Cruauté animale : la terrible réalité derrière les adorables vidéos de loris

Ces primates originaires d'Asie sont arrachés de leurs forêts tropicales pour être livrés à une cruelle exploitation et au trafic. 

La popularité des loris sur le net leur vaut de vivre un cauchemar.
 
La popularité des loris sur le net leur vaut de vivre un cauchemar.   Wiki/Jellrancher

    Vous êtes peut-être déjà tombé sur une de ces vidéos, partagées en masse sur les réseaux sociaux. On y voit d'adorables animaux se faire chatouiller, écarquiller leurs gros yeux de peluche et lever les deux bras. Elles ont fait des loris de petites stars d'Internet. Reposant sur l'ignorance des internautes, cette popularité est en fait synonyme de cauchemar pour ces primates originaires d'Asie, objets de trafic et de cruautés.

    Quand ces animaux de la famille des lémuriens lèvent les bras, il ne s'agit nullement, comme on peut le croire, d'un signe de plaisir, mais au contraire de peur, voire de volonté de défense, selon l'ONG International Animal Rescue, à l'origine d'une campagne de sensibilisation menée depuis 2015.

    VIDÉO. Campagne de l'ONG International Animal Rescue sur l'exploitation des loris (attention certaines images peuvent choquer)

    Dents arrachées à la pince

    Comme l'explique Marie Sigaud, chercheuse au sein du Nocturnal Primate Research Group, de l'Université d'Oxford Brookes, cette position permet au loris de sécréter du venin grâce à «une petite glande située au niveau des avant-bras», puis de le mélanger à sa salive, ce qui lui confère «une morsure venimeuse». Pour rendre l'animal inoffensif, les personnes à l'origine de ces vidéos n'hésitent pas lui à arracher les canines à la pince, sans anesthésie. Une torture susceptible d'aboutir à des infections, et qui rend impossible le retour de ces animaux dans la nature, regrette la primatologue.

    Braconnés dans les forêts tropicales, les loris sont transportés dans des conditions épouvantables. Dans les caisses à l'intérieur desquelles ils sont entassés, le taux de mortalité peut atteindre de 30 à 90%. Ils sont ensuite vendus aux touristes et à l'international comme des animaux de compagnie exotiques. Ajouté aux problématiques de déforestation, ce trafic a fait du loris, vendu à prix d'or au Japon ou en Russie, l'une des espèces les plus menacées de disparition au monde.

    Des photos sur Instagram

    Les vidéos, qui pullulent sur internet, continuent cependant de les populariser. Toutes vont à l'encontre de la nature de cet animal, censé vivre la nuit et parcourir de longues distances quotidiennement, désormais enfermé dans des cages et filmé en pleine lumière. Ces primates font également l'objet d'attractions touristiques dans leurs pays d'origine. «Sur certaines plages de Thailande, on voit des personnes qui se promènent avec des loris et s'en servent comme d'un aimant à touristes, raconte Marie Sigaud. Les badauds, souvent des jeunes gens non informés, se font prendre en photo en échange d'argent avec un loris sur l'épaule. On trouve un grand nombre de ces clichés sur les comptes Instagram de personnes en vacances dans ces pays...», ajoute-t-elle.

    Muriel Arnal, présidente de l'association contre l'exploitation animale One Voice, y voit le signe d'une société qui a perdu sa proximité avec la nature. «On a fondamentalement besoin de se relier à la faune et à la flore, explique-t-elle au Parisien. Alors on achète ce lien à la nature, dans une pure logique de consommation, sans forcément se rendre compte que l'on crée des animaux-objets... ce qu'aucune espèce ne peut être».

    Le sort des loris est révélateur de ce que subissent beaucoup d'autres animaux exotiques soumis au trafic. Pour Muriel Arnal, les campagnes d'information et de sensibilisation sur ces sujets sont essentielles. Elle insiste : si l'on souhaite se rapprocher de la nature, mieux vaut opter pour une bonne promenade dans la campagne plutôt que de naviguer sur internet et de promouvoir ce genre de vidéos... dont l'on ne mesure pas toujours les cruelles conséquences.