TRANSPORTSScandales à répétition: L'entreprise Uber court-elle à sa perte?

Scandales à répétition: L'entreprise Uber court-elle à sa perte?

TRANSPORTSDernière affaire en date: l’entreprise a reconnu avoir utilisé un service pour tromper les autorités…
L'application Uber est la cible de nombreuses polémiques.
L'application Uber est la cible de nombreuses polémiques. - Andrew Caballero-Reynolds / AFP
Lucie Bras

Lucie Bras

Un programme secret chargé de rendre les chauffeurs Uber invisibles pour la police… C’est la dernière affaire en date qui embarrasse l’entreprise. Greyball est un service qui permet à l’entreprise de passer entre les gouttes de la régulation là où son service de taxis à moindre coût est interdit ou contrôlé.

Avec 69 milliards d’euros de valeur boursière, Uber est un poids lourd de l’économie mondiale. Dans 80 pays, un million de chauffeurs vous conduisent chez vous à un prix inférieur à la course d’un taxi. Mais si l’entreprise a une santé de fer en bourse, sa réputation est sérieusement entachée par des scandales à répétition.

Des voitures fantômes

Ce sont d’anciens employés Uber qui ont vendu la mèche. Ils ont expliqué auNew York Times son fonctionnement. Dans les villes où le service est contrôlé, les représentants des forces de l’ordre n’ont pas accès la véritable application mais à une « fausse » application, identique en tous points.

Une différence de taille : les voitures montrées sur l’application n’existaient pas, et les rares courses que les policiers étaient capables de commander étaient annulées illico.

La raison est simple, Uber a repéré les forces de l’ordre via leur carte de crédit ou géolocalisation. Pour éviter les arrestations de ses chauffeurs, l’entreprise a érigé des barrières numériques entre les autorités et le service.

L’entreprise a réagi à la polémique Greyball dans un communiqué laconique : « Ce programme refuse les demandes des utilisateurs qui violent nos conditions de service — qu’il s’agisse de gens qui veulent nuire physiquement aux conducteurs, de concurrents qui cherchent à perturber nos opérations ou d’adversaires qui s’entendent avec des officiels pour piéger des conducteurs. »

Avec cette affaire, Uber joue un peu plus avec les contours de la loi, comme elle le fait depuis son arrivée sur le marché des taxis. « C’est très borderline. Uber s’affranchit de tous les codes, depuis le début », explique Grégoire Leclercq, cofondateur de l’Observatoire de l’uberisation. « Ça finit par décevoir le consommateur. Rien que dans le nom, l’uberisation ça signifie « précarisation », le retour d’un travail dont on ne veut plus. »

Harcèlement sexuel

Depuis quelques mois, la réputation de l’entreprise en a pris pour son grade. Cette semaine, le patron-fondateur de Uber, Travis Kalanick a été enregistré dans une vidéo où il crie sur un chauffeur Uber. Depuis, il s’est excusé en avouant qu’il devait « changer fondamentalement en tant que dirigeant et devenir adulte » dans un message aux employés de Uber envoyé mardi soir.

La start-up a aussi été pointée du doigt il y a quelques jours après des accusations d’une ancienne salariée disant avoir été victime de harcèlement sexuel et dénonçant le sexisme au sein de l’entreprise. Le PDG avait annoncé l’ouverture d’une « enquête urgente » à ce sujet.

Autre erreur de com' récente pour le patron de Uber : rejoindre le conseil de Donald Trump. « A la suite de ça, plusieurs centaines de milliers d’utilisateurs ont désinstallé l’application aux Etats-Unis », rappelle Grégoire Leclercq. Depuis, Travis Kalanick a renoncé à ses fonctions politiques. Mais il relativise : « Cela se passe aux Etats-Unis, mais il faut rappeler l’énorme influence de Uber partout dans le monde. »

« Uber a déjà gagné une partie de son pari. Elle est très, très loin devant tout le monde. C’est un peu le too big to fail », confirme Denis Jacquet, entrepreneur et auteur du livre Uberisation : Un ennemi qui vous veut du bien ?. En français, « trop gros pour échouer ». L’entreprise n’est toujours pas rentable mais a atteint une masse critique d’utilisateurs qui l’empêche de couler.

Aux Etats-Unis pourtant, c’est son concurrent Lyft qui profite de ce désamour. Pour l’instant Petit Poucet face à l’ogre Uber, l’entreprise cultive sa bonne conduite et espère attirer ainsi les déçus de Uber.

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