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    Samuel Lafont, catho tradi obsédé par les «racailles» et les homos, rejoint le pôle «Société civile» de l'équipe Fillon

    Connu pour ses tweets homophobes et pour les fausses informations qu'il relaie volontiers, ce catho tradi vient de faire son apparition dans l'organigramme du pôle «Société civile» de l'équipe de François Fillon.

    L'organigramme du Conseil national de la société civile (CNSC), soutien de François Fillon à la présidentielle, a été dévoilé par France 5. C'est le candidat lui-même qui a décidé d'associer la société civile à sa campagne, comme l'expliquait à La Croix son ancien porte-parole Thierry Solère: «Le rôle de ces personnes issues de la société civile sera aussi de prendre la parole, durant la campagne présidentielle, dans les meetings mais également dans les médias lorsqu’il faut éclaircir un point.»

    Dans cet organigramme de ce que L'Express baptise «l'équipe bis» de François Fillon, on découvre que Samuel Lafont est nommé au «Pôle Support» pour les réseaux sociaux. Inconnu du grand public, Lafont est une personnalité bien connue des réseaux sociaux, sur Twitter notamment, où il commente régulièrement la vie politique française.


    À 29 ans, ce militant de droite passé par le syndicat universitaire UNI, ancien membre du conseil national de l'UMP et tête de liste aux européennes pour Christine Boutin en 2014, s'est fait connaître en 2012 avec la Manif pour tous. Viscéralement opposé au «mariage pour tous», il est devenu l'un des porte-voix du mouvement sur Twitter, un troll très souvent en roue libre et aux propos volontairement provocateurs, voire homophobes. En juillet 2012, alors que le Premier ministre de l'époque, Jean-Marc Ayrault, confirmait le projet de loi sur le «mariage pour tous» lors de son discours de politique générale, Samuel Lafont a tweeté: «Est-ce que je peux me marier avec mon chien alors?»

    Un exemple parmi d'autres tweets encore visibles aujourd'hui et qui montrent une certaine obsession.

    Durant cette époque, on l'a vu défendre ses idées et interagir avec d'autres twittos de la «droite dure», des militants qui gravitent dans la sphère catho traditionaliste. C'est le cas de Vivien Hoch, militant catholique actif dans les milieux radicaux opposés au «mariage pour tous» proche du «Printemps français». D'ailleurs, Samuel Lafont connaît bien Béatrice Bourges, la porte-parole du mouvement. Aujourd'hui, Vivien Hoch est cofondateur du comité Trump France. Autre membre de son entourage numérique: Stéphane Journot, ancien militant de l'UMP connu pour avoir fait l'apologie de la déportation des homosexuels:

    Il a par la suite figuré en tête de liste à Paris pour Charles Beigbeder en 2014, ex-secrétaire national de l'UMP, soutient actuel de François Fillon et qui a flirté avec le Front national dans le passé.

    Une agression instrumentalisée par Boutin

    Dans l'esprit de beaucoup, Samuel Lafont reste l'homme dont l'agression a été récupérée par La Manif pour tous et Christine Boutin. L'histoire remonte au 13 avril 2013. Ce jour-là, Samuel Lafont tweete qu'il a été poignardé. Quelques minutes plus tard, Christine Boutin et La Manif pour tous réagissent en faisant le lien entre cette agression et son activisme.

    Dans un communiqué aujourd'hui supprimé, La Manif pour tous disait: «La Manif pour tous souligne à nouveau que le projet de loi “mariage pour tous”, et le déni de démocratie dont sont victimes les opposants à ce projet, créent un climat social de plus en plus délétère.»

    Mais la réalité était tout autre. Selon une source policière interrogée par l'AFP, cette agression n'avait aucun lien avec l'activité militante de Samuel Lafont. La police expliquait qu'un «échange de mauvais regards» avait provoqué cette agression «purement crapuleuse». La police indiquait aussi que le jeune homme, ainsi que ses deux accompagnants, ne portaient aucun signe distinctif pouvant laisser apparaître leur engagement militant. Une dépêche que Samuel Lafont avait qualifiée de «mensongère».

    Samuel Lafont est aussi connu pour relayer de fausses informations. En février 2013, il a par exemple publié sur Twitter une photo truquée d'un panneau tenu par une manifestante pro «mariage pour tous». Le site Débunkers de Hoax, connu pour débusquer les intox présentes dans la fachosphère, a prouvé le trucage. Sur le panneau tweeté par Lafont :«Mes deux papas me pètent le cucul quand je veux!!! Honteuse incitation à l'inceste !» Sauf que sur la photo originale le texte disait: «Mes 2 papas te pètent la gueule quand tu veux!!!» Le tweet a depuis été supprimé, mais le voici:

    L'obsession de la «racaille» et des Roms

    À l'instar de la fachosphère, Samuel Lafont affectionne particulièrement le terme «racaille». Et il l'use à toutes les sauces. Surtout lorsqu'il s'agit de commenter des faits divers impliquant des personnes vivant en banlieue. Mais pas que.

    Théo, le jeune homme victime d'un viol présumé lors d'une arrestation de la police en février? «Une racaille qui s'est battue avec la police». Ian Brossat, élu communiste de la ville de Paris? Un «communiste ou une racaille, même combat.» Sur l'étrange histoire de femmes agressées pour un short à Toulon? «C'est la racaille islamisée qui veut faire sa loi». L'homme politique socialiste Razzy Hammadi, un député qui «s'exprime comme une racaille». Des heurts à Marseille après une victoire de l'Algérie?: «Les policiers attaqués par la racaille.». Les militants socialistes? «Toujours prêts à excuser la racaille».

    Sur les Roms, Samuel Lafont donne aussi dans la caricature et la stigmatisation. Comme ici:

    Et lorsque ce membre de l'équipe Fillon raconte une anecdote sur les Roms, «une population «absolument pas intégrée et qui ne vit pas comme nous», ça donne ça: «Déjà attrapé des Roms train d'essayer de détrousser un sexagénaire: ils m'ont traité de "petit PD" et "sale Français"!». Lorsqu'il en croise dans le métro, il dit aussi aussi: «Encore des Roms qui s'attaquent à un Espagnol dans le métro...». Une population «absolument pas intégrée et qui ne vit pas comme nous».

    À noter que François Fillon en a également pris pour son grade. Avant de rejoindre son équipe, Samuel Lafont a critiqué à plusieurs reprises le candidat de la droite. Et notamment lorsqu'il a décidé de ne pas revenir sur le «mariage pour tous» et pendant la bataille pour la présidence de l'UMP en 2012. Sur une note plus différente, Lafont a aussi publiquement interrogé François Fillon sur la présence d'un homme présent à ses côtés et portant... le maillot de l'Algérie

    Interrogé par l'Express, Pierre Danon directeur du CNSC a promis de «réagir rapidement» si les tweets de Lafont sont jugés «incompatibles» avec son engagement auprès de François Fillon. Mais a affirmé qu'«il n'y aura pas d'exclusion».

    Ni l'équipe presse, ni Samuel Lafont n'ont répondu aux sollicitations de BuzzFeed News. Jeudi matin, ses tweets homophobes n'avaient toujours pas été supprimés.