Dimanche soir, tout le monde a noté le symbole: c'est sur l'hymne européen qu'Emmanuel Macron, tout triomphant et grave à la fois, a traversé la cour du Louvre pour venir prononcer son discours de victoire. Un joli pied de nez aux spin doctors qui estiment que l'Europe est un sujet trop risqué pour être mis en avant de façon si visible en campagne présidentielle! "Eh bien, vous voyez, semblait-il dire, on peut gagner une élection française en mettant la construction Europe au coeur de son projet politique!"
Au moment où les regards du monde entier étaient braqués sur notre pays, c'était comme si la France avait dit au monde: "Voyez, le populisme eurosceptique n'est pas une fatalité!" Pour certains Britanniques qui avaient vécu le Brexit comme une déchirure, c'était comme une revanche par procuration.
Plus qu'un "remain"
Avec une nuance importante, cela dit: le projet européen proposé par Emmanuel Macron n'était pas juste un "remain" -une promesse de conserver l'état des choses- mais une volonté de transformer et d'améliorer l'existant. D'exiger une Europe plus efficace et exemplaire. De tourner la page d'une époque où l'on pouvait humilier la Grèce et oublier la solidarité européenne. De commencer à doter la Zone Euro d'un véritable gouvernement politique, etc.
Yanis Varoufakis n'a-t-il pas dit d'Emmanuel Macron qu'il était "le seul ministre français de l'administration de François Hollande qui semblait comprendre ce qui était en jeu au sein de la zone euro"? celui qui avait compris "combien ce qui arrivait à la Grèce pouvait être catastrophique pour la France"? Fort de ces atouts, Emmanuel Macron a annoncé la couleur: il parlera aussi bien à l'Allemagne qu'à la Grèce, à l'Italie comme aux Pays-Bas, avec déférence et exigence. Le "nouvel espoir Macron" est très attendu chez tous nos voisins, ceux qui attendent de nous des réformes et ceux qui attendent de nous que nous tempérions l'austérité.
Les lignes bougent
En plus de sa posture centrale dans le concert européen, c'est aussi sa démarche politique qui compte. Il amorce le début d'une politique autrement pour les Européens. Ainsi Matteo Renzi s'est-il inspiré de l'exemple d'En Marche! pour créer en Italie "In Camino" (littéralement "En Marche" en italien). C'est un bon présage pour voir émerger les grandes conventions démocratiques transnationales qu'Emmanuel Macron a appelé de ses voeux pour refonder les traités européens.
Sa révolution, c'est passer du traditionnel "c'est la faute à Bruxelles" à "nous citoyens allons améliorer l'Europe ensemble". C'est un appel à ce que chacun s'engage pour changer la donne. Et ne nous leurrons pas: ce ne sera pas facile, tant est grand le besoin de renforcer tout à la fois la justice sociale et l'efficacité. Mais nous pouvons retrousser nos manches!
En sciences on parle de révolution copernicienne quand un concept que l'on croyait central se retrouve être "un parmi d'autres"; ainsi la Terre s'est-elle retrouvée un jour "une planète comme les autres" et le Soleil "une étoile comme les autres". En Marche! ouvre une voie européenne dans laquelle les politiciens ne sont finalement "que des citoyens comme les autres"... Et c'est ce que nous devons célébrer en cette fête de l'Europe qui a une vraie saveur française cette année.
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