Présidentielle : « Si Jaurès ressuscitait, il leur botterait le derrière »

FAIT DU JOUR. En apportant son soutien, mercredi matin, à Emmanuel Macron, Manuel Valls s'est attiré, dans son propre camp, nombre de critiques, entérinant ainsi la scission du PS.

Carmaux (Tarn), mercredi. Frédéric, ici devant la statue de Jean-Jaurès, est déçu par Manuel Valls et la gauche de gouvernement.
Carmaux (Tarn), mercredi. Frédéric, ici devant la statue de Jean-Jaurès, est déçu par Manuel Valls et la gauche de gouvernement. LP/JEAN-NICHOLAS GUILLO

    Face à l'imposante statue de Jean Jaurès à Carmaux, cité symbolique qui a vu éclore le socialisme il y a cent vingt-cinq ans, Frédéric est peiné. « Le pauvre, ça fait déjà cinq ans qu'il se retourne dans sa tombe. Mais là, c'est le coup de grâce. Valls qui se rallie à Macron, c'est la preuve que le PS est mort. C'est immoral, c'est le déni de nos valeurs. L'acte de décès a été initié par la politique gouvernementale éloignée du peuple lors de ce quinquennat », regrette ce commercial de 45 ans à l'heure du soleil couchant. Lui qui a toujours voté socialiste est aujourd'hui « perdu » et ne sait pas à quel candidat il offrira son suffrage le 23 avril.

    Sur ces terres encore très ancrées à gauche, celles-là même où le tribun Jaurès combattait aux côtés des mineurs et des ouvriers verriers en 1892, les électeurs de la « rose » sont plus que désenchantés. « Quand, en 2012, Hollande, alors candidat, est venu devant cette statue, je faisais partie du service d'ordre et je lui ai même serré la main. C'était un grand moment chargé d'espoir, je me disais qu'on allait enfin changer de politique, faire davantage de social », se souvient Frédéric. « Et voilà le résultat : Valls qui retourne sa veste en rejoignant le traître Macron », s'indigne Cédric, fonctionnaire qui donnera sa voix à Jean-Luc Mélenchon. « Je suis OK pour un rapprochement avec Hamon, à condition que ce soit Mélenchon qui représente la gauche », poursuit-il.

    «Valls n'a pas été loyal»

    Elisabeth, commerçante, penche, également, vers le prétendant de la France insoumise car « c'est le plus sensé ». « Je suis écoeurée. Les ténors du PS qui s'entre-déchirent, ce n'est pas rendre hommage à Jaurès. S'il ressuscitait, il leur botterait le derrière », imagine cette arrière-petite-fille d'un mineur syndicaliste communiste. Claudine, 57 ans, « socialiste depuis toujours », déposera, elle, un bulletin Macron dans l'urne, à l'instar de l'ancien Premier ministre Manuel Valls qu'elle n'hésite pourtant pas à « dézinguer ». « Il avait promis de soutenir Hamon. Il n'a pas été loyal, un peu comme Fillon qui avait juré de se retirer s'il était mis en examen », compare-t-elle.

    Son mari, lui, fera carrément le grand écart en choisissant le Front national, « un vote de contestation ». Jean-Marc, maçon qui souhaite « un peu de changement », fera de même. « Ne me parlez plus des socialistes ! Parce que les socialistes, c'est fini, ça ne vaudra plus jamais Jean Jaurès », s'énerve cet ex-mitterrandien. Stéphanie, 41 ans, demeurera, elle, « fidèle » à Benoît Hamon. « Valls qui s'allie à Macron, ça ne m'étonne pas, ce sont des libéraux tous les deux », décrit-elle. Cette pharmacienne veut encore croire aux chances de son favori qui incarne des « valeurs de partage et de solidarité avec son revenu universel ». « J'espère que c'est un digne successeur de Jaurès », confie-t-elle.

    QUESTION DU JOUR. Selon vous, le PS va-t-il survivre à l'élection présidentielle?