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En service civique, elle vit avec 470 euros par mois

Vivre avec 17 euros par jour à Tourcoing - Noémie Marbaix, Tourquennoise de 24 ans, rêve de trouver un emploi. En service civique, elle vit avec 470 euros par mois.

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"C’est un Triskèle", dit Noémie en retroussant la manche de son pull rouge. "Il représente le cours de la vie : le passé, le présent et le futur", ajoute la brune, les yeux rivés sur son premier tatouage. De petite taille, réservée, regard dissimulé derrière de grandes lunettes violettes, la jeune Tourquennoise se livre peu à peu. Après avoir redoublé deux fois la première année d’Histoire à l’Université Lille 3, Noémie abandonne ses études. Mais difficile de trouver un emploi avec le Bac STG pour seul diplôme. "Sur plusieurs offres d’emploi, on demandait au moins un niveau Bac+2. J’ai donc décidé de reprendre ma scolarité, après une année à la maison." La jeune fille envoie sa candidature à un institut sans trop y croire. L’école, à la recherche de profils différents, trouve encourageant que Noémie revienne sur les bancs. "Certains professeurs me rabaissaient constamment. Ils me faisaient comprendre que je n’aurai jamais mon diplôme, se souvient-elle. Alors j’ai fait ce tatouage après avoir obtenu mon BTS d’assistant manager avec plus de douze de moyenne."

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Le Triskèle de Noémie représente le cours de la vie : le passé, le présent et le futur. (Aïssatou Diallo/ESJ)

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Place Saint-Christophe à Tourcoing. Des dizaines de personnes émergent d’une station de métro en face d’une grande église. A quelques mètres de là se trouve la rue Saint-Jacques, la rue marchande. "C’est la plus belle place de la ville", sourit Noémie. "Je suis une vraie ch’ti. Je suis née à Croix dans le Nord, j’ai grandi dans le Pas-de- Calais mais je venais souvent rendre visite à ma grand-mère. On faisait les courses ensemble dans cette rue. C’était animé, le marché était vivant. Aujourd’hui les choses ont changé. De plus en plus de commerces ferment." La jeune femme fixe les jets d’eaux de la fontaine en silence puis reprend. "Moi aussi j’y viens moins souvent. Je dois faire attention à mes dépenses. Un jean à 20 euros, c’est abusé! ironise-t- elle. Je fais du shopping chez Camaïeu ou chez Primark à Eurallile, une fois par mois ou tous les deux mois."

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Avec les personnes âgées isolées

Ce jeudi après-midi, Noémie retrouve Djulligan, son binôme de service civique à Croix. Tous les deux sont encadrés depuis octobre par l’association Unis-Cité qui regroupe des jeunes d’horizons divers autour de la solidarité. Plusieurs fois par semaine, ils rendent visite à des personnes âgées en situation d’isolement. Première escale chez Huguette, 84 ans, élégante, joviale et maquillée pour l’occasion. Elle ne s’est jamais mariée et n’a pas d’enfant. Sur la table de la salle à manger, des gâteaux et du jus de pomme attendent ses hôtes. Elle profite de la présence des jeunes pour leur demander leur aide pour faire fonctionner ses appareils électroniques. "Parfois ils veulent juste parler, confie Noémie. Lors d’une visite, une dame âgée m’a dit : 'Merci pour ce que vous faites.' C’était la première fois de ma vie que je me sentais utile, que je faisais quelque chose qui avait du sens." Pour la jeune femme, proche de sa grand-mère, l’idée de rendre visite à des personnes âgées isolées l’a vite séduite. Ses activités à Unis-Cité occupent la majeure partie de son temps : trente heures par semaine. Mais Noémie ne compte pas les heures. "Parfois lors des visites dans des établissements pour personnes âgées dépendantes, ils nous demandent de repasser dans la semaine. Alors nous y allons. On lit le journal ou on discute avec eux. Ça leur fait plaisir de parler avec des jeunes." Noémie gagne 470 euros d’indemnités versées par l’État au titre de son service civique. Et l’association prend en charge une partie de sa restauration et de ses déplacements à hauteur de 100 euros.

Noémie et Djulligan rendent visite à Huguette. (Aïssatou Diallo/ESJ)

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La danse pour s'ouvrir aux autres

"Certains de mes camarades bénévoles sont tout le temps dans le rouge. Il ne leur reste pas grand-chose après avoir payé le loyer. J’ai de la chance que mon père m’héberge gratuitement." Noémie vit seule avec son père à Tourcoing dans une maison située sur le boulevard d’Halluin. Elle restreint ses achats et sort peu. "Par exemple au cinéma, je n’ai pas de réduction vu que je ne suis plus étudiante. Je n’ai pas d’aide au logement (APL) non plus, j’habite chez mon père." Son service civique touche à sa fin en juin. Elle n’aura donc plus de ressources. Noémie devra dépasser sa timidité pour trouver un emploi. "C’est difficile pour moi d’aborder les gens mais je dois le faire pour chercher du travail. Nous sommes encadrés par Unis-Cité pour nos projets professionnels alors je suis confiante. J’espère réussir les concours de l’administration et avoir les moyens d’avoir un chez moi." La kinésithérapeute de Noémie lui a conseillé de suivre des cours de danse. Des exercices psychomoteurs utiles pour corriger la courbure de sa colonne vertébrale. "Mais la danse c’est surtout une ouverture pour moi", confie la jeune fille. Après la séparation de ses parents, Noémie s’est réfugiée dans les jeux de rôle. "C’était le seul endroit où je pouvais sortir de ma coquille et m’exprimer à travers mes personnages." Au sein de son petit groupe de danse à Roncq, Noémie reprend confiance en elle. "Nous préparons un spectacle pour juin, au théâtre Sébastopol", dit-elle avec fierté.

Source: leJDD.fr

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