PRESIDENTIELLE 2017 - Dans l'ultime ligne droite de la course à l'Elysée, les campagnes de déstabilisation s'amplifient sur les réseaux sociaux. Déjà visé par une offensive en règle des fillonistes et du FN sur sa pseudo bienveillance à l'égard du "communautarisme" et de "l'islamisme radical", Emmanuel Macron s'impose comme une cible de choix.
Invité ce lundi 17 avril sur BFMTV, le candidat d'En Marche! a tenu à mettre en garde ses soutiens contre de nouvelles boules puantes à venir à la veille du premier tour, au moment même où l'écart entre les quatre favoris de la présidentielle n'a jamais été aussi étroit.
"Cette semaine, vous allez entendre dire: 'M. Macron a un compte caché dans un paradis fiscal, il a de l'argent caché à tel ou tel endroit'. C'est totalement faux moi j'ai toujours payé tous mes impôts en France et j'ai toujours eu mes comptes en France", a assuré l'ancien ministre de l'Economie avant de longuement détailler les revenus perçus lorsqu'il était banquier d'affaires.
Evoquant des "chiffres circulant sur Internet", Emmanuel Macron espère ainsi couper court à toute polémique juste avant le premier tour de scrutin. Mais en réalité, la campagne de déstabilisation ciblant les revenus de l'ancien banquier a déjà débuté sur les réseaux sociaux et elle ne cesse de monter en puissance. Son nom de code: "Emmanuel Cahuzac".
Le Club Mediapart comme cheval de Troie
Objectif de cette campagne de déstabilisation: instiller le doute chez les électeurs qu'Emmanuel Macron disposerait, comme l'ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac, d'un compte caché à l'étranger.
L'itinéraire de cette campagne diffamatoire a parfaitement été détricoté par Nicolas Vanderbiest, blogueur belge spécialisé sur les phénomènes d'influence et auteur de Reputatiolab. Samedi dernier, celui-ci détectait un pic d'activité liant Emmanuel Macron à Jérôme Cahuzac, une "fake news" dont il a remonté la piste dans cette infographie éclairante, disponible en grand format ici.
"Je travaille sur une plateforme de comptes actifs de la fachosphère. Lorsque je détecte une rumeur naissante, je l'isole sémantiquement, ici 'Macron Cahuzac' pour remonter sa piste en repérant les comptes qui partagent les mêmes contenus", explique au HuffPost Le jeune homme, qui travaille sur une étude sur les rumeurs numériques dans l'élection présidentielle.
Point de départ de l'intoxication: un article attribué à Mediapart, le site d'investigation qui avait justement lancé l'affaire Cahuzac, intitulé "Emmanuel Macron, un nouveau Cahuzac?". Premier biais: cet article a été publié sur Le Club Mediapart, volet du site ouvert aux contributeurs et sur lequel la rédaction n'exerce aucun contrôle.
Cet article a néanmoins servi d'outil de blanchiment visant à accréditer l'imminence de nouvelles révélations du site visant Emmanuel Macron. Un détournement dénoncé par le fondateur de Mediapart, Edwy Plenel, qui a dénoncé les "officines partisanes" à l'oeuvre.
Dans la foulée, une myriade faux comptes Twitter sont créés, probablement par un groupe restreint de personnes, de manière à inonder les réseaux de messages relayant l'intox "Emmanuel Cahuzac". En parallèle, un faux compte parodique "Emmanuel Cahuzac" est créé.
"Le paradoxe réactionnel", un fléau en période de campagne
Le phénomène n'a rien d'une première. Début mars, des faux comptes liés à la fachosphère avaient déjà intensément relayé une rumeur s'appuyant sur un pseudo article du journal de référence belge Le Soir affirmant qu'Emmanuel Macronétait financé à "plus de 30%" par "le royaume d'Arabie saoudite". Un faux grossier pourtant complaisamment relayé par la députée FN Marion Maréchal-Le Pen.
Fachosphère, fillonistes... Qui est à l'oeuvre derrière ces basses manoeuvres? Impossible de répondre avec certitude, d'autant que les faux comptes relais se rattachent à différentes équipes de campagne, manifestement dans l'objectif de noyer la source partisane de la boule puante.
"Nous sommes face à une véritable organisation, capable de créer 75 faux comptes en une nuit pour créer une histoire dans l'espoir d'utiliser les équipes militantes comme des courroies de transmission", précise Nicolas Vanderbiest. Le choix de lancer la boule puante un samedi matin, heure à laquelle il est beaucoup plus facile de placer un sujet en "trending topic" (sujets les plus discutés), sur les réseaux sociaux, témoigne de cette volonté d'atteindre les "vrais" militants fillonistes, lepénistes mais aussi les soutiens d'Emmanuel Macron.
"Une fois la rumeur installée, les macronistes vont réagir pour la démentir. Mais ce faisant, ils vont l'alimenter. J'appelle cela le 'paradoxe réactionnel' et c'est un fléau auquel il n'y a pas de réponse. Si vous réagissez, vous amplifiez. Si vous ne réagissez pas, vous cautionnez", prévient Nicolas Vanderbiest.
Visé par la campagne "Ali Juppé", Alain Juppé avait lui-même tardé à dénoncer ces caricatures avant de s'alarmer de l'ampleur prise par la rumeur. Dans la dernière ligne droite, Emmanuel Macron s'est lui décidé à prévenir ses troupes.
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