Alors que le président américain, Donald Trump, recevait, lundi 13 février à Washington, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, le Canada fait face à un afflux sans précédent d’immigrants clandestins. Durant le week-end, une soixantaine d’entre eux ont encore franchi la frontière américaine, à pied, hors des postes douaniers de deux provinces – le Manitoba, dans l’ouest du pays, et le Québec dans l’est – craignant d’être renvoyés dans leur pays d’origine s’ils restaient aux Etats-Unis. Ils ont aussitôt revendiqué le statut de réfugié.
L’Agence des services frontaliers du Canada a relevé 42 cas au Québec et 21 au Manitoba samedi et dimanche. Sans être nouvelle, cette vague migratoire prend de l’ampleur depuis un an et s’accélère depuis l’annonce, fin janvier, du décret américain interdisant temporairement l’entrée aux Etats-Unis des ressortissants de sept pays à majorité musulmane et des réfugiés. Même si son application est suspendue, des migrants en situation irrégulière continuent d’affluer au Canada, empruntant des chemins ou traversant des champs enneigés.
« Migration bien organisée »
Le sujet n’a pas été évoqué publiquement lundi par Donald Trump et Justin Trudeau, mais le président américain a tout de même insisté, en conférence de presse, sur la nécessité pour les deux pays d’avoir « une frontière sécuritaire et une migration bien organisée ». Interrogé sur le degré de sécurité de la « frontière du nord » des Etats-Unis, M. Trump n’a pas semblé y voir de problèmes majeurs, tandis que le premier ministre canadien insistait sur l’importance de lier sécurité et immigration. Il est possible, a-t-il dit, de mener une politique d’ouverture en matière d’immigration et d’accueil de réfugiés « sans compromettre la sécurité ».
A l’annonce du décret du président américain, M. Trudeau insistait déjà sur le fait que le Canada resterait ouvert « à ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre ». Le 8 février, il avait temporisé, se disant « très préoccupé » par cette vague d’entrées illégales. Le Canada, ajoutait-il, doit « s’assurer de la protection de l’intégrité de ses frontières et de la solidité de son système d’immigration et d’accueil de réfugiés ».
Les risques de débordement sont réels, alors que de plus en plus de migrants aux Etats-Unis voient le Canada comme une terre promise, n’hésitant pas à braver un froid glacial pour l’atteindre. Le 10 février, cinq personnes, dont un enfant, ont été appréhendées par la police près d’Hemmingford, au Québec, a rapporté le quotidien La Presse. Ils marchaient sur un chemin frontalier avec de grosses valises étiquetées au Qatar. Presque chaque jour, des groupes traversent ainsi la frontière sans se cacher de la police, puis réclament le statut de réfugié. Ils évitent les postes douaniers où ils seraient refoulés, en vertu de l’entente sur les pays tiers sûrs qui lie le Canada aux Etats-Unis et impose aux demandeurs d’asile de le faire dans leur premier pays d’accueil. L’Agence des services frontaliers du Canada a intercepté 823 personnes entrées ainsi au Québec entre le 1er avril et le 30 novembre 2016, un chiffre qui a quadruplé en trois ans.
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