L'histoire débute comme le scénario de Jurassic Park : un chercheur américain a découvert, piégé dans de l'ambre, un arthropode rempli de sang. Sauf que le spécimen fossilisé n'est pas un moustique mais une tique (donc un arachnide) et que le sang découvert n'est pas celui d'un dinosaure mais d'un mammifère. George Poinar, chercheur au département de biologie intégrative de l'université d'Etat de l'Oregon (Etats-Unis), a présenté dans un article paru le 20 mars 2017 dans la revue Journal of Medical Entomology, ce qui semblent être les premières cellules sanguines de mammifères découvertes fossilisées.
Des cellules sanguines de mammifères incroyablement bien conservées
Après avoir étudié méticuleusement l'échantillon découvert dans une mine située en République Dominicaine, le chercheur a pu voir que la tique piégée, correspondant au genre Ambylomma, contenait plusieurs cellules sanguines de mammifères (photo ci-dessous), celles de son hôte. Ces dernières sont facilement reconnaissables grâce à leur forme de disque biconcave et à l'absence de noyau. Leur observation a permis au scientifique américain de découvrir un pathogène nommé Piroplasmida à l'intérieur de certaines de ces cellules. Cet organisme est un parasite eucaryote (possédant un noyau) connu pour se transmettre aux mammifères par une morsure de tique.
Crédit : Journal of Medical Entomology / George Poinar
La tique et son hôte ont vécu il y a plusieurs dizaines de millions d'années
Depuis les années 40, les scientifiques savent que la taille des cellules sanguines peut varier d'une espèce à l'autre. Ainsi, celles des ongulés, des chauves-souris et des rongeurs ont un diamètre compris entre 2,7 et 6,6 micromètres alors que les cellules sanguines des lagomorphes (lièvre, lapin...), des canidés et des primates ont un diamètre compris entre 6,9 et 7,3 micromètres. La taille des cellules découvertes correspond à la seconde catégorie. Or, aucun fossile de canidé ou de lagomorphes n'a été découvert sur l'île d'Hispaniola (qui abrite la République Dominicaine et Haïti).
Cependant, des restes de primates ont déjà été mis au jour. En analysant la composition de l'ambre, le chercheur en a déduit que la tique, tout comme son hôte, avait vécu il y a 20 à 30 millions d'années, c'est-à-dire au milieu de l'ère Tertiaire. Pour le scientifique, le mammifère en question était donc probablement un primate, "une sorte de Platyrhinien (aussi appelés "Singes du Nouveau Monde", NDLR) qui vivait dans une forêt de l'île". Mais à la différence des dinosaures, ces animaux occupent toujours notre planète : l'analogie avec Jurassic Park s'arrête donc là.