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"Le quinquennat Hollande a été un désastre pour l’Europe"

Jean-Dominique Giuliani en mai 2015.
Jean-Dominique Giuliani en mai 2015. © Vernier/JBV NEWS
Interview Elisabeth Chavelet

Jean-Dominique Giuliani préside la fondation Robert-Schuman, le laboratoire d’idées français en Europe. Dans son livre «Pour quelques étoiles de plus» (Ed. Lignes de repères), il explique comment la présidentielle française peut être l’opportunité de relancer le projet européen.

Paris Match. Sur les onze candidats à la présidentielle, six, dont Mélenchon et Le Pen, prônent carrément la sortie de l'UE. Et dans les intentions de vote, 50% des Français se disent prêts à voter pour l’un des six. Que vous inspire cette désaffection croissante vis-à-vis de l’Europe?
Jean-Dominique Giuliani. Les candidats qui souhaitent la sortie de l'Union européenne se trompent sur le sentiment des Français. Tous les sondages montrent qu’une large majorité d’entre eux ne veulent sortir ni de l’UE, ni de la zone euro. Et 72% veulent garder l’euro. Si les Français sont légitimement inquiets, c’est parce qu’ils ne savent pas où va l’Europe, qu’il s’agisse de l’élargissement, de la défense, de la sécurité ou de l’immigration. Or toutes ces politiques ne se décident pas à Bruxelles mais au sein des Etats, souverains dans tous ces domaines!

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L’Allemagne qui, malgré ses excédents commerciaux et budgétaires, refuse de céder d’un pouce sur les politiques d’austérité, n’est-elle pas en partie responsable de ce désamour de beaucoup de citoyens vis-à-vis de l’Europe?
Non, car le premier responsable est la France, et notamment François Hollande qui, sauf la parenthèse grecque, a été absent de la scène européenne. Le quinquennat qui s’achève est de ce point de vue un désastre. La voix de la France s’est littéralement éteinte, par désintérêt du chef de l’état, plutôt que par hostilité. Quant à l'Allemagne, elle applique les règles des traités à la lettre : donc l’Europe, telle qu’elle fonctionne, lui convient très bien. Il appartient alors à la France d’inventer des règles plus adaptées en matière financière ou fiscale. Mais puisqu’elle reste passive, l’Europe ne bouge pas.

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Infographie : L'Europe face à la montée des populistes

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Est-ce que l’éventuelle élection en septembre prochain à la Chancellerie du SPD Martin Schultz pourrait adoucir l’intransigeance allemande?
D’abord, je pense qu’Angela Merkel sera réélue. Et si elle ne l’est pas, il existe en Allemagne un consensus sur la politique économique et sociale. D’autant plus que cette dernière est plus généreuse qu’on veut le croire en France, quasiment aussi généreuse que la nôtre. La réalité est que les Allemands ont fait les réformes nécessaires il y a 20 ans et qu’ils en profitent aujourd’hui.

"Pour Bruxelles, la candidature Marine Le Pen est la plus dangereuse"

Aux yeux de Bruxelles, quel est le candidat à la présidentielle le plus dangereux?
Clairement la plus dangereuse est Marine Le Pen dont on considère le populisme irresponsable. Sans compter sa proposition se sortir de l’euro, qui dévaluerait notre monnaie de 15 à 20%. Au XXe siècle, on a compté chez nous 17 dévaluations qui ont appauvri les plus pauvres. Et chaque fois notre pays est allé pleurer auprès de la Bundesbank ou des Américains. Avec l’euro, la France a retrouvé sa souveraineté monétaire, dans le sens où au moins elle est assise autour de la table.

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Et qui sont les candidats qui inquiètent le moins à Bruxelles?
Macron et Fillon.

Dans votre livre, vous proposez trois initiatives pour relancer l'Europe. Pouvez vous les résumer?
D’abord, un plan à 10 ans ou 15 ans pour établir une convergence fiscale progressive entre les 19 membres de la zone euro. Il commencerait par un accord entre la France et l’Allemagne qui pèsent plus de 40% du PIB de la zone. Lesquels seraient rapidement rejoints par leurs plus proches partenaires. L’objectif final étant pour chacun de pouvoir travailler et investir dans un pays européen ou un autre.

Vous insistez aussi beaucoup sur la défense et l’immigration.
La France a la meilleure armée d’Europe. Il faut agglomérer les autres. Un bon exemple à suivre est celui du porte-avion français parti en Syrie auquel s’est agrégé une frégate allemande, une belge et une britannique. Il faut par ailleurs construire un deuxième porte-avion dirigé par la France, mais européen. Quant à l’immigration, on a laissé les Italiens, les Grecs et les Espagnols gérer bien seuls ce dossier. Il nous faut harmoniser les conditions d’accueil des réfugiés. Ils est à cet égard anormal qu’il faille en Allemagne deux mois aux réfugiés pour obtenir ou non le droit d’asile, contre 9 mois en France, délai qui explique la multiplication des fraudes.

La couverture de "Pour quelques étoiles de plus" de Jean-Dominique Giuliani.
La couverture de "Pour quelques étoiles de plus" de Jean-Dominique Giuliani. © Lignes de repères

Depuis plusieurs années le couple franco-allemand bat de l’aile. Est ce qu’un duo social-démocrate Macron–Schultz serait plus propice à l’Europe que le Merkel- Hollande?
L’erreur de François Hollande a été de politiser d’emblée la relation franco-allemande. En décembre 2011, le candidat Hollande à la présidentielle s’est en effet rendu au congrès du SPD qui votait contre la réélection de la Chancelière. Laquelle a refusé de recevoir le même candidat en mars 2012, deux mois avant son élection. La bonne relation franco-allemande a toujours été d’Etat à Etat, indépendante des partis.

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