(L'Equipe)

Au Bénin, la jeunesse au chevet du foot national

Et si les jeunes venaient sauver d'une mort possible (mais évitable) la scène nationale au Bénin ? Depuis 2011, le TIC2F s'emploie justement à dynamiser un football local plus que moribond...

10 heures du matin, au stade de l'Amitié de Kouhounou. Sur le terrain de l'enceinte nationale du Bénin, les matches d'une heure (deux fois trente minutes) s'enchaînent depuis le tout début de la journée. Chaleur écrasante, mais football vif et sans calcul sur le gazon jauni. Dans la tribune, Japhet Ndoram est présent, stylo et carnet en mains. A ses côtés, des représentants de clubs français et anglais, spécialistes du football des jeunes. Depuis plusieurs années, l'ancien joueur du FC Nantes et de l'AS Monaco est devenu un habitué du TIC2F et il revient volontiers à la source du football.
TIC2F. Derrière cette appellation un peu barbare, se cache le tournoi international des centres de formation de football. La compétition annuelle, ouverte aux joueurs âgés de 13 à 18 ans, regroupe depuis février 2011 quatre centre ou académies béninoises et huit étrangères. En 2017, elles viennent du Mali, de la Côte d'Ivoire, du Ghana, du Nigeria, du Togo et du Cameroun. A l'origine de ce tournoi, un jeune entrepreneur béninois et ancien joueur, Mounirou Daouda. Son idée : «Mettre en vitrine le football africain et permettre aux jeunes de montrer leurs talents aux spécialistes». Ainsi, José Anigo et Christian Karembeu sont déjà venus à plusieurs reprises pour observer et superviser des jeunes dont quelques-uns, par le passé, ont pu intégrer le football professionnel.

Des talents poussés à l'exil

Mounirou Daouda n'est pas peu fier de faire exister le football béninois dans un pays privé de championnat national depuis trop longtemps, en raison d'une crise qui perdure. Au moment où se déroule le TIC2F, dont la finale est programmée ce dimanche, les clubs de la scène nationale disputent pour certains des «tournois de remise en jambes». Il y a bien longtemps que les meilleurs d'entre eux ont brillé sur la scène africaine. Et ils ont bien du mal à continuer d'exister aujourd'hui, poussant les meilleurs éléments du pays vers l'exil, au Nigeria voisin par exemple.
Seule satisfaction dans ce quasi désert : le TIC2F, qui rassemble quatre centres de formation du pays, démontre la belle vitalité des jeunes Béninois, qu'il s'agisse d'ABI Sports, le vainqueur 2016, du CEFES, de l'APJ (l'Académie du pro Michaël Poté) ou encore de l'ASPA d'Abomey, révélation de cette édition. Alors que de nombreux observateurs du football béninois, anciens et actuels, accompagnent avec bienveillance le tournoi, ses promoteurs font face chaque année à un immense défi sur le plan économique et logistique puisque l'épreuve est auto-financée. La tutelle sportive du pays ne met pas forcément la main à la poche. Ainsi, elle aurait pu, par exemple, offrir la location quotidienne du stade, très onéreuse, à l'organisateur, d'autant que l'entrée du tournoi est gratuite pour les spectateurs.

Présent pour la cérémonie d'ouverture, le jeune Ministre des Sports du Bénin, Oswald Homéky, a sans doute d'autres priorités. Il a préféré inviter Samuel Eto'o en mars dernier pour une remise de récompenses aux sportifs locaux... En attendant, le football des jeunes au Bénin, qui compte également en son doyen Jules Kodjo (fondateur il y a 25 ans de France Bénin Football +) un ardent défenseur en France, continue d'offrir une once d'espoir aux vrais amoureux du ballon rond. Comme en 2005 lorsque le pays, qui avait organisé la CAN U20, avait qualifié sa sélection, dirigée par le regretté technicien français Serge Devèze, pour la Coupe du monde de la catégorie aux Pays-Bas. C'était il y a douze ans. Une éternité...

Frank Simon à Cotonou