Accueil

Société Médias
Deux lectures spectacles du livre posthume de Charb ont été annulés ces dernières semaines.
Deux lectures spectacles du livre posthume de Charb ont été annulés ces dernières semaines.
REVELLI-BEAUMONT/SIPA

Lectures du livre de Charb censurées : la campagne du "Charlie, oui mais" est de retour...

Liberté d'expression

Par

Publié le

Deux lectures spectacles de "La Lettre aux Escrocs de l’islamophobie", le livre posthume de Charb, ont été refusées ou déprogrammées à Lille et à Avignon. Dans une lettre ouverte adressée entre autres à plusieurs élus, l’équipe du spectacle dénonce "une censure sécuritaire". Mais pas seulement...

Après Avignon, Lille. La lecture-spectacle du livre posthume de Charb, Lettre aux escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des racistes, qui devait être jouée cette semaine à l’Antre 2, une salle qui appartient à l’université de Lille, a finalement été déprogrammée. Le spectacle devait notamment être suivi d’un débat auquel était censée participer Marika Bret, DRH de Charlie Hebdo à l’origine de la publication du livre de Charb peu après les attentats de janvier 2015. Mais à Lille, le président de l’université Xavier Vandendriessche a craint des "débordements". "Le climat et l’ambiance sont si lourds, a-t-il expliqué. Je sais qu’on est un peu complice en agissant de la sorte et ça m’emmerde, mais j’ai préféré annuler".

"Drôle de climat" écrit donc La Voix du Nord suite à la déprogrammation. Dans le quotidien, le metteur en scène du spectacle, Gérald Dumont, et Marika Bret déplorent ainsi "une censure sécuritaire", et souhaitent d’autant plus "tirer la sonnette d’alarme" que depuis "plus d’un an" le spectacle est joué "en milieu scolaire et dans les centres sociaux". "Depuis qu’on cherche à la produire dans des salles, on sent que c’est compliqué" regrette en effet Gérald Dumont.

"Charb on ne l'entend plus. Il a été tué. Si on n'entend plus ses mots, il sera mort deux fois".
Marika Bret, DRH de Charlie Hebdo et Gérald Dumont, metteur en scène

En témoigne la mésaventure avignonnaise. Alors que la lecture-spectacle du livre de Charb, présentée dans plusieurs lieux du festival d’Avignon dans le cadre de la prochaine édition avait rapidement suscité un "vif intérêt" le silence s’est ensuite fait "assourdissant". Preuve pour Marika Bret , qu’au-delà des questions sécuritaires avancées, c’est "la campagne sur le fameux "Charlie, oui mais... qui a repris". A Lille, les associations, bien que gênées, à l'instar de La Ligue des droits de l’Homme (LDH), ont dans cette perspective été très claires. Les militants de la LDH "craignant" de fait de "cautionner la ligne politique mise en avant par Charlie", s’est justifié Gérard Minet, secrétaire de la section lilloise de la LDH auprès de La Voix du Nord.

En colère, plus de deux ans après la mort de Charb et de onze autres personnes lors de l’attentat du 7 janvier - parmi lesquelles sept autres collaborateurs de l’hebdomadaire satirique - Marika Bret et Gérald Dumont ont décidé d’adresser une lettre ouverte à plusieurs élus, (Xavier Bertrand, Martine Aubry, Anne Hidalgo entre autres...) et à plusieurs directeurs d'établissements pour dénoncer la situation. "La parole de Charb, on ne l'entend plus, car il a été tué. Si on n'entend plus ses mots, il sera mort deux fois", rappellent-ils...

Votre abonnement nous engage

En vous abonnant, vous soutenez le projet de la rédaction de Marianne : un journalisme libre, ni partisan, ni pactisant, toujours engagé ; un journalisme à la fois critique et force de proposition.

Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne