Paris : le Samu social s’alarme d’une fermeture en série de centres pour sans-abri

Selon l’organisme qui gère le 115 parisien (environ 1 500 appels par jour), quelque mille places d’hébergement vont fermer d’ici à la fin de l’année. 

 180, rue Pelleport (XXe). Emménagé dans une ex-maison de retraite de la Ville de Paris en attente de réhabilitation et géré par l’Armée du Salut, le centre d’hébergement pour femmes Pelleport va fermer ses portes au 31 mars. Son directeur Emmanuel Ollivier s’inquiète pour le devenir des 86 résidentes.
180, rue Pelleport (XXe). Emménagé dans une ex-maison de retraite de la Ville de Paris en attente de réhabilitation et géré par l’Armée du Salut, le centre d’hébergement pour femmes Pelleport va fermer ses portes au 31 mars. Son directeur Emmanuel Ollivier s’inquiète pour le devenir des 86 résidentes. LP/J.D.

    « C'est très angoissant de ne pas savoir où l'on habitera à la fin du mois, c'est très difficile à vivre ». A l'image de Perle, 67 ans, qui s'est retrouvée là en janvier après un an à dormir dans les bus, les 86 occupants du centre d'hébergement d'urgence (CHU) du 180, rue Pelleport (XXe) ne savent pas où ils séjourneront après le 31 mars. A cette date, leur centre, aménagé depuis fin 2015 dans une ex-maison de retraite de la Ville de Paris en attente de réhabilitation, fermera ses portes pour travaux. Une situation loin d'être isolée, assure le Samu social de Paris qui s'alarme de la sortie de l'hiver pour les nombreux sans-abri parisiens.

    Eric Pliez, président du Samu social

    LP/Eric Le Mitouard.

    Selon l'organisme qui gère le 115 parisien (environ 1 500 appels par jour), quelque mille places d'hébergement vont fermer d'ici à la fin de l'année. « C'est très inquiétant de démarrer le printemps avec d'aussi mauvaises perspectives » confie son président Eric Pliez, qui enverra ce lundi un courrier d'interpellation au préfet de région Michel Delpuech, à Anne Hidalgo (PS) et à Valérie Pécresse (LR). Deux facteurs se cumulent. D'abord la fin du plan hivernal qui a vu cette année un déploiement sans précédent de 1 400 lits dans la capitale. Mais surtout la fermeture avant fin 2017 de 950 places en centres d'hébergement d'urgence (CHU) ouverts à l'année. Des structures aménagées de façon temporaire dans des bâtiments mis à disposition la Ville, de l'Etat ou des entreprises, avant démolition ou travaux.

    « L'Etat a fait beaucoup ces derniers temps, reconnaît Eric Pliez. Ce que je déplore c'est le manque d'anticipation de ces fermetures. » Une mise en cause qui fait réagir à la préfecture de région. Sur les 1 400 lits « saisonniers » déployés dans le cadre du plan hiver, 600 seront pérennisés au-delà du 1er avril, annonce-t-elle. « Quant aux 950 places en centres d'hébergement, nous avons déjà retrouvé 464 places en substitution et on cherche les autres : on est dans une gymnastique permanente », assure-t-on au cabinet de Michel Delpuech. Le préfet est formel : « l'Etat mettra tout en œuvre pour qu'aucune place ne ferme ».

    Reste que selon le président du Samu social, « on sait pertinemment que ces futures ouvertures ne suffiront pas ». « Ce qui est scandaleux, c'est qu'on va remettre à la rue des personnes qu'on a accompagnées pendant des mois », déplore-t-il. Au centre Pelleport géré par l'Armée du Salut, son directeur Emmanuel Ollivier, explique avoir alerté les autorités depuis janvier pour anticiper. En vain. « Tous les jours, les femmes viennent me voir une à une : tout le monde angoisse, raconte-t-il. Ici, on accueille des personnes malades ou en souffrance psychique, des personnes âgées, des lycéennes, des jeunes majeures… Des gens avec qui on a beaucoup travaillé et dont l'accompagnement risque de se casser la figure si elles sont justes mises à l'abri, sans hébergement adapté ».

    Le centre Pelleport (XXe)

    LP/J.D.

    Pour le président du Samu social, il devient urgent de réformer un système à bout de souffle. « Il faut sortir de la gestion départementalisée de l'hébergement d'urgence et agir à l'échelle métropolitaine, exhorte Eric Pliez. Mais pour cela, il faut un volontarisme sans faille de l'Etat pour tenir bon face aux égoïsmes des élus locaux qui n'ouvrent pas facilement leurs portes. Quand le préfet de région agit de manière très déterminée, ça marche : on l'a vu avec l'opération exemplaire du centre pour migrants de la Chapelle (XVIIIe) ».