrousse-poil : il n’a cessé de travailler sur le conflit des universalismes, en particulier le christianisme et les Lumières, en espérant « dépasser » leurs contradictions.

Il vous reste 82.01% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.