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Comment l'agriculture russe prospère sous les sanctions

¤ En 2017 encore, la Russie devrait exporter des volumes record de céréales. ¤ Le pays a mis l'accent sur son objectif d'autosuffisance alimentaire en 2020.

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Par Muryel Jacque

Publié le 25 avr. 2017 à 01:01

En quelques années, la Russie, qui était absente de la scène internationale depuis des lustres, s'est imposée comme une nouvelle superpuissance agricole - du blé en particulier. L'an passé, le pays a produit 120 millions de tonnes, soit la plus grande récolte jamais réalisée de l'ère postsoviétique, d'après les chiffres de l'agence fédérale des statistiques Rosstat. Moscou grignote peu à peu les parts de marché des géants américains et européens, que ce soit en Asie, en Amérique du Sud ou même en Afrique, où elle est partie à la conquête de nouveaux clients. Les plus grands producteurs tremblent. D'autant que les analystes australiens de l'Aegic prédisent que les exportations de blé russe devraient s'envoler de 60 % entre 2015 et 2060.

Les fermiers américains, qui nourrissaient autrefois une partie de la planète, sont dépassés, a constaté le « Wall Street Journal » dans un long article publié la semaine dernière : tandis que la part des Etats-Unis dans les exportations mondiales de maïs, soja et blé a été divisée par plus de deux depuis le milieu des années 1970, selon le ministère américain de l'Agriculture, la Russie, de son côté, a augmenté ses récoltes de blé de 61 % au cours des dix années écoulées et quasiment triplé au même moment ses superficies en maïs.

L'embargo, décrété par l'Occident en 2014 sur plusieurs produits (fruits, légumes, produits laitiers, viandes) après la crise ukrainienne n'a pas empêché cet essor de l'agriculture russe. Contrairement à beaucoup de pays dans le monde, le secteur occupe même une part plus importante dans l'économie du pays qu'il y a quinze ans. Pour la première fois, les exportations agricoles ont rapporté davantage... que les ventes d'armes, soit environ 15 milliards de dollars.

Subventions et investissements

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En fait, avec les sanctions imposées par l'Europe et les Etats-Unis, la Russie a mis l'accent sur un objectif qu'elle s'était fixé dès 2010 : atteindre l'autosuffisance alimentaire d'ici à 2020. Avec plus de 146 millions d'habitants à nourrir, la sécurité alimentaire relève comme en Chine de la sécurité nationale du pays, a ainsi réaffirmé le président Vladimir Poutine fin 2015. En même temps que la mise en place de contre-sanctions sur des produits alimentaires européens, Moscou a décidé d'augmenter les subventions aux agriculteurs et de permettre aux étrangers de louer les terres. Le secteur a en outre vu l'argent affluer : des investissements réalisés par les grands groupes de négoce, qui veulent leur part du gâteau, aux milliardaires comme Oleg Deripaska ou Vadim Moshkovich, qui se sont lancés dans l'agriculture à grande échelle, encouragés entre autres par les incitations fiscales et les aides de l'Etat.

Conséquence, la Russie se proclame autosuffisante en production céréalière, mais aussi en légumes, volailles, porcs. Les sanctions, contre-sanctions et autres mesures restrictives (dernière en date, la Russie ne veut plus de tomates de Turquie qui, en représailles, n'achète plus de blé russe) n'ont évidemment pas tout fait : la chute du rouble a joué en faveur des produits agricoles russes, moins chers à exporter, ainsi que, pour les céréales, une météo sans accroc, une baisse des coûts de l'énergie et des prix des engrais. Pourvu que cela dure, lâchent certains en Russie.

Muryel Jacque

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