Le délitement, c’est maintenant. L’effondrement, pour bientôt ? Depuis les premières révélations sur les soupçons d’emploi fictif de son épouse, il y a plus de cinq semaines, le doute s’infiltre dans tous les recoins de la maison Fillon. Les fissures apparaissent désormais au grand jour. L’obstination du candidat à se maintenir malgré sa probable future mise en examen et l’accentuation populiste de sa campagne font fuir des pans entiers de la droite. Les partisans de Bruno Le Maire et d’Alain Juppé ont déjà fait leurs cartons au QG de campagne, les sarkozystes cachent de moins en moins leur énervement. La rumeur du remplacement du candidat par le maire de Bordeaux bruisse de nouveau dans les couloirs.
Recroquevillé derrière son carré de fidèles et assis sur sa large victoire à la primaire, François Fillon apparaît de plus en plus isolé. Comme un reclus au sein de sa propre campagne. Jusqu’à quand ? Impossible de le savoir mais la droite républicaine se retrouve face à deux scénarios sombres : le maintien d’un candidat fragilisé auquel plus grand monde ne croit ou son remplacement malgré lui. Avec le risque d’une issue mortifère qui aboutirait à une division durable de cette famille politique, voire à son explosion.
Jeudi 2 mars, au lendemain de la déclaration de M. Fillon sur le maintien de sa candidature, l’hémorragie des soutiens s’est en effet accélérée. Le rassemblement patiemment construit après la primaire se fracasse heure après heure sur la peur de la défaite. Avec l’accord du maire de Bordeaux, trois élus juppéistes de premier plan, les députés de la Marne, Benoist Apparu, et de la Seine-Maritime, Edouard Philippe, ainsi que le sénateur de Maine-et-Loire, Christophe Béchu, ont annoncé leur retrait. « La tournure que prend aujourd’hui la campagne nous paraît incompatible avec notre façon d’envisager l’engagement politique », écrivent, dans un communiqué, ces piliers de la garde rapprochée de M. Juppé.
Le directeur de la campagne de ce dernier à la primaire, Gilles Boyer, trésorier de la campagne présidentielle, a, lui aussi, annoncé sa démission sur Twitter en fin de journée. Tôt le matin, Vincent Le Roux, fidèle d’entre les fidèles du maire de Bordeaux depuis plus de vingt ans et conseiller de M. Fillon pour l’élection, avait le premier jeté l’éponge, comme pour donner le signal de la retraite. Les juppéistes ont ainsi amplifié le mouvement enclenché par Bruno Le Maire et ses soutiens.
Cascade de départs
Jeudi matin, Sébastien Lecornu, un des proches du député de l’Eure, qui était devenu directeur général adjoint de la campagne de François Fillon, a lui aussi fait ses valises. Dans son sillage, une quinzaine de permanents du QG du député de Paris ont quitté leur fonction. Des hommes et de femmes de l’ombre, inconnus du grand public, mais des chevilles ouvrières indispensables à l’organisation quotidienne. Parmi eux figurent David Teillet – il faisait office de chef de cabinet de M. Juppé pendant la primaire et s’occupait depuis des déplacements de M. Fillon – ou encore Marie Guévenoux, juppéiste chargée des levées de fonds. Le porte-parole du candidat, Thierry Solère, grand organisateur de la primaire et proche de Bruno Le Maire, lui a emboîté le pas vendredi matin.
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