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Trump a-t-il un trouble de la personnalité narcissique?

Des experts d’ici et des États-Unis se prononcent sur son comportement

JdeM-Régulier
Photos AFP


Impulsif, méprisant, imperméable à la critique, convaincu de sa propre grandeur. Donald Trump aurait toutes les caractéristiques d’un trouble de la personnalité narcissique. Plusieurs psychologues américains ont émis ce dur diagnostic récemment, même si le président ne s’est jamais confié sur leur divan. Dérapages ou expression de craintes légitimes? Des experts d’ici se prononcent.

«Quand on regarde un individu agir, qu’on l’entend jour après jour, oui, c’est possible [d’émettre un diagnostic]. Mais c’est moins fiable que pour une personne évaluée en face à face», explique le psychologue Hubert Van Gijseghem.

Au cours des derniers mois, plusieurs médias ont rapporté les propos d’experts qui arrivent presque tous au même constat: Trump présente les traits d’un trouble de la personnalité narcissique. Ce trouble se caractérise, entre autres, par le besoin excessif d’être admiré et par l’arrogance.

« Dangereusement malade »

Certains experts américains se sont montrés durs. «Trump est dangereusement malade mentalement et son tempérament le rend inapte à la présidence», a déclaré le psycholo­gue John D. Gartner à US News.

«Le narcissisme empêche de voir la réalité en face, alors vous ne pouvez pas utiliser la logi­que pour raisonner quelqu’un comme ça», disait de son côté la Dre Julie Futrell au New York Daily News.

Énoncer ce genre de diagnostic publiquement au sujet d’une personne qui n’a pas été évaluée en personne contrevient toutefois au Code déontologique de l’Association américaine de psychiatrie.

Car même s’il présente un tableau assez typi­que de personnalité narcissique, on ne peut pas dire que Trump souffre de maladie mentale au sens clinique du terme. Notamment parce qu’il ne présente pas de problèmes majeurs de fonctionnement socioprofessionnel, nuance Sébastien Bouchard, psychologue à la Clinique des troubles relationnels de Québec.

Reste qu’au-delà du diagnostic plusieurs comportements de Trump semblent compatibles avec la notion de narcissisme, notamment son attitude méprisante et son égocentrisme, remarque M. Van Gijseghem.

«Ce qui est préoccupant, c’est son impulsivité et son instabilité, croit Gil Troy, professeur d’histoire à l’Université McGill. Chaque tweet a le potentiel de mener à un crash économique ou à une guerre.»

Personnalité ou personnage ?

Mais comment savoir si ces comportements sont le reflet réel de sa personnalité et non la réalisation d’un plan de communication judicieusement prémédité?

Certaines interventions semblent effectivement planifiées pour faire des gains politiques ou pour faire diversion­, comme ses accusations récentes d’avoir été mis sous écoute par Barack Obama, croit Harold Bérubé, de l’Université de Sherbrooke.

«Mais d’autres sont le fruit d’une spontanéité réelle. Comme lorsqu’il a tweeté contre Meryl Streep, [la qualifiant d’actrice surestimée]. Cela ressemble à une réaction infantile», s’étonne M. Bérubé.

Courant chez les gens au pouvoir

Donald Trump a beau se démarquer, tous les présidents américains devaient être un peu narcissiques pour vouloir briguer la tête d’une superpuissance, s’entendent pour dire les experts.

«Il faut être assez narcissique pour dire: chers amis, mirez-vous en moi et votez pour moi. Il faut croire en soi un peu plus que la moyenne des gens», pointe Hubert Van Gijseghem.

Trump n’est d’ailleurs pas le premier politicien dont l’équilibre mental est remis en question. Lors de la campagne présidentielle de 1964, plus de 1000 psychiatres avaient déclaré dans un sondage controversé que le candidat républicain Barry Goldwater n’était pas mentalement apte à gouverner. C’est après ce scandale que l’Association américaine de psychiatrie a instauré sa «règle Goldwater», qui interdit à ses membres de donner leur opinion sur des gens qu’ils n’ont pas évalués en personne.

« Extrême »

Mais il y a clairement quelque chose d’extrême dans le fait de se lancer dans la course à la Maison-Blanche, croit le professeur d’histoire Gil Troy.

Il existerait aussi des traits de personnalité particulièrement efficaces pour prendre le pouvoir, note M. Van Gijseghem. Ce cocktail comprend une part narcissique (avoir des idées de grandeur), une part antisociale (exploi­ter les autres) et une part machia­vélique (manipuler). Dans certains cas, ces personnes peuvent tout de même devenir de bons leaders vision­naires.

«La politique fait ressortir le meilleur et le pire de gens», abonde M. Troy.

Des citations qui en disent long

Le quotidien britannique The Independent a diffusé une vidéo intitulée «Comment diagnostiquer un narcissique: avec Donald Trump». La vidéo associe une citation du président américain à chaque trait de la personnalité narcissique telle que décrite par le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux.

«J’ai parlé à beaucoup de gens, mais mon premier consultant est moi-même.»

A un sens grandiose de son importance. Par exemple, exagère ses réalisations ou ses talents, s’attend à être reconnu comme supérieur.

«Je pense que la seule différence entre moi et les autres candidats est que je suis plus honnête et que mes femmes sont plus belles.»

Est absorbé par des fantaisies de succès illimité, de pouvoir, de splendeur ou d’amour idéal.

«Je serai le président le plus grand créateur d’emploi que Dieu a jamais créé.»

Pense être spécial et unique; croit ne pouvoir être admis ou compris que par des institutions ou des gens spéciaux et de haut niveau.

«Ils ont dépensé des millions de dollars en publicités contre moi en Iowa. La bonne nouvelle, c’est qu’ils ont utilisé les meilleures photos. Je suis si beau sur ces photos, j’essaie de trouver où ils les ont prises.»

A un besoin excessif d’être admiré. Pense que tout lui est dû, s’attend sans raison à bénéficier d’un traitement particulièrement favorable et à ce que ses désirs soient automatiquement satisfaits.

«Je pourrais me tenir en plein milieu de la 5e Avenue, tirer sur quelqu’un et ne perdre aucun électeur.»

Pense que tout lui est dû, s’attend sans raison à bénéficier d’un traitement particulièrement favorable.

«J’étais en bas et je regardais nos pompiers et policiers le 7/11, quand le World Trade Center s’est effondré.»

Manque d’empathie; n’est pas disposé à reconnaître ou à partager les sentiments et les besoins d’autrui.

«Je vais construire un mur et le Mexique va payer. Et ils vont être content de payer pour.»

Exploite l’autre dans les relations interpersonnelles, utilise autrui pour arriver à ses propres fins.

«Mon quotient intellectuel est un des plus élevés, et vous le savez. Je vous en prie, ne vous sentez pas stupides ou inquiets. Ce n’est pas de votre faute.»

Envie souvent les autres et croit que les autres l’envient.

SOURCES : The Independant, The Atlantic, Politico, US News, NY Daily News, Journal of the American of Psychiatry and the Law, Marianne, Globe and Mail, Statnews, Libération, Guardian, History News Network, Les Echos, Marie Claire UK, Telegraph, Mini DSM-IV-TR.

Leur santé mentale a aussi fait jaser

Richard Nixon

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Le président américain Richard Nixon a toujours nié avoir consulté un psychiatre pendant son passage à la Maison-Blanche, de 1969 à 1974. Des rumeurs avaient circulé à ce sujet, remettant en question sa stabilité émotionnelle. «À cette époque, consulter un psychiatre était encore considéré comme un signe de folie, ce qui laissait penser que la personne ne devait pas avoir accès à des bombes nucléai­res», explique Gil Troy, professeur à l’Université McGill. Nixon a aussi souvent été qualifié de «paranoïaque».

Silvio Berlusconi

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Magnat des médias, l’ancien président du conseil italien est connu pour ses fêtes «bunga bunga». «Berlusconi croit que le monde tourne autour de lui, soit l’ultime fantasme narcissique», a déjà affirmé son biographe américain, Alexander Stille.

Nicolas Sarkozy

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Connu pour son tempérament colérique et son mariage avec la mannequin et chanteuse Carla Bruni, Nicolas Sarkozy a gouverné la France de 2007 à 2012. «Il est obnubilé par lui-même, sa jouissance, son désir, son plaisir», analysait en 2008 Serge Hefez, psychiatre et auteur du livre La Sarkose obsessionnelle.

Vladimir Poutine

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De «mégalomane» à «narcissique autocrate», plusieurs étiquettes peu flatteuses ont été accolées à l’actuel président russe. Son refus de la critique et sa tendance à être photographié torse nu, pratiquant la plongée ou derrière une voiture de course, y ont peut-être contribué.

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