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Le photographe interpellé dimanche à Hénin-Beaumont a livré sa version des faits

Jacob Khrist réalisait un reportage sur le mouvement Femen lors du premier tour de la présidentielle quand il a été arrêté et gardé à vue pour « complicité d’exhibition sexuelle » et rébellion.

Le Monde

Publié le 25 avril 2017 à 15h50, modifié le 25 avril 2017 à 19h23

Temps de Lecture 3 min.

Jacob Khrist, photographe chez Hans Lucas, lors de son interpellation à Hénin-Beaumont, dimanche 23 avril.

Interpellé près d’un bureau de vote d’Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) dans des conditions floues, dimanche 23 avril au matin, le photographe Jacob Khrist est sorti de garde à vue lundi dans la soirée. Arrêté alors qu’il réalisait un reportage sur le mouvement féministe Femen lors du premier tour de l’élection présidentielle, il a été placé en garde à vue pour « complicité d’exhibition sexuelle » et « rébellion ».

Quarante-huit heures après les faits, le photographe a livré sa version des faits sur sa page Facebook. « Dimanche dans la ville FN d’Hénin-Beaumont, on m’a retiré le droit de travailler, retiré ma liberté et, par extension, retiré le droit de vote ! commence par écrire Jacob Khrist, qui précise qu’il travaille depuis quelques années sur le mouvement Femen. Dimanche matin, depuis une petite heure, je me trouve sur le site de l’école communale d’Hénin-Beaumont à couvrir les élections présidentielles avec des dizaines d’autres reporters. (…) A 10 h 19, je vois sortir d’une limousine des militantes Femen affublées de masques. Je détourne donc mon appareil vers elles, comme d’autres confrères. »

« A 10 h 20, je suis en train de réaliser une rafale de clichés quand je sens qu’on me saisit violemment sur le côté et par-derrière. Deux individus en civil m’intiment l’ordre de ne pas bouger et cherchent à me traîner en retrait. »

« Je pense immédiatement à une intimidation ou à un lynchage, précise le jeune homme. Je leur demande qui ils sont, ils ne répondent pas. (…) Ils me mettent face contre terre quand deux policiers en uniforme débarquent. Soudain, je suis soulagé. Mais ils me menottent et m’emmènent dans un véhicule de police avec une militante Femen. »

« Aucun recours »

Jacob Khrist raconte ensuite son passage en garde à vue. Il explique être alors accusé de « complicité d’exhibition sexuelle » puis de « rébellion » lors de son arrestation. « J’apprends à ce moment que les deux individus qui m’ont interpellé en civil sont des policiers et ce, malgré le fait qu’ils n’aient pas de brassard et qu’ils ne m’aient ni décliné leur appartenance à la police, ni répondu lorsque je leur demandais qui ils étaient. Oui, j’ai bien résisté mais sans aucune violence, mes mains étaient agrippées à mon matériel photo », précise le photographe.

Lundi matin, le vice-procureur de Béthune chargé de l’affaire lui précise que sa garde à vue est reconduite pour un délai maximum de 24 heures. « En lisant le procès-verbal initial des policiers, j’ai noté des éléments susceptibles de relever d’une rébellion et demandé à ce que les personnes interpellées soient réentendues sur ce chef-là », justifie Adam Chodkiewiez. Surtout, mobilisés sur le terrain à l’occasion des élections et donc peu disponibles pour des auditions, les policiers n’avaient selon lui pas eu le temps d’approfondir certains points la veille.

Réalisée par deux agents en civil, l’interpellation s’est déroulée dans un « contexte mouvementé », affirme Adam Chodkiewiez. Le photographe se serait approché de Steeve Briois, maire d’Hénin-Beaumont et vice-président du Front national : connaissant les liens du photographe avec les Femen – il suit ce mouvement depuis 2015 –, les forces de l’ordre auraient craint une altercation.

« Dans le brouhaha ambiant, Jacob Khrist pouvait légitimement penser qu’ils n’étaient pas policiers, j’ai donc abandonné la poursuite en lui accordant le bénéfice du doute », ajoute le vice-procureur. Quant au chef de complicité d’exhibition sexuelle, Me Chodkiewiez n’a pas trouvé d’éléments prouvant « un lien direct » avec l’action des Femen.

« S’il n’y avait pas eu ce battage médiatique, que serait-il arrivé ? »

Sur Facebook, l’agence Hans Lucas, dont Jacob Khrist est membre depuis 2015, avait dénoncé dès dimanche son interpellation :

« Inadmissible ! En ce jour d’élection, le photographe professionnel Jacob Khrist a été violemment interpellé à Hénin-Beaumont alors qu’il était dans l’exercice de son métier. »

L’agence de photographes expliquait ensuite ne pas avoir de nouvelles de Jacob Khrist : « au commissariat de Lens [qui a coordonné l’action], c’est le black-out complet. Après plusieurs coups de fil, impossible d’en savoir plus sur son état. »

Lundi, Jacob Khrist dénonçait le fait de n’avoir « aucun recours » :

« Alors qu’ils m’ont privé de liberté pendant trente-six heures, empêché de réaliser mon travail, empêché de voter, je n’ai aucun recours. Il m’est impossible de contester cette arrestation abusive et arbitraire, suivie d’une privation de liberté tout aussi abusive et arbitraire, car il n’y a pas de poursuite contre moi ! »

« Ce qui est aussi très gênant, c’est d’avoir été arrêté de manière arbitraire sur la base de soupçons, d’accusations, poursuit Jacob Khrist. S’il n’y avait pas eu ce battage médiatique, autant de soutien, si je n’étais pas membre du collectif de photographes HansLucas, que serait-il arrivé ? »

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