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La piscine ou l’épreuve redoutée des « geeks »

L’école 42, qui forme des développeurs informatiques, sélectionne ses élèves selon un processus atypique et éprouvant

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Publié le 12 février 2017 à 16h06, modifié le 12 février 2017 à 16h06

Temps de Lecture 3 min.

L'école 42, qui forme aux métiers du numérique, est située dans le 17e arrondissement de Paris.. Elle s’attache à recruter les étudiants sans condition de diplôme.

« Faut-il être fou pour s’inscrire ? », « On noie tout le monde et on ­regarde ceux qui arrivent à sortir la tête de l’eau »… Entre fantasmes et réalité, le Web abonde de retours d’expériences et de commentaires sur « la piscine », ce terme qui désigne l’atypique processus de sélection de l’école 42 – fondée par Xavier Niel, actionnaire à titre personnel du Monde. Le principe est simple : faire coder les candidats sans interruption pendant un mois.

Popularisée par l’école 42, la piscine existait bien avant. « Nous l’avons inventée à Epita il y a trente ans, rappelle Joël Courtois, le directeur de l’école d’ingénieurs en informatique. Nous l’avons ­ensuite exportée à Epitech, l’école d’informatique et de nouvelles technologies qu’a dirigée Nicolas Sadirac [cofondateur et actuel directeur de l’école 42] »,souligne-t-il, regrettant que le concept ait été ­« dévoyé » : « Pour nous, la piscine est un exercice initiatique en début de cycle ingénieur qui vise à créer des liens forts et de la solidarité », souligne-t-il. Nicolas Sadirac, lui, assume : « A l’origine, la piscine n’est pas un moyen de recrutement. A l’école 42, elle en est devenue un. Et les excellents résultats en termes d’insertion sont surtout liés à ce processus de sélection. »

Quatre semaines de compétition

L’établissement propose une formation de développeur informatique gratuite et ouverte à tous les jeunes de 18 à 30 ans, sans condition de diplôme. Très prisée des entreprises, l’école 42 l’est également des « geeks » de tous bords. « Nous recevons entre 65 000 et 70 000 demandes chaque année, indique Nicolas Sadirac. Vingt mille finissent les tests de logique en ligne qui constituent la première phase de recrutement. Parmi eux, les trois mille meilleurs peuvent participer aux trois sessions de la piscine. » Un tiers intégrera l’école qui revendique la difficulté de cette épreuve, sur le plan physique et mental.

« Le plus difficile, c’est d’être vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec des gens, de ne pas avoir d’intimité ». Sabine Caizergues, promotion 2014 de l’école 42

Pendant quatre semaines, les candidats enchaînent les travaux de programmation informatique. « Chaque matin, on nous distribue une feuille avec une quinzaine d’exercices à rendre deux jours plus tard », raconte Léo Lellouche, admis en juillet 2015. Attiré par l’informatique, le jeune homme aimait « bidouiller les ­ordinateurs » mais n’avait pas écrit la moindre ligne de code. « Parfois, j’avais l’impression que je n’y arriverais jamais… C’est tellement dur qu’on est obligé de s’entraider », racontel’étudiant de 20 ans, qui a appris plus tard que « l’école fait exprès de nous donner plus d’exercices que ce que l’on peut réussir à faire ». S’appuyer sur les autres permet à la fois de mieux comprendre et de garder confiance.

Physiquement, les quatre semaines sont éprouvantes. « J’ai codé quinze heures par jour, témoigne Sabine Caizergues, une recrue de la promotion 2014. Sans cela, je ne sais pas si j’aurais été prise. » ­Venue de Montpellier, la jeune femme dormait à l’école. « Le plus difficile, c’est d’être vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec des gens, de ne pas avoir d’intimité. Et pourtant, je suis plutôt sociable ! », confie celle qui dit avoir « complètement craqué à la fin de la première semaine ».

Aptitute à travailler en équipe

Si elle a finalement tenu bon, « 10 % à 15 % des candidats abandonnent », constate Nicolas Sadirac. L’endurance fait partie des qualités requises : « Nous cherchons des gens qui prennent du plaisir et qui n’ont pas peur d’échouer et de recommencer, détaille le directeur de l’école. Car en tant que développeurs, ils devront évoluer dans un environnement incertain. »

La motivation fait partie des éléments-clés, comme l’aptitude à travailler en équipe ou encore l’agilité : « Nous préférons un candidat qui ne sait rien et évolue à celui qui a un bon niveau mais fait les mêmes erreurs pendant un mois. Ce qui compte, c’est la capacité à apprendre et à se remettre en question », insiste-t-il.

Cependant, au-delà de ces grandes ­lignes, les critères de sélection restent volontairement flous et changent : « Nous voulons mesurer ce que les personnes sont vraiment, pas ce qu’elles veulent nous montrer », justifie Nicolas Sadirac. « C’est frustrant de ne pas savoir sur quoi on est sélectionné », réagit Allan Jandally, recalé en juillet 2016. Pour autant, le jeune homme ne regrette pas l’expérience. « Fier d’être resté jusqu’à la fin », il estime en outre avoir « appris beaucoup de choses en C, le langage informatique utilisé lors de la piscine ». « Ça valait vraiment le coup », confirme Léo Lellouche qui suit en parallèle de l’école 42 un cursus d’ingénieur : « En première année à l’Efrei, le module de programmation ­représente un quart des cours. J’avais tout appris en un mois à la piscine. Sans compter la rigueur et la capacité à aller chercher des informations un peu partout. »

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