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Pourquoi la présidentielle en Iran est cruciale

Une Iranienne devant les affiches de campagne du président sortant Hassan Rohani, le 17 mai 2017 à Téhéran

Une Iranienne devant les affiches de campagne du président sortant Hassan Rohani, le 17 mai 2017 à Téhéran - ATTA KENARE / AFP

Cinquante-cinq millions d'Iraniens sont appelés aux urnes ce vendredi pour élire leur nouveau président. Quatre ans après son élection, Hassan Rohani est candidat à sa propre succession et affrontera notamment le conservateur Ebrahim Raisi.

Les électeurs iraniens se prononcent ce vendredi sur le bilan d'Hassan Rohani, dont l'élection il y a quatre ans avait suscité des espoirs aujourd'hui en partie déçus. Elu dès le premier tour en 2013 avec 50,7% des voix, le président iranien, un modéré allié des réformateurs, brigue en effet un second mandat de quatre ans.

Le président sortant est opposé à trois autres candidats appartenant aux deux principales factions qui composent le paysage politique iranien. D'un côté, Mostafa Hashemitaba, ancien ministre de l'Industrie, qui émane comme lui du bloc des réformistes, qui prône une ouverture culturelle et économique du pays vis-à-vis de l'étranger et notamment de l'Occident. De l'autre, Ebrahim Raisi et Mostafa Misalim, du bloc des conservateurs qui défend l'isolationnisme politique et économique de l'Iran.

Ebrahim Raissi, principal adversaire de Rohani

Proche du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, Ebrahim Raissi représente le principal adversaire d'Hassan Rohani. Agé de 56 ans, c'est un religieux conservateur qui se présente comme le "défenseur des pauvres". Toujours coiffé d'un turban noir, Ebrahim Raissi est une figure montante du régime islamique, et apparaît comme un pur produit du système conservateur.

Sa cible est l'électorat populaire et défavorisé, auquel il promet une hausse des aides directes, la création d'un million d'emplois par an et la relance de la production nationale. Face à "l'oligarchie", "je représente les ouvriers, les agriculteurs, les femmes démunies", a-t-il ainsi affirmé.

Ebrahim Raissi ne remet pas en cause l'accord nucléaire voulu par le guide suprême, mais accuse le gouvernement Rohani d'avoir été trop "faible" dans les négociations, en faisant trop de concessions sans obtenir de réelles contreparties. 

Ebrahim Raissi a travaillé pendant plus de deux décennies au sein du puissant pouvoir judiciaire d'Iran, contrôlé par les religieux conservateurs. Il a notamment occupé entre 1985 et 1988 le poste de procureur adjoint du tribunal révolutionnaire de Téhéran. Durant cette période, les opposants ont été durement réprimés et des centaines, voire des milliers de prisonniers exécutés, à la fin de la guerre entre l'Iran et l'Irak. Les réformateurs le critiquent en affirmant qu'il sera peu enclin à libéraliser la société et qu'il n'a pas suffisamment d'expérience pour diriger le pays.

Rohani : un bilan en demi-teinte

Religieux modéré, le président iranien sortant, Hassan Rohani, a réussi à sortir son pays de l'isolement international, s'attirant le surnom de "cheikh diplomate". Ce religieux de rang moyen de 68 ans, marié et père de quatre enfants, restera comme celui qui a mené à bien en 2015 la conclusion d'un accord historique avec les grandes puissances sur le programme nucléaire iranien, permettant la levée de sanctions. 

Hassan Rohani peut notamment se prévaloir d'avoir réussi, grâce à cet accord, à reprendre les exportations pétrolières qui se sont élevées à près de 2,8 millions de barils par jour. Ce qui a permis d'atteindre, selon le dernier rapport du Fonds monétaire international (FMI), une croissance de 6,6% durant la dernière année iranienne (mars 2016 - mars 2017). Également à l'actif du président sortant, une forte baisse de l'inflation, passée de 40% il y a quatre ans à environ 8%. 

Mais l'accord nucléaire entré en vigueur en janvier 2016 n'a pour l'instant pas attiré les investissements étrangers espérés pour relancer l'économie et faire baisser le chômage: seulement 1 à 2 milliards de dollars, contre les 50 milliards par an nécessaires. Investisseurs et grandes banques internationales restent réticents en raison de l'attitude des Etats-Unis qui, depuis l'arrivée au pouvoir de Donald Trump en janvier, ont renforcé les sanctions non liées au programme nucléaire. Le Trésor américain a même annoncé mercredi l'imposition de nouvelles sanctions liées au programme balistique iranien. 

S'il est probable de voir les deux hommes s'affronter au second tour, qui aura lieu le 26 mai prochain, l'incertitude reste totale, le taux d'abstention risquant d'être particulièrement élevé.

Mélanie Rostagnat avec AFP