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En Allemagne, Frauke Petry désavouée au congrès du parti populiste AfD

Empêtrée depuis des mois dans des querelles internes, la présidente du parti n'a pas été choisie pour diriger la campagne en vue des législatives de septembre. Les militants lui préfèrent la ligne plus dure de son adversaire, Alexander Gauland.
par Nathalie Versieux, correspondante à Berlin
publié le 23 avril 2017 à 16h40

Mauvais week-end pour Frauke Petry. La cheffe du parti populiste allemand a cumulé les défaites lors du congrès de l'AfD, qui se tenait samedi et dimanche sous haute surveillance policière à Cologne. Dans la matinée de samedi, les 600 délégués ont carrément refusé de débattre de la motion de «recentrage» qu'elle défendait. Petry est convaincue que l'AfD doit sortir du créneau stigmatisant de l'extrême droite, et conclure des alliances avec les partis traditionnels afin de parvenir au pouvoir.

Poliment applaudie lors de son discours, Petry a dû assister à la véritable ovation accordée à l'un de ses pires adversaires, Jörg Meuthen, qui s'est livré à une attaque en règle contre sa stratégie de recentrage du parti. «Nous ne pouvons plus supporter ces personnages, a-t-il lancé à une foule enthousiaste au sujet d'Angela Merkel ou de son challenger social-démocrate, Martin Schulz. Avec ces gens, nous ne pourrons jamais envisager de coalition !» Selon une récente étude, la stratégie défendue par Frauke Petry aurait peu de chances de convaincre l'électorat de l'AfD, qui se positionne aux deux tiers comme «adepte de l'extrême droite».

Avenir incertain

Second coup dur dimanche pour la cheffe de l'AfD : c'est un autre de ses adversaires, Alexander Gauland, 76 ans, qui a été élu pour diriger la campagne en vue des législatives de septembre. Petry avait accusé Gauland quelques jours avant le début du congrès de soutenir «une stratégie d'opposition fondamentale» sans issue. Il sera tête de liste en tandem avec une économiste libérale, homosexuelle assumée et inconnue du grand public, Alice Weidel.

Frauke Petry, empêtrée depuis des mois dans une lutte de pouvoir en interne, avait renoncé mercredi à diriger la campagne. Elle conserve la direction du parti. Mais son pouvoir vacille et son avenir politique est des plus incertains. Visiblement tendue, très pâle, elle a confié à la presse vouloir observer «jusqu'à l'automne» les développements internes. Il lui a même fallu se justifier, samedi, alors que les militants et la presse, ne la voyant plus dans la salle, ont spéculé sur sa démission. Elle était simplement «sortie pour déjeuner».

«Tomber en morceaux»

A l'ombre de ces querelles internes, les délégués ont adopté leur programme électoral en vue des législatives. Il prévoit une «stabilisation du système de protection sociale» grâce à une politique migratoire «responsable». L'AfD réclame à ce sujet des quotas d'expulsions annuels, et l'interdiction du regroupement familial pour les réfugiés. La politique familiale occupe une place importante dans le programme. L'AfD, qui veut relancer la natalité, souhaite soutenir financièrement les familles.

Sur le plan économique, le parti – qui envisage de multiplier les référendums – réclame une baisse de l’impôt sur le chiffre d’affaires des sociétés de 7% et entend augmenter le montant des indemnités chômage accordées à ceux qui ont perdu leur emploi après de nombreuses années de cotisations. L’AfD souhaite également une sortie de l’euro et le retour au Deutsche Mark. Sur le terrain de la politique étrangère, l’AfD soutient la Russie de Vladimir Poutine.

Frauke Petry affaiblie, l'avenir de l'AfD semble remis en question. Avec la défaite de sa télégénique et charismatique dirigeante, l'AfD «a pris le risque d'hypothéquer ses chances aux élections», estime le magazine Der Spiegel. Le parti qui caracolait à entre 15 et 20% d'intentions de vote voici encore six mois est aujourd'hui crédité de 9% des voix, et était même tombé à 7% début avril. «Le parti risque de tomber en morceaux», estime le quotidien Süddeutsche Zeitung. La fédération de Rhénanie du parti, l'une des plus importante en termes de nombre de militants, dirigée par Marcus Pretzell, le mari de Frauke Petry, a déjà assuré qu'elle suivra «un autre cours plus centriste» que le reste du parti.

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