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« Nous sommes très attachés aux actionnaires individuels »

La croissance du trafic est repartie. Cela n’a pas échappé aux investisseurs, qui redécouvrent la valeur dont le parcours boursier leur donne toute satisfaction.

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Augustin de Romanet, Président-directeur général de Groupe ADP (Patrick Lazic)
Publié le 12 mai 2017 à 17:35
Augustin de Romanet , Président-directeur général

Pensez-vous que la levée de l’état d’urgence en France accélérerait le retour des touristes aisés et notamment asiatiques dans vos aéroports parisiens ? Quel en serait l’impact sur les dépenses dans les boutiques côté pistes ?

D’ores et déjà, et cela depuis la fin 2016, nous observons un retour des touristes internationaux dans nos aéroports. Le trafic de Paris Aéroport [passagers accueillis à Paris-Charles-de-Gaulle et à Paris-Orly] a progressé de 5 % sur le premier trimestre, grâce au dynamisme du trafic en Europe, principalement porté par les low-cost (+ 17,9 %) et aussi grâce à la reprise, mois après mois, du trafic à l’international, en particulier avec l’Asie en hausse de 6,2 %. Plusieurs pays à forte contribution ont retrouvé une croissance du trafic : 13,6 % pour la Corée du Sud, 13,1 % pour le Japon, 6,9 % pour la Chine et 4,6 % pour Hongkong. Ces bonnes tendances se sont confirmées au mois d’avril. A l’issue du premier trimestre, le chiffre d’affaires par passager dans les boutiques côté pistes a légèrement progressé pour s’élever à 18,40 €, grâce aux bonnes performances des produits de luxe, en partie compensées par la baisse des ventes de tabac à la suite de la mise en place du paquet neutre.

Vous avez fait d’énormes efforts pour améliorer l’accueil et la qualité des services offerts aux passagers. Comment réduire le temps de passage à la police aux frontières ?

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L’accroissement du temps d’attente lors des contrôles des passeports aux frontières me préoccupe au plus haut point. Il résulte de l’augmentation du trafic et du renforcement légitime des contraintes de sécurité. Afin de réduire autant que possible ces temps d’attente, nous avons identifié quatre leviers : le degré d’automatisation du processus ; l’organisation du processus ; la vitesse de consultation des ordinateurs et le nombre de personnes dédiées à ce travail. En ce qui concerne les deux premiers points, le Groupe ADP a décidé de financer autant de sas Parafe que nécessaire en lieu et place de l’Etat. Je n’ai mis aucune limite à cet investissement et, cette année, nous installerons 47 nouveaux sas Parafe dans nos terminaux. Lorsque nous serons équipés dans ce domaine, le troisième point pourra être facilement amélioré en étudiant par exemple la possibilité d’un système de pré-checking des ordinateurs avant de passer les aubettes de police. Enfin, le dernier point relatif aux effectifs n’est pas de la compétence du Groupe ADP, mais de celle du ministère de l’Intérieur, qui est conscient, a minima, de la nécessité de ne pas réduire les emplois de la police aux frontières.

La révision à la hausse de votre hypothèse de croissance du trafic annuel ne vous permet-elle pas d’en faire autant pour l’excédent brut d’exploitation ?

Nous disons ce que nous faisons et nous faisons ce que nous disons. Il est important de ne pas surpromettre ! Nous préférons donc être prudents quant à la transformation de la croissance du trafic, plus élevée qu’initialement prévue en ce début d’année, en Ebitda, dont l’orientation est confirmée à la hausse en 2017. Nous ne maîtrisons pas la problématique du tabac et du paquet neutre. Son impact pourrait être significatif, sur la clientèle étrangère en particulier.

Constatez-vous déjà des retombées favorables de votre nouveau siège social implanté sur la zone aéroportuaire de CDG ?

Ce nouveau siège social permet de resserrer les liens avec nos clients compagnies aériennes, nos différents partenaires, les équipes opérationnelles, et donc de mieux appréhender les besoins des passagers. C’est aussi un lieu très convivial pour nos salariés qui l’apprécient beaucoup, tant les aménagements ont été étudiés avec soin.

Pouvez-vous faire le point sur vos investissements à Paris ?

Tous les grands chantiers d’infrastructures du plan stratégique Connect 2020, qui prévoit au total 4,6 milliards d’euros d’investissements sur 2016-2020, avancent conformément à notre feuille de route. A Paris-Charles-de-Gaulle, les projets de fusion des satellites internationaux du terminal 1 portant sur la création de 26.000 m2 supplémentaires, et de jonction des terminaux 2B et 2D, pour 35.000 m2 additionnels, ont été lancés. A Paris-Orly, la jetée internationale du terminal Sud, une salle d’embarquement de 12.000 m2 représentant un investissement de 90 millions d’euros est opérationnelle depuis avril 2016, et nous venons d’ouvrir le nouveau pavillon d’honneur de l’aéroport. Nous allons également mettre en service une passerelle piétonne reliant le terminal Sud au futur quartier de Cœur d’Orly. Par ailleurs, les travaux de construction de la jonction reliant les terminaux Sud et Ouest se poursuivent et la première tranche du nouveau bâtiment de 80.000 m2 devrait être mise en service fin 2018.

Et vos développements de croissance externe à l’international ?

L’événement majeur concernant la stratégie internationale est peu visible : c’est la constitution d’une équipe de collaborateurs de très haut niveau dédiée à ce sujet primordial. En matière de développement à l’international, il ne s’agit pas de grossir pour grossir et nous devons apporter un soin extrême à l’étude des opportunités, en particulier pour des prises de participation dans le capital d’aéroports étrangers. Avec cette équipe, nous sommes en mesure de nous porter candidat à des appels d’offres très complexes, tout en sachant en apprécier les risques. En ce qui concerne les dossiers que nous étudions actuellement, vous m’autoriserez à ne pas les dévoiler. Gardez à l’esprit que le Groupe ADP est un des leaders mondiaux puisqu’il exploite, directement ou indirectement, via entre autres TAV Airports, 23 aéroports dans le monde et a accueilli 240 millions de passagers en 2016.

Dans le domaine des activités régulées, l’objectif financier central est de faire converger la rentabilité des capitaux engagés (ROCE) avec le coût moyen pondéré du capital de l’ordre de 5,4 %. Pourrez-vous l’atteindre à l’horizon 2020, comme prévu ?

Rien ne nous contraint à revoir cet objectif. Il reste plus que jamais d’actualité.

Pensez-vous que CDG puisse dépasser l’aéroport de Londres d’ici la fin du contrat de régulation en cours (CRE)?

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Une des trois grandes priorités du plan Connect 2020 est d’attirer à Paris le trafic long-courrier et en correspondance. Notre stratégie dite de «?Route Development?», c’est-à-dire de conquête de nouvelles compagnies et d’incitation pour celles déjà présentes à Paris à densifier leurs réseaux, porte ses fruits : 62 nouvelles lignes au départ de Paris ont été ainsi ouvertes en 2016. En termes de trafic, Paris-Charles-de-Gaulle, qui a accueilli 65,9 millions de passagers en 2016, devrait se rapprocher de Londres-Heathrow [75,7 millions de passagers en 2016] d’ici à 2020. Mais il faudra sans doute attendre le prochain CRE (2021-2025) pour envisager de le dépasser. Paris-Charles-de-Gaulle est déjà le premier aéroport d’Europe continentale grâce à un avantage indéniable : celui d’avoir quatre pistes, contre deux pour Londres, qui peut espérer en avoir une troisième en 2025.

Etes vous attaché au développement de l’actionnariat individuel ?

Oui, nous y sommes très attachés. Nous avons environ 300.000 actionnaires individuels et nous en sommes très fiers. Mais ceux-ci ne détiennent que 2,8 % du capital, ce qui reste insuffisant. Nous devons les fidéliser. Une équipe leur est dédiée et les initiatives, pour renforcer ce lien, vont s’accentuer. Nous devons aussi sans cesse leur expliquer ce qu’est notre valeur. La société est favorablement exposée à la croissance mondiale avec une perspective de doublement du trafic aérien mondial dans les vingt années à venir et nous nous sommes engagés à distribuer 60 % de notre résultat net sous forme de dividendes. En 2017, le dividende sera à un niveau au moins équivalent à celui versé au titre de 2016 : 2,64 € par action. Le titre Aéroports de Paris allie croissance et rendement. Il peut y avoir des à-coups, mais sur le moyen et le long terme nos actionnaires peuvent être confiants.

Grâce à votre action énergique le projet CDG Express est en bonne voie. Pensez-vous qu’il pourra être mis en service pour 2024, notamment si la candidature de Paris était retenue pour les Jeux olympiques.

Il est vrai que depuis 2012 je me suis quotidiennement impliqué dans la relance de ce projet structurant pour l’attractivité de l’aéroport et pour l’image de Paris. Le trafic ne cesse de progresser et un pays moderne doit être en mesure de relier sa capitale et son aéroport dans de bonnes conditions. Le CDG Express a franchi des étapes décisives en 2016 avec notamment l’approbation par l’Etat du cadre législatif dans lequel la société gestionnaire de l’infrastructure, détenue à parts égales par un consortium formé par le Groupe ADP, SNCF Réseau et la Caisse des Dépôts, va assurer sa mission. Les travaux devraient démarrer en 2018 et je suis très exigeant sur le respect du calendrier. Cette infrastructure devrait être ouverte à la fin de 2023.

LA QUESTION QUI DÉRANGE

Pensez-vous que votre groupe puisse être privatisé ? Quels sont vos rapports avec Vinci ?La décision appartient à l’Etat actionnaire. La loi prévoit que l’Etat doit détenir plus de la majorité du capital. Avant toute initiative de privatisation, il serait donc nécessaire de changer la loi. Mes rapports avec le président de Vinci sont excellents. Au sein du conseil d’administration du Groupe ADP, Xavier Huillard apporte une expertise précieuse. Par ailleurs, son groupe étant de plus en plus présent dans l’aéroportuaire, il est très scrupuleux s’agissant de la prévention des conflits d’intérêts et nous n’avons pas eu de divergences sur la détermination des sujets qui pouvaient s’y prêter.

Propos recueillis par Jean-Laurent Maurel

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