Guérilla

En Inde, un nouveau guet-apens sanglant de la rébellion maoïste

Vingt-six policiers et une douzaine de rebelles ont été tués lundi dans un conflit qui dure depuis un demi-siècle.
par Laurence Defranoux
publié le 25 avril 2017 à 12h07

La guérilla maoïste indienne a fait 26 victimes policières de plus en Inde. Les paramilitaires tombés dans une embuscade dans l’Etat du Chhattisgarh, lundi, s’ajoutent aux 48 déjà tués depuis le début de l’année. Ce qui, ajouté aux victimes civiles et aux morts parmi les rebelles, fait de l’insurrection naxalite le conflit le plus meurtrier en Inde, devant même le Cachemire.

Laissés-pour-compte

Tout a commencé le 3 mars 1967, quand un groupe de militants communistes attise la colère des habitants du village de Naxalbari, dans le Bengale-Occidental, contre de grands propriétaires terriens. Cinq décennies et plus de 15 000 morts après, le «naxalisme» remporte toujours l’adhésion des laissés-pour-compte du développement indien, et s’est étendu à une douzaine d’Etats. Le Chhattisgarh est particulièrement touché par la violence, dans un cycle attaque-répression qui laisse peu de place à la négociation et au travail de justice sociale sur le terrain, seul à même de couper la guérilla de ses racines villageoises.

Survivant aux opérations incessantes de l'armée contre ses rangs et son arsenal, le naxalisme s'est même consolidé au début des années 2000, grâce à l'unification de ses différentes factions sous la bannière «CPI-Maoist». La «guerre du peuple» se concentre désormais dans les jungles du centre du pays, «le corridor rouge» où les tribus forestières se battent pour conserver leurs territoires menacés par les projets industriels ou miniers. Forts d'une dizaine de milliers de militants majoritairement recrutés parmi les paysans spoliés, ses commandants ne désespèrent pas de «libérer une zone révolutionnaire» qui s'étendrait du Népal au sud du sous-continent. Mais le mouvement, qui prône l'extrême violence au détriment du projet politique, peine désormais à recruter en dehors des forêts.

«Le sacrifice de nos martyrs»

Le sabotage, les traquenards, les enlèvements sont le mode de combat préféré des naxalites, et le bilan est parfois très lourd. En 2010, 76 policiers mouraient dans une attaque perpétrée par un groupe de plusieurs centaines de guérilleros. Mais les cibles ne sont pas toujours les forces de l’ordre : un mois après, dans un atroce déraillement, 80 passagers du train de nuit Calcutta-Bombay trouvaient la mort après que les rails avaient été dévissés.

L'attaque de lundi, la troisième en un mois, a eu lieu à Sukma, un district forestier contrôlé par les rebelles. C'est la plus meurtrière depuis sept ans dans les rangs de la police. Selon les témoignages de policiers blessés, une centaine de membres de forces de l'ordre, qui protégeaient le chantier d'une route inaugurée ce jour-là, ont été attaqués par «près de 300 rebelles, avec des femmes dans l'encadrement». Selon l'un d'eux, les villageois, «habituellement utilisés comme boucliers humains», auraient «cette fois aidé à préparer l'embuscade dans la jungle». Une douzaine de rebelles seraient morts dans les combats qui ont duré près de quatre heures. Sans donner plus de détails, le Premier ministre, Narendra Modi, a déclaré lundi soir sur Twitter : «Nous sommes fiers de la valeur de notre personnel. Le sacrifice de nos martyrs ne sera pas vain.»

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