Toujours trop de neuroleptiques pour les malades d'Alzheimer

La prescription de ces médicaments tranquillisants est en hausse continue, alors que leur efficacité n'est pas démontrée et qu'ils peuvent même être néfastes.

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Ce sont les hommes avec un déclin cognitif sévère et vivant en établissement de longue durée qui reçoivent le plus ces médicaments.
Ce sont les hommes avec un déclin cognitif sévère et vivant en établissement de longue durée qui reçoivent le plus ces médicaments. © LEMAIRE/ZEPPELIN/SIPA / SIPA

Temps de lecture : 3 min

Malgré plusieurs alertes des autorités de santé sur les risques liés à la prise de neuroleptiques par les personnes âgées et, en particulier, celles atteintes de la maladie d'Alzheimer et d'autres formes de démence, la prescription de ces médicaments a progressé en France entre 2010 et 2014. C'est ce que regrettent le Dr Karim Tifratene de l'université de Nice-Sophia-Antipolis et du CHU de Nice ainsi que ses collègues, en conclusion de leur étude publiée fin avril dans la revue Alzheimer's Research & Therapy .

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Les auteurs rappellent que les neuroleptiques – dont les principales indications sont la schizophrénie, la manie, les délires, l'agitation et l'agressivité – sont parfois prescrits chez les patients atteints de démence lorsqu'ils présentent des troubles du comportement ou des symptômes neuropsychiatriques. Mais, soulignent-ils, leur efficacité n'est pas démontrée et ils peuvent entraîner des effets indésirables potentiellement graves. Leur action sédative est susceptible de provoquer des hypotensions et d'entraîner des chutes. Ils peuvent aussi aggraver la démence et même augmenter les symptômes neuropsychiatriques.

Pour connaître la prévalence de la prescription de ces médicaments chez les patients souffrant de démence dans notre pays, les auteurs ont utilisé la Banque nationale Alzheimer (BNA) dans laquelle sont enregistrées les données des patients inclus par les Centres Mémoire de ressources et de recherche, les consultations mémoire et des spécialistes libéraux. Ils ont ainsi pu analyser les données de près de 200 000 personnes présentant une maladie d'Alzheimer, une démence vasculaire (consécutive notamment à de multiples petits AVC) ou mixte, enregistrées dans la BNA entre 2010 et 2014.

Les hommes plus à risque

Le résultat est sans appel : 9 % de ces malades ont reçu au moins une fois un de ces traitements au cours des années étudiées. Et le nombre de prescriptions a augmenté de 16 % entre 2010 et 2014. Cette tendance s'observe pour les trois types de démence, à la fois pour les patients vivant à domicile et ceux présents dans des établissements de soins de longue durée. Les hommes avec un déclin cognitif sévère et vivant en établissement de longue durée étaient les plus à risque de recevoir ce traitement. Les personnes les plus âgées avec un plus haut niveau d'éducation étaient les moins concernées. L'étude indique aussi que 70 % des patients sous neuroleptique prenaient un autre psychotrope, le plus souvent un antidépresseur.

« Dans le cadre du troisième plan Alzheimer 2008-2012, une surveillance de la iatrogénie médicamenteuse [effets indésirables provoqués par les médicaments, NDLR], en particulier en lien avec les neuroleptiques, avait été mise en place par la Haute Autorité de santé », rappelle l'Agence de presse médicale (APM) qui analyse ce travail. À l'issue du plan, la prescription était estimée à 15,5 %, contre 17 %, une baisse déjà considérée comme insuffisante. Mais l'indicateur correspondait à l'exposition chronique des malades d'Alzheimer aux neuroleptiques, définie par au moins trois prescriptions par an. À noter, enfin, que la consommation des neuroleptiques a été reprise dans le plan maladies neurodégénératives 2014-2019. Et qu'il reste encore du chemin à parcourir...

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