Hélène Sallon et Remy Ourdan

Photos Laurent Van der Stockt pour « Le Monde »

Mètre après mètre, la première division des forces antiterroristes d’Irak reprend la ville de Mossoul à l’organisation Etat islamique. Nos envoyés spéciaux Hélène Sallon et Rémy Ourdan, accompagnés du photographe Laurent Van der Stockt, ont suivi les hommes de la Division d’or, placés en première ligne de la bataille de reconquête.

Une habitante du quartier de Cogjali,

à Mossoul, le 2 novembre 2016.

Des forces spéciales antiterroristes

(ICFT) de la Division d’or, encore sporadiquement pris pour cible par

des snipers, parcourent les rues

et cherchent des membres de l’organisation Etat islamique (EI) maison par maison.

Les forces irakiennes découvrent une partie de l’arsenal militaire abandonné par l’organisation Etat islamique : missiles, roquettes, drones et armes chimiques.

Sous la bâche recouvrant une boîte métallique, entreposée au milieu de bâtisses, sur le site des ruines de Ninive, situé sur la rive gauche du Tigre, dans l’est de Mossoul, un missile de six mètres de long, marqué d’inscriptions en russe, a été abandonné par l’organisation Etat islamique (EI). L’odeur qui se dégage de l’engin prend à la gorge. Le général Haïder Fadhel, des forces antiterroristes irakiennes, intime à ses hommes de ne pas s’éterniser. « Les premiers tests indiquent la présence de gaz moutarde. Des spécialistes français ont pris des échantillons pour les envoyer en France. Ils doivent nous communiquer les résultats définitifs », notamment sur la toxicité de l’agent, explique-t-il.

Le 28 janvier, une trentaine de missiles d'origine russe a été découverte​ sur le site des ruines de Ninive, dans l'est de Mossoul​. Selon les forces spéciales irakiennes​,​ un laboratoire de fabrication de produits chimiques, dont peut-être du gaz moutarde, y​ ​avait été installé par l'EI.

Il fut le premier à entrer dans Mossoul, le fief irakien des djihadistes. Loué des hommes de la Division d’or comme des civils, combattant dans l’âme, Salam Jassem Hussein a tout du héros. Dans un pays déchiré, qui en a terriblement besoin.

Une voiture piégée explose contre le tank qui ouvre la colonne de blindés de la première division des forces antiterroristes irakiennes (ISOF-1). Son Humvee noir positionné entre le cimetière d’Al-Karama et la grande antenne de la radio-télévision Al-Mawsil, le major Salam Jassem Hussein est venu titiller les djihadistes à l’entrée est de Mossoul avant la tombée du jour. Les dégâts sont minimes. Le commandant de bataillon a l’œil qui pétille et, sous sa fine moustache, un petit sourire en coin, mi-espiègle mi-conquérant. Il n’est pas peu fier de l’offensive qu’il vient de boucler, ce 1er novembre 2016, dans le quartier de Gogjali. Il est le premier à avoir mis un pied dans le fief irakien des djihadistes.

Le major Salam Jassem Hussein, chef de la Division d’or, le 6 novembre 2016 : « J’accepte tout ce qui peut préserver la vie de mes soldats et des civils ».

La partie est de Mossoul a été « libérée » par les forces irakiennes trois mois après le début de la vaste offensive pour reprendre la deuxième ville d’Irak à l’organisation Etat islamique.

Depuis l’annonce de la libération, mercredi, de secteurs importants de l’est de Mossoul, des centaines de civils repliés sur les rives du fleuve Tigre pendant la bataille contre l’Etat islamique regagnent leurs quartiers à pied.

 

Cet événement marque une étape importante dans la bataille de Mossoul, lancée le 17 octobre 2016 avec l’objectif de reprendre la dernière grande ville contrôlée par les djihadistes en Irak. Les forces irakiennes préparent maintenant l’offensive sur l’autre rive du Tigre, en particulier sur la vieille ville, où se sont rassemblés les djihadistes au milieu d’une population dense.

Dans le quartier Mohandessine, le 17 janvier. Un habitant embrasse un membre des forces spéciales irakiennes, à l’annonce de la libération de la partie Est de Mossoul.

Les combattants de l’organisation Etat islamique n’opposent plus de résistance à l’armée irakienne depuis plusieurs jours dans la partie orientale de la ville.

Les quinze coupoles et les deux minarets de la grande mosquée se découpent à contre-jour près de la rive est de Mossoul. Un soleil radieux fait remonter les températures hivernales dans la deuxième ville du nord de l’Irak, mardi 17 janvier. Plus que quelques centaines de mètres et le drapeau irakien flottera de nouveau sur l’imposant bâtiment. L’humeur est légère parmi les hommes du lieutenant-colonel Mohannad Jassim, qui conduit le bataillon de tête de la première division des forces antiterroristes irakiennes. Le mitrailleur Qarar gère la playlist de tubes de pop orientale à la gloire de la bataille de Mossoul, depuis son smartphone connecté aux enceintes du véhicule blindé. Moustafa, le chauffeur, joue du frein pour imprimer le rythme saccadé de la mélodie au Humvee, sous les rires de ses camarades.

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Dans le quartier Mohandessine, le 17 janvier. Les forces spéciales irakiennes sécurisent la grande mosquée.

Dans la guerre contre l’organisation Etat islamique, les forces antiterroristes d’Irak sont en première ligne et mènent une lutte acharnée pour reprendre Mossoul. Un combat inégal, leur ennemi n’aspirant qu’à périr en martyr.

La nuit est tombée sur Mossoul. Dans la villa cossue qu’ils ont réquisitionnée dans le quartier El-Zouhour, dans l’est de la métropole du nord de l’Irak, les hommes du deuxième bataillon de la première division des forces antiterroristes (ISOF-1) trompent l’ennui. La journée d’offensive contre les combattants de l’organisation Etat islamique (EI) a été longue et la progression lente sous le crachin hivernal, mais le sommeil ne vient pas. Allongés sur des matelas de mousse et de grosses couvertures à fleurs, les soldats passent en revue les dernières photos et les messages postés sur Facebook.

 

Le sous-officier Raad Ibrahim a le vague à l’âme. Devant la caméra de son smartphone ouverte sur une conversation vidéo, le soldat de 33 ans parle à peine, puis s’allume une cigarette. Fumer lui donne des vertiges depuis qu’il a été blessé à la tête par un engin explosif improvisé à Ramadi, la capitale de la province de l’Anbar, fin 2014, mais l’envie est trop forte.

« Je pense à Haider Fakhri et à Ahmed Bullet », se justifie-t-il, accaparé par le souvenir de ses deux compagnons d’armes, fauchés par des voitures piégées à Mossoul, en novembre 2016. Les pitreries adressées à la caméra par deux autres soldats allongés à ses côtés ont vite raison de son humeur maussade.

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Le major Salam Jassem Hussein, chef de la Division d’or, ordonne le déploiement des troupes pour la prise de Tarbazawah, le 24 octobre 2016.

L’armée irakienne veut achever la reconquête de l’est de la ville.

L’armée irakienne, soutenue par une coalition internationale commandée par les Etats-Unis, a repris le 29 décembre 2016 son offensive contre l’organisation Etat islamique (EI) à Mossoul. L’objectif de cette seconde phase de l’attaque contre la « capitale » de l’EI en Irak est d’achever la conquête des quartiers orientaux de Mossoul et d’arriver jusqu’aux berges du Tigre. L’offensive, lancée le 17 octobre 2016, a connu soixante-cinq jours de rudes combats puis une période d’accalmie de deux semaines décrite par Bagdad comme une « pause opérationnelle ». L’état-major a décidé, face à la résistance déterminée des combattants djihadistes, de revoir ses plans de bataille et d’amener des renforts.

 

Initialement, les peshmergas kurdes ont conquis des villages et campagnes au nord-est de Mossoul. Puis les forces spéciales du Service de contre-terrorisme irakien, connu sous le nom de Golden Division (« Division d’or »), ont rapidement conquis une première moitié de l’est de Mossoul. La pause a ensuite été décrétée pour faire face à un double problème : d’une part, l’armée régulière irakienne, avec sa seizième division au nord et la neuvième au sud, n’est pas parvenue à avancer au même rythme que les forces spéciales et a même connu quelques revers ; d’autre part, les arrières des forces spéciales n’étaient plus couverts, et les militaires ont horreur du vide.

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Le mitrailleur d'un Humvee de la Division d’or dans le quartier de Moharbeen, à Mossoul, le 1er décembre 2016.

Les habitants hésitent entre fuir, au risque de perdre leur maison, ou rester, piégés entre les raids aériens occidentaux, les roquettes djihadistes et les soldats irakiens lancés à l’assaut de la ville.

Confrontés à l’avancée de l’armée irakienne, les habitants de Mossoul hésitent. Fuir vers l’arrière, c’est emprunter le chemin des réfugiés, sous la pluie, dans la boue et vers des campements de fortune, et risquer de perdre sa maison et ses biens. Rester à Mossoul, c’est demeurer plusieurs semaines sur le champ de bataille, entre raids aériens occidentaux, voitures piégées et roquettes djihadistes, et soldats irakiens lancés à l’assaut de la ville.

 

Quelques dizaines de milliers d’habitants se sont déjà réfugiés hors de Mossoul, sur la route du Kurdistan. Certains, sans abris ou blessés dans les raids aériens et les combats, n’ont pas eu le choix. Toutefois, une majorité d’habitants, encore présents après deux ans et demi de domination de l’organisation Etat islamique (EI), prennent le risque de rester dans la zone des combats. Ils tremblent mais ne fuient pas.

 

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Dans le quartier Saddam, le 8 novembre 2016. Des habitants de Mossoul sont déplacés, alors que les quartiers de la ville sont devenus des terrains de lourds affrontements avec l’organisation Etat islamique.

Les djihadistes luttent avec acharnement contre l’avancée des forces d’élite irakiennes dans la « capitale » de l’Etat islamique. La reprise de la ville devrait prendre au moins six à sept mois, selon le commandant des forces antiterroristes.

Après des premières semaines d’enthousiasme guerrier, l’offensive contre l’organisation Etat islamique (EI) à Mossoul est entrée dans cette zone grise où les visages se crispent, les traits se tirent, les paroles se font plus rares. Rue par rue, maison par maison, l’assaillant progresse. En face, les djihadistes résistent avec détermination.

La bataille de Mossoul s’est clairement installée dans la durée. Fini, les communiqués de victoire quotidiens des chefs politiques irakiens et de leurs porte-parole. Même si l’issue de l’affrontement ne fait guère de doute, nul n’ose plus prédire à quelle échéance l’EI sera définitivement vaincu dans la « capitale » de son califat, conquise en juin 2014. Les soldats qui mènent l’assaut, lancé le 17 octobre 2016, savent que la lutte sera longue.

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Dans le quartier Saddam, le 6 novembre 2016. Les populations sont dirigées vers les faubourgs déjà sécurisés, où dans des camps installés à la périphérie de la ville.

Des Irakiens qui ont vécu, depuis juin 2014, sous le règne de l’organisation Etat islamique, décrivent un quotidien fait d’arrestations et d’exécutions arbitraires.

A l’ombre de l’oranger qui habille la palissade de sa coquette villa dans le quartier résidentiel Saddam, dans le nord-est de Mossoul, Maher prend un café turc avec ses deux fils, attablés au milieu de parterres d’œillets d’Inde.

 

Pendant les deux ans et demi de règne de l’organisation Etat islamique (EI), l’univers de ce professeur de biologie à la retraite de l’université de la ville s’est réduit à son jardin, aux toiles qu’il a continué à peindre en secret et à la télévision qu’il a réussi à cacher jusqu’à la reconquête du quartier par les forces antiterroristes irakiennes. L’apparition des soldats d’élite à sa porte, le 9 novembre 2016, a été un soulagement.

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Dans le quartier Saddam, le 10 novembre 2016. Des civils saluent les forces spéciales irakiennes.

Snipers, mortiers et voitures piégées ralentissent fortement l’avancée des forces antiterroristes irakiennes. La présence de civils complique l’appui aérien.

Au bout d’une ruelle étroite bordée de villas, en lisière sud du quartier Saddam, dans le nord-est de Mossoul, lundi 7 novembre 2016, le tank Abrams s’engage seul sur la droite. La colonne de blindés Humvee noirs de la Division d’or se met en stand-by. Une trentaine de mètres en avant, des combattants de l’organisation Etat islamique (EI) se terrent derrière les blocs de béton et les carcasses de camions dont ils ont barré la rue. Armés de mitrailleuses et de lance-grenades RPG 9, ils visent les forces antiterroristes irakiennes.

 

Deux rues plus loin, leurs snipers sont en embuscade. Le char engage les cibles à six reprises, mais le sifflement des balles continue de se faire entendre. Une famille profite d’une rare accalmie pour fuir, avec quelques vêtements entassés à la hâte dans un panier à linge. Un tir de RPG s’écrase sur une maison voisine. Une frappe aérienne est ordonnée à la coalition internationale. Près d’une heure s’est écoulée, le champ est libre.

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Des familles vivant dans le quartier Saddam fuient les combats, le 9 novembre 2016.

Reportage au sein de l’unité d’élite de l’armée irakienne qui a lancé un assaut dans un quartier de l’est de la ville.

Dans la maison investie par le major Salam Hussein Jassem à Gogjali, un quartier de l’est de Mossoul, les mines sont mornes, samedi 5 novembre 2016. Les yeux rouges, quelques hommes de la Division d’or errent dans la maison quasi vide. Certains écoutent des cantiques religieux, d’autres regardent des photos du « martyr ». Le sergent Haider Fakhri est mort la veille dans le quartier Saddam. Fauché, avec quatre autres hommes des forces spéciales irakiennes, par une voiture piégée envoyée par les combattants de l’organisation Etat islamique (EI).

 

Ce grand gaillard de 36 ans au sourire immuable, père de trois enfants, était un pilier de la première division des forces antiterroristes irakiennes : l’homme de sécurité du major Salam, à la tête des opérations, et un grand frère pour tous. Le cœur n’y est pas, mais l’offensive doit se poursuivre. Le quartier Saddam n’est pas encore sécurisé. Le major Salam ne laisse rien paraître de son affliction. Il doit montrer le cap, forcer les hommes à tenir bon. Au petit matin, il part rejoindre ses compagnies restées sur le front. Les civils sont évacués et la progression reprend, maison par maison.

Près de Bartella, en Irak, le 23 octobre 2016. Le major Salam et ses hommes déminent la route qui sera empruntée pour attaquer en direction de Mossoul.

Les forces spéciales irakiennes ont besoin de s’assurer du soutien des habitants des quartiers libérés. Un défi d’autant plus difficile que les djihadistes se fondent dans la population pour contre-attaquer.

Une vingtaine d’hommes de la Division d’or sont partis à pied, mercredi 2 novembre 2016, au petit matin, dans les rues de Gogjali, leurs fusils d’assaut pointés en direction des habitations. Suivies par quatre blindés Humvee noirs, les forces antiterroristes irakiennes ont commencé la sécurisation de ce quartier de l’est de Mossoul, libéré la veille.

 

Des combattants de l’organisation Etat islamique (EI) se terrent encore dans les bâtiments. Toute la nuit, ils ont harcelé les nouveaux maîtres des lieux. Les soldats d’élite doivent vérifier une à une les maisons et leurs habitants. Une opération doublement risquée : pour les hommes et pour les 5 000 civils restés vivre à Gogjali, parmi lesquels se cachent les djihadistes.

Le premier contact entre les civils et les hommes de la Division d’or débute toujours par un face-à-face tendu. Pendant quelques secondes, le temps est comme figé. Chacun se jauge. Des hommes accompagnés d’enfants, ou parfois de femmes, s’avancent, un drapeau blanc brandi ou une main tendue.

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Dans le quartier de Cogjali, à Mossoul, le 2 novembre 2016. Les forces irakiennes, à la recherche des membres de l'organisation Etat islamique, questionnent les habitants.

La Division d’or a pris sans trop de difficultés le quartier de Gogjali. Mais les djihadistes de l’EI se sont repliés vers le centre de la deuxième ville irakienne.

A l’extérieur, les éléments se déchaînent. Un vent de sable ocre balaie Gogjali, le premier quartier à l’entrée est de Mossoul, tout juste libéré des combattants de l’organisation Etat islamique (EI), en milieu d’après-midi, mardi 1er novembre 2016. Il gomme les contours des habitations, déjà écrasées sous une chape de poussière d’un gris laiteux. L’air est saturé de particules. Des pneus finissent de brûler dans les rues. Des champignons de fumée s’élèvent sous les tirs d’artillerie et les frappes de la coalition internationale. La poussière vole au passage des Humvee blindés noirs.

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Dans le quartier de Cogjali, à Mossoul, le 1er novembre 2016. Les forces spéciales sortent d’un tank qui vient d’être touché par l’explosion d’une voiture piégée.

Quelques heures avant leur entrée dans Mossoul, prévue mardi, les forces irakiennes ont libéré les quartiers périphériques de l’EI.

Il a suffi que le mot « véhicule piégé » retentisse dans la radio pour que les hommes de la Division d’or retrouvent une totale concentration. Le chauffeur Ghabbouri a lâché son portable. Le sergent-major Sattar Jaber est sorti de sa somnolence.

Après plusieurs heures de combats intenses dès l’aube, dans les quartiers périphériques de Bazwaya, lundi 31 octobre 2016, au-delà des tranchées et des talus de terre creusés par les combattants de l’organisation Etat islamique (EI) autour de ce village situé à quatre kilomètres de Mossoul, les hommes s’étaient adaptés au rythme de progression de la colonne. Il fallait meubler les longues minutes d’attente après chaque engagement musclé avec les snipers de l’EI, terrés dans des habitations désertées.

 

Au fur et à mesure de l’avancée des forces irakiennes, les avions de la coalition internationale préparent le terrain. Plus de 25 djihadistes sont tués dans des frappes et de l’artillerie lourde leur appartenant est détruite. Les tireurs d’élite sont déployés pour débusquer les snipers de l’EI.

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Dans les faubourgs de Bazwaya, le 31 octobre 2016. Le major Salam Jassem Hussein, à la tête de la colonne des forces spéciales antiterroristes, devant la ville de Bazwaya, encore sous le contrôle de l’EI.

A cinq kilomètres de la « capitale » de l’Etat islamique en Irak, dans les faubourgs de Bazwaya, les forces spéciales irakiennes débusquent les snipers de l’EI avant de reprendre leur avancée.

Il fait nuit noire. Il est à peine 21 heures, jeudi 27 octobre 2016. Les blindés en colonne roulent au ralenti, phares éteints, à la périphérie de Bazwaya, un village aux mains de l’organisation Etat islamique (EI), à cinq kilomètres à l’est de Mossoul. Equipé d’un système de vision nocturne, le tank Abrams ouvre la route. Quelques tirs de mitrailleuses résonnent épisodiquement dans le faubourg où s’est établie, mardi 25 octobre 2016, la Division d’or.

 

Les Humvee rejoignent la ligne de front. A l’horizon, les premières lumières de la « capitale » de l’EI en Irak scintillent. Plus près, une fois l’œil habitué à l’obscurité, on distingue des habitations dans la pénombre, à quelques centaines de mètres. La petite ville de Bazwaya semble endormie.

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Les forces spéciales irakiennes, la nuit, sur la ligne de front devant la ville de Bazwaya, le 31 octobre 2016.

Libérés, les faubourgs de Bazwaya, tout près de Mossoul, avaient été transformés en camp militaire par l’organisation Etat islamique.

A 2 heures du matin, mercredi 26 octobre 2016, l’alerte a été donnée. Des mouvements ont été détectés dans un tunnel mis au jour à Mouaskar Jenine, un faubourg de Bazwaya, à moins de cinq kilomètres à l’est de Mossoul. La veille, deux unités de la Division d’or, emmenées par le major Salam Jassem Hussein, s’étaient déployées dans cette proche banlieue, libérée après quatre heures d’offensive. Des combattants de l’organisation Etat islamique (EI) se cachent peut-être encore dans le vaste réseau de tunnels creusés sur une petite dizaine de kilomètres entre Bartella, quatre kilomètres plus à l’est, et Mossoul. Ces tranchées, recouvertes de tôle et de terre, plongent à certains endroits jusqu’à sept mètres de profondeur, sur trois mètres de largeur.

 

« Les djihadistes utilisaient des petites motos pour transporter les combattants, leurs équipements et leurs armements hors de la vue des avions d’observation », explique le sergent-major Satar Jaber, en charge du renseignement militaire. Avec une vingtaine d’hommes armés, le quinquagénaire est parti sur les lieux en pleine nuit. « Le major Salam nous a ordonné de barrer la sortie du tunnel et de brûler des pneus et de l’essence pour l’enfumer. Mais nous n’avons trouvé personne », raconte-t-il. Rentrés bredouilles deux heures et demie plus tard, les hommes se sont dépêchés de retrouver leurs couches, pour grappiller quelques heures de sommeil.

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Dans les faubourgs de Bazwayah, le 26 octobre 2016. Les hommes de la Division d’or fouillent les bâtiments administratifs et les habitations piégés du faubourg de Bazwayah.

Soutenue par les aviations américaine et australienne, une colonne d’assaut a pénétré dans le village de Tarbazawah.

Les premières maisons du village de Tarbazawah, à dix kilomètres à l’est des faubourgs de Mossoul, apparaissent enfin. Il est 13 heures, lundi 24 octobre 2016. La colonne de soixante blindés Humvee noirs de la Division d’or a mis six heures pour parcourir les dix kilomètres qui la séparent de sa base arrière près de Basakhrah, en coupant à travers champs dans la plaine de Ninive.

 

Le groupe a avancé au rythme des démineurs qui ont ouvert le chemin à pied, exposés à l’ennemi sur leur flanc gauche. A l’entrée de la vaste plaine qui borde Tarbazawah par le nord, un drapeau noir de l’organisation Etat islamique (EI) flotte, seul, au vent. La colonne est à découvert. Les balles des snipers rebondissent sur les blindés. Huit véhicules sont endommagés. Un missile RPG tombe près de l’un des deux chars Abrams. La première journée d’offensive s’annonce fiévreuse.

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Le 24 octobre 2016, les bataillons ISOF- 1 et ISOF-3 partent à l’aube de la base arrière de Basakhrah pour attaquer Tarbazawah, un village occupé par l’EI au nord de Bartella. A l’approche de Bartella, le major Salam ordonne un déploiement de la colonne pour contrer les tirs de snipers et de RPG venant des positions de l’EI.

Les unités de déminage jouent un rôle essentiel dans la guerre contre l’organisation Etat islamique, qui s’est spécialisée dans les pièges mortels. Sans elles, l’assaut ne peut pas commencer.

Quelques kilomètres avant l’entrée de la ville chrétienne de Bartella, à 25 kilomètres à l’est de Mossoul, le convoi de Humvee noirs ornés de drapeaux irakiens de la Division d’or s’arrête sur le bas-côté, dimanche 23 octobre 2016. Le major Salam Jassem Hussein descend du véhicule de tête avec trois démineurs, suivis d’une dizaine d’hommes. Ils envisagent une petite route qui part sur la droite jusqu’au mont Zardik, au nord. D’ici, ils lanceront bientôt l’offensive en direction de Mossoul. Un talus de terre bloque l’entrée de la route, peut-être encore truffée d’engins explosifs improvisés.

 

Vêtus de bas de treillis et de tee-shirts noirs, les démineurs s’avancent seuls à pied sur l’asphalte. Les canons des Humvee se positionnent en direction de l’ouest, vers la vaste plaine où des combattants de l’organisation Etat islamique (EI) sont encore terrés dans des habitations parsemées. Les trois hommes avancent lentement, les yeux rivés au sol et les mains dans le dos, totalement exposés à l’ennemi. Un renfoncement dans la chaussée éveille leurs soupçons. Ils l’appréhendent sous tous les angles, cherchent les indices visibles à l’œil nu. L’un d’eux pose une charge au sol et allume la mèche. L’alerte est donnée : « Bombe ! ». Le cri se diffuse d’un Humvee à l’autre. Les trois démineurs ont entamé un sprint pour venir se terrer avec les soldats derrière les véhicules.

Près de Bartella, en Irak, le 23 octobre 2016. Le major Salam et ses hommes déminent la route qui sera empruntée pour attaquer en direction de Mossoul.

Les hommes de la Division d’or du major Salam seront les principaux artisans de la reconquête de la capitale de l’organisation Etat islamique en Irak.

Avec un air de défi, le premier lieutenant Alaa Hassan Jaber, 26 ans, s’avance vers la tablée de son major, réunie sur la terrasse d’une maison que les forces spéciales irakiennes ont investie dans le village abandonné de Tal Aswad, à la lisière du Kurdistan irakien, et à cinquante kilomètres à l’est de Mossoul.

 

Droit dans ses bottes, le regard perçant et malicieux, il s’impose dans la conversation matinale : « Moi, j’étais de toutes les batailles ! » Le jeune sous-officier vient d’être nommé à la tête d’une compagnie, au sein du régiment du major Salam Jassim Hussein. Et il veut faire impression.

 

La tablée jauge l’impétueux. Le major Salam ordonne qu’on lui donne une chaise. « “Kilomètre cinq”, tu étais positionné où ? », l’interroge-t-il d’un ton autoritaire, mi-sérieux mi-joueur. Les autres se retiennent de rire. Le torse gonflé, le sous-officier fanfaronne. Il y était, comme à trois autres batailles. Mais pas à la suivante. Le premier lieutenant Alaa ne se démonte pas. « D’accord, ça fait quatre sur cinq », concède-t-il, en se mordant la lèvre. Tous rient de bon cœur.

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Dans le village de Tal Aswad, à la lisière du Kurdistan irakien, le 17 octobre 2016. Les bataillons ISOF-1, ISOF-2 et ISOF-3 attendent avant d’engager les combats dans les villages occupés par l’EI, à l’est et au nord-est de Mossoul.

Les soldats de l’organisation Etat islamique ont miné les accès aux faubourgs de leur fief irakien.

Dans le campement militaire de Tal Aswad, un village abandonné en lisière du Kurdistan irakien, l’impatience est palpable. Six jours après leur installation, les 2 000 hommes des forces antiterroristes irakiennes (ICTF) attendent l’ordre de déploiement pour aller déloger l’organisation Etat islamique (EI) de Mossoul, la deuxième ville du nord de l’Irak, contrôlée par les djihadistes depuis juin 2014. L’offensive a été lancée, lundi 17 octobre 2016, par les forces kurdes pour reconquérir une bande de six kilomètres dans la plaine de Ninive. Mais ce sont les ICTF qui iront, seules, porter l’assaut sur la ville, depuis ses quartiers est. Dans l’après-midi, les troupes de la première division, emmenées par le commandant Salam Jassim Hussein, sont mises en alerte. Bulldozers, tanks et Humvee sont envoyés vers la ligne de front, avant d’être rappelés quelques heures plus tard. La progression des peshmergas kurdes sur le front de Bachika est plus lente que prévu. La frustration monte.

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Dans le village de Tal Aswad, à la lisière du Kurdistan irakien, le 14 octobre 2016. Les bataillons ISOF-1, ISOF-2 et ISOF-3 attendent avant d’engager les combats dans les villages de la zone occupée par l’Etat islamique, dont les premières lignes se trouvent à 12 km.

Les forces kurdes ont lancé lundi les opérations de reconquête du fief irakien de l’organisation Etat islamique.

A l’aube, lundi 17 octobre, les colonnes de humvees et de blindés des combattants kurdes irakiens se sont mis en mouvement, pour porter l’offensive contre les combattants de l’organisation Etat islamique (EI) dans la plaine de Ninive, qui s’étend à l’est de Mossoul. Quelques heures plus tôt, le premier ministre irakien, Haider Al-Abadi, avait officiellement lancé l’opération de libération de la grande ville du nord de l’Irak, tombée aux mains de l’EI en juin 2014. A l’approche des trois premiers villages, les combattants peshmergas et les forces spéciales kurdes, en première ligne des combats, ont été accueillis par des tirs de mortier. Des véhicules blindés des forces spéciales américaines étaient présents à leurs côtés. Au petit matin, les avions de la coalition internationale ont entamé leurs frappes contre les positions djihadistes.

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Dans le village de Tal Aswad, à la lisière du Kurdistan irakien, le 13 octobre 2016. Les bataillons ISOF-1, ISOF-2 et ISOF-3 stoppent leur convoi pour décharger les véhicules des camions partis de Bagdad. Une base arrière est établie avant d’engager les combats dans les villages de la zone occupée par l’organisation Etat islamique.