Alain Jakubowicz, président de la Licra réélu pour 3 ans, lors d'une conférence de presse à Lyon, le 13 novembre 2015

Alain Jakubowicz, président de la Licra était l'invité d'Itélé, le 15 février pour parler de l'affaire Théo.

afp.com/ROMAIN LAFABREGUE

"Ce sont des noms pas très français". Cette petite phrase, c'est Alain Jakubowicz, le président de la Licra (ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme) qui l'a prononcée, à deux reprises, mercredi matin sur le plateau d'Itélé.

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Isolée, comme elle l'a été dans une vidéo diffusée notamment par le rappeur Youssoupha et partagée plusieurs milliers de fois sur Twitter, la phrase est dérangeante. Elle a d'ailleurs suscité de nombreux commentaires pour le moins corrosifs sur les réseaux sociaux.

Mais, assure Alain Jakubowicz à L'Express, ce commentaire "ironique" a été "largement sortie de son contexte".

"Qu'est-ce-que c'est un nom français ou pas aujourd'hui?"

L'avocat à la tête de la Licra était invité mercredi dans l'émission A l'heure des pros, tout comme la journaliste et militante antiraciste Rokhaya Diallo ou encore l'éditorialiste du Figaro Ivan Rioufol, pour s'exprimer sur l'affaire Théo, ce jeune homme qui accuse un policier de l'avoir violé avec une matraque et trois autres de l'avoir violenté, lors d'une interpellation à Aulnay-sous-Bois le 2 février.

Juste avant que l'avocat ne tienne les propos à l'origine de la polémique, Pascal Praud a égrené des noms de personnalités signataires de la tribune publiée le jour même dans Libération, "pour Théo" et "pour Adama": "Omar Sy, Eric Cantona, Yannick Noah, Hugues Auffray, Jean Benguigui, Smaïn..."

A deux reprises, Alain Jakubowicz commente, sourire en coin: il s'agit selon lui de "noms pas très français". Face au journaliste qui le rabroue -"qu'est-ce-que c'est un nom français ou pas aujourd'hui?"-, il se justifie: "Il n'y a pas de raison qu'il n'y ait que vous qui ayez le droit de provoquer sur ce plateau", lance le président de la Licra. La séquence vidéo s'arrête là. Mais les propos tenus ensuite par Alain Jakubowicz, sur le plateau d'Itélé ont leur importance.

"Le vrai problème de la liste de ces signataires, c'est ceux qui n'ont pas signé"

A peine cinq minutes plus tard, dans une autre partie de l'émission diffusée sur Twitter par la chaîne, le président de la Licra revient sur la tribune de Libération. "Le vrai problème de la liste de ces signataires, ce n'est pas ceux qui ont signé, c'est ceux qui n'ont pas signé", commente-t-il. Sous entendu: ceux aux "noms français", si l'on se réfère à sa petite phrase polémique. "Est-ce qu'il faut être une personne de couleur et vivre en banlieue pour s'émouvoir de tels faits? C'est le problème central", regrette aussi Alain Jakubowicz.

Auprès de L'Express ce vendredi matin, l'intéressé qui affirme être pris à partie depuis deux jours par "des membres de la fachosphère", regrette que l'on puisse "ne pas comprendre le sens de cette phrase". Il dénonce le fait que ses propos aient été "isolés".

"On m'invite parce que je m'emporte vite"

"Il faut écouter ce qui précède et ce qui suit! Un peu plus loin, je dis mon effroi face au racisme", clame-t-il. Ironie du sort selon lui, ce vendredi, le président de la Licra a publié dans le Huffington Post une tribune intitulée "Le racisme décomplexé est de retour et certains Français n'en ont même plus conscience". "

"J'ai parlé avec Pascal Praud [le présentateur d'iTélé] et il est atterré. Mais je sais que c'est le principe de ces émissions, on m'invite parce que je m'emporte vite", analyse-t-il. "Pourtant, on le voit à l'image que je me marre! Rokhaya Diallo, qui est assise à côté de moi, se marrait aussi. Tout y est, pour montrer que c'est de l'autodérision, ou en tout cas de l'humour, qu'il soit bon ou mauvais", estime également le président de la Licra, mettant en avant "des engagements contre le racisme suivis depuis 40 ans". Ciblé sur les réseaux sociaux depuis mercredi, Alain Jakubowicz dit "attendre que la vague passe" et prendre la polémique avec "un certain détachement".

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