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Récit

Xi Jinping imagine une «Grande Muraille de fer» dans le Xinjiang

Le président chinois a affiché sa fermeté vendredi contre la province frappée par des violences interethniques et la montée du terrorisme islamique.
par Stéphanie Gérard
publié le 10 mars 2017 à 18h18

Précision : une erreur nous a fait penser que le président Xi Jinping s'était rendu dans le Xinjiang, alors qu'il a en fait fait ce discours depuis Pékin. Toutes nos excuses à nos lecteurs

Alors que se tient la session annuelle de l'Assemblée nationale populaire à Pékin, Xi Jinping en a profité pour recevoir une délégation de parlementaires venus du Xinjiang. C'est la première fois qu'il réalise un tel geste depuis son accession au pouvoir en 2013. La province, peuplée par 20 millions d'Ouïghours turcophones et musulmans, est frappée par des tensions avec la majorité ethnique Han et les attaques meurtrières qui se sont multipliées ces dernières années. Des attaques constamment attribuées par Pékin à l'islamisme ouïghour, menace qu'elle brandit pour justifier chaque trouble dans la région. Le président chinois a fait part de son inquiétude et a préconisé, en métaphore, la construction d'une «Grande Muraille de fer» pour protéger le Xinjiang. Comme pour réaffirmer l'autorité de Pékin dans la province qui bénéficie pourtant du statut de «région autonome» et intensifier sa répression sur la minorité ouïghoure.

Toujours à l'occasion de cette visite dans le Xinjiang, Cheng Guoping, commissaire d'Etat au contre-terrorisme et la sécurité du Parti communiste chinois, a affirmé que le séparatisme islamiste représentait le défi le «plus important» pour la stabilité du pays, incriminant directement le Parti islamique du Turkestan (PIT). Proche d'Al Qaeda, le PIT est un mouvement ouïghour radicalisé installé au Pakistan, pays frontalier du Xinjiang, et responsable de plusieurs attaques dans la province avant de s'étendre sur et en dehors du territoire chinois. La semaine dernière, Pékin était pour la première fois directement visée par des jihadistes de l'Etat islamique. Dans une vidéo d'une trentaine de minutes, un court passage est destiné à la Chine, dans lequel des combattants ouïghours promettent de «verser des rivières de sang» sur le territoire chinois. D'après les autorités chinoises, plusieurs centaines de ressortissants ouïghours auraient rejoint les rangs d'organisation islamique. Pourtant dans cette même vidéo, l'EI désavoue officiellement le PIT, accusé de s'être allié à des «apostats».

À lire aussi :Entre répression et jihad, les Ouïghours pris au piège

Depuis plusieurs décennies, Pékin mène dans le Xinjiang une politique de colonisation par les Hans, l'ethnie majoritaire en Chine, que dénoncent les Ouïghours. Parallèlement, la Chine procède à des discriminations envers la minorité turcophone et restreint de plus en plus la pratique de l'islam, attisant les conflits interethniques qui ont fait plus d'une centaine de morts ces derniers temps. En réaction à ces agitations, le Parti communiste n'hésite pas à renforcer sa répression et à déployer ses troupes dans la province autonome. Fin février, quelques jours après la mort de cinq civils dans une attaque attribuée à des Ouighours par Pékin, plus de 10 000 militaires ont été envoyés parader dans les rues d'Urumqi, la capitale du Xinjiang. Le mois dernier, les autorités ont adopté de nouvelles mesures, incitant la population à dénoncer toute personne arborant une barbe ou portant le voile. D'après le Global Times, un média d'Etat, Pékin s'apprêterait à promulguer une nouvelle loi antiterroriste, probablement durant le mois de mars. Une loi qui devrait, encore une fois, provoquer la colère de la communauté ouïghoure.

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