Pékin espère respirer un peu mieux. La dernière grande centrale au charbon qui alimentait en électricité la capitale de la Chine a suspendu ses opérations, a annoncé dimanche 19 mars l’agence Chine nouvelle.

Désormais, l’électricité de la métropole, qui compte plus de 20 millions d’habitants, est désormais exclusivement générée par le gaz. L’opération est d’autant plus symbolique que, comme souvent en hiver, Pékin est à nouveau touché par un très grave épisode de pollution de l’air.

Premier pollueur de la planète

La fermeture de la centrale thermique de Huangneng a été annoncée dans la foulée de la session annuelle de l’Assemblée nationale populaire (ANP), au cours de laquelle le premier ministre chinois Li Keqiang avait promis de rendre un ciel bleu aux Chinois.

Premier pollueur de la planète, le pays est de plus en plus régulièrement asphyxié par des nuages de pollution toxique, particulièrement le Nord-Est du pays, où se trouvent la capitale et les installations industrielles les plus anciennes et les plus polluantes.

Pékin précurseur dans l’électricité générée par le gaz

Chine nouvelle, l’agence d’information officielle du régime chinois, souligne que la capitale du pays est désormais la première ville du pays dont l’électricité est intégralement générée par le gaz naturel, l’un des objectifs fixés par le plan quinquennal de 2013 de la capitale.

La centrale de Huangneng est la quatrième à avoir été remplacée par une usine fonctionnant au gaz. Elles fonctionnaient depuis vingt ans, pour la plus récente, et… quatre-vingt-treize ans pour la plus ancienne. La première avait cessé de fonctionner en juillet 2014, les deux suivantes coup sur coup en avril 2015. La quatrième devait être arrêtée il y a environ un an.

La capacité des nouvelles centrales à gaz devait être 2,6 fois supérieure à celle des anciennes, pour répondre à la demande d’une ville qui continue à s’étendre rapidement.

Pollution dix fois supérieur au niveau maximum de l’OMS

Depuis la fin de la session du Parlement, le niveau de particules fines à pm2,5, c’est-à-dire d’un diamètre de 2,5 microns, oscille entre 200 et 330, soit dix fois plus que le niveau maximal recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

En général, lorsque se tiennent de grands événements nationaux ou internationaux, les autorités se débrouillent pour faire baisser les niveaux de pollution, en imposant la fermeture temporaire des usines polluantes.

Application sur smartphone

Ainsi, l’annonce de la fermeture est intervenue dans la nuit, peu avant que la municipalité n’émette dimanche une alerte bleue à la pollution de l’air. Le « smog » assombrit depuis déjà plusieurs jours le ciel de la capitale, une situation qui devrait se poursuivre la semaine prochaine.

Outre la couleur du ciel, les Pékinois peuvent s’informer de la teneur de l’air en particules fines en téléchargeant sur leur smartphone une application regroupant d’une part les mesures officielles des autorités et d’autre part celles de l’ambassade des États-Unis. En cas de forte pollution le chiffre officiel est inférieur à celui des Américains – c’est l’inverse quand le vent éloigne les nuages toxiques, ce qui permet d’avoir sur l’année une moyenne pas trop éloignée entre les deux mesures…

Entre 400 000 et un million de décès par an

Les particules fines, qui s’installent profondément dans les poumons et peuvent passer dans le système sanguin, sont responsables de taux plus élevés que la moyenne de bronchites chroniques, cancers du poumon et maladies cardiaques.

Le nombre de décès prématurés en raison de la pollution est de près de 400 000 par an dans l’ensemble du pays selon les chiffres officiels, et plus de 1 million en 2012 selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Coût social et politique pour les autorités

Outre le grave problème de santé publique, la pollution a aussi un coût social et politique pour les autorités. Alors que les manifestations liées à l’environnement se multiplient, Pékin y voit une menace potentielle pour l’ordre établi.

Résultat, les autorités chinoises ont pris leur premier engagement international à la COP15, à Copenhague en 2009, en annonçant leur volonté de réduire l'« intensité carbone » de son économie – le volume de CO2 émis par unité de production – de 40 à 45 % entre 2005 et 2020. Un second pas décisif a été franchi lors de la COP21, à Paris fin 2015, où la Chine s’est engagée à atteindre le pic de ses émissions de gaz à effet de serre en 2030. Elle a aussi mis en place l’an prochain un marché national du carbone concernant plus de 8 000 entreprises des secteurs les plus polluants.

Trois ans de baisse de la consommation de charbon

La consommation de charbon en Chine a diminué en 2016, de 4,7 %, pour la troisième année consécutive, selon des données officielles publiées début mars. Le pays reste cependant le premier consommateur mondial de charbon, indispensable carburant de son économie, fournissant 60 % de son électricité.