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Je suis ambitieuse, et alors?

Ambition, travail et femmes d'affaires
Sept femmes, entrepreneures, ingénieure, médaillée olympique, féministe et auteure nous racontent leur rapport au mot "ambition". Photo iStock

Témoignages – Entre éducation, poids des stéréotypes et rôle de l’entourage, sept femmes racontent leur vision de l’ambition.

"#Embrace ambition". Depuis un mois, la styliste américaine Tory Burch lance, sous ce hashtag, une campagne encourageant les femmes à assumer leur ambition. En vidéo, de nombreuses personnalités comme les actrices Kerry Washington, Gwyneth Paltrow, Reese Witherspoon mais aussi la numéro 2 de Facebook, Sheryl Sandberg, ou encore Anna Wintour, rédactrice en chef de Vogue US, exhortent à "ne plus s'excuser", à "parler de leurs ambitions" et à s'entraider. Pourquoi un tel message ? Pendant longtemps, Tory confesse ne s'être pas sentie à l'aise avec ce mot, et avoir intégré la vision stéréotypée de la femme qui ne doit pas dévoiler ses ambitions. Pourtant, l'ambition est un formidable moteur pour réaliser ses rêves, choisir sa vie, et en un mot : être heureuse - une image à mille lieues de la fille agressive aux dents longues.

Nous avons demandé à sept femmes – entrepreneures, ingénieure, médaillée olympique, féministe et auteure – de nous raconter leur rapport à ce mot, et la définition qu'elles en donnent.

La force du secret

Assumer son ambition n'a pas été une évidence pour Sarah Ourahmoune. "J'avais enfoui au fond de moi un rêve que je ne dévoilais pas forcément : concourir aux Jeux olympiques", confie la vice-championne olympique de boxe. Dix fois championne de France, elle est sacrée trois fois championne d'Europe et décroche le titre de championne du Monde en 2008. Elle se sent enfin légitime, prête à assumer son rêve de médaille olympique. "J'avais besoin de me convaincre moi-même et cela s'est fait avec le temps, les victoires et le respect acquis dans mon milieu. Je me suis dit que là, on ne pourrait plus me signifier que j'étais folle d'y penser." Son ambition est momentanément remise en cause quand elle reprend la boxe après sa grossesse. Pour retrouver son niveau, elle se fait accompagner par un préparateur mental pour les J.O. "Ce coach m'a entraînée à me voir victorieuse, sur le podium, chanter la Marseillaise, se souvient-elle. Il m'a aidée à projeter celle que j'avais envie de devenir." En août dernier, elle atteint le Graal en décrochant la médaille d'argent, dans la catégorie des poids mouches femmes de moins de 51 kg.

Même combat pour Leia Sfez, fondatrice de la marque Diapers and Milk. Malgré un parcours scolaire interrompu assez tôt, elle a toujours senti qu'elle "réaliserait ses rêves". "Mes profs me disaient que je n'irais nulle part, mais j'étais persuadée au plus profond de moi du contraire." Portée par sa fibre artistique, elle devient d'abord photographe. Son désir de créativité est finalement comblé avec l'arrivée de sa fille : elle décide de lui imaginer des leggings, confortables, avec des motifs design. Mis en valeur par ses talents de photographe professionnelle, les modèles s'arrachent sur Instagram. Sa start-up est lancée. "Tout est arrivé si vite. J'ai appris sur le tas à devenir chef d'entreprise mais je me sens aujourd'hui totalement accomplie."

Le rôle de l'entourage

"L'ambition ne dépend pas que de soi, elle est portée, nourrie par l'entourage, confie Raodath Aminou, fondatrice de la géniale appli anti-gaspi Optimiam, qui aide les commerçants à écouler leurs stocks grâce à des promotions envoyées aux utilisateurs. Tout au long de mon parcours, je l'ai sentie en moi et dans le regard des autres." Au Bénin, cette brillante entrepreneuse au parcours exemplaire est scolarisée à l'école française avant d'intégrer les classes préparatoires aux grandes écoles en France, puis finalement Polytechnique. "Mon père m'encourageait à me dépasser, j'aimais être la première donc je continuais", se souvient-elle. Bien après ses études, son modèle familial joue encore un rôle important dans sa façon de prendre les décisions. Après trois années en CDI dans la finance, Raodath Aminou comprend que ce monde ne la comble plus. "Je commençais à stagner et je savais que changer de travail ne suffirait pas." Portée par le besoin de "se sentir utile", elle crée son entreprise. "Il me fallait un nouvel objectif et l'entrepreneuriat m'a semblé la meilleure réponse à cela. Peut-être parce que mes deux parents sont commerçants ? Quand je me suis lancée, je savais que mes parents l'avaient fait avant moi, et qu'ils me soutiendraient", confie-t-elle.

"Mes parents m'ont toujours appris que l'ambition ne se résumait pas à la réussite professionnelle, mais visait plus largement l'accomplissement de soi", souligne Rebecca Amsellem, fondatrice de la newsletter féministe "Les Glorieuses". D'aussi loin qu'elle se souvienne, elle s'est toujours sentie ambitieuse. Un sentiment encouragé par le parcours de sa mère, entrepreneure à moins de 30 ans. Aujourd'hui docteur en économie, Rebecca est à la tête d'une plateforme féministe qui évoque chaque semaine la condition des femmes à travers le monde et compte bien s'immiscer dans la campagne présidentielle avec ses dix propositions aux candidats, inspirées d'initiatives internationales.

Même son de cloche chez Sophie Despeisse, développeur et partner chez Toucan Toco, une start-up spécialisée dans l'édition de logiciels. "Ma mère m'a toujours donné l'image d'une femme qui n'a pas peur de manager, de prendre des responsabilités, je me suis simplement dit que c'était possible", explique-t-elle. Celle qui assure ne se pas se fixer d'objectif à long terme mais plutôt "une direction" n'a pas hésité à prendre la tête d'une équipe quand l'occasion lui en a été offerte. "Je ne l'ai pas vu comme une promotion, j'avais envie d'appliquer des principes ou des idées comme la parité ou la bienveillance dans les entretiens. De mettre ma "patte" dans l'organisation de l'entreprise", confie-t-elle.

En finir avec le mythe de la superwoman

L'exemple de Sophie le montre bien : assumer son ambition, c'est d'abord éviter de se laisser piéger par l'injonction de la superwoman qui réussit sur tous les tableaux. Et, – c'est peut-être là le plus difficile –, cerner ce que l'on veut vraiment, puis, ce que l'on va en faire. "Nous ne sommes pas obligées d'être ambitieuses sur tous les plans, remarque Frédérique Cintrat, fondatrice d'Axielles.com, et auteure de Comment l'ambition vient aux filles (Ed. Eyrolles). Il y a quelques années, la volonté était de ne renoncer à rien et d'être parfaite partout. Cette vision a causé beaucoup de ravages et d'épuisement… À certains moments de vie, on va mettre l'accélérateur sur tel ou tel point, et se consacrer aux autres plus tard."

L'important est d'avoir un projet, une vision d'ensemble. "Moi, par exemple, je me suis rendu compte après des années que mon ambition première était surtout d'avoir une vie personnelle épanouie, , se remémore Frédérique Cintrat. Ce qui passe nécessairement à mes yeux par la réalisation de ses ambitions professionnelles." Elle-même a mis un point d'honneur à "donner confiance à ses enfants, car c'est cela qui donne tout le pouvoir aux rêves". Quel meilleur moyen de les autoriser à croire en eux, que de leur en montrer tous les bénéfices par l'exemple ! "En fait, être ambitieuse, ce n'est pas vouloir être parfaite, c'est juste accepter ce que l'on veut et se donner les moyens d' y arriver", conclut Rebecca Amsellem.

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