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Avec les « Malta Files », « Mediapart » révèle les dessous des pratiques fiscales de Malte

Le site d’information révèle les noms de grandes fortunes françaises ayant utilisé la petite île pour acheter des yachts.

Le Monde

Publié le 19 mai 2017 à 21h33, modifié le 24 mai 2017 à 12h25

Temps de Lecture 3 min.

« Malte, le Panama de l’Europe ? » Le site Mediapart et douze autres médias internationaux du réseau d’investigation European Investigative Collaboration (EIC) publient, vendredi 19 mai, des révélations sur les pratiques fiscales de Malte. Les « Malta Files » sont constitués, détaille Mediapart, de deux ensembles de documents :

« Le premier, obtenu par l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, comprend des dizaines de milliers de documents internes (mails, contrats, relevés de compte…) d’un cabinet fiduciaire maltais spécialisé dans l’immatriculation et l’administration de sociétés.

Le second, obtenu par le site d’information roumain The Black Sea, est un tableau Excel qui comporte l’ensemble des données du registre du commerce maltais, soit 53 247 sociétés au 20 septembre 2016. »

On y trouve, selon le site, des noms de grands chefs d’entreprise (voir ci-dessous), de multinationales (Bouygues, Total, BASF, Ikea…), de banques ou encore de proches de chefs d’Etat. Comme dans le cas des « Panama papers », ces personnes ne sont pas forcément dans l’illégalité. Un « montage » offshore vise bien souvent à optimiser de manière légale une fiscalité en jouant sur les différences de règles entre pays.

  • Xavier Niel copropriétaire d’un yacht à l’histoire trouble

Les « Malta Files » confirment que Xavier Niel, actionnaire à titre individuel du Monde, est le copropriétaire du Phocea, un yacht de 74 mètres qui appartenait autrefois à Bernard Tapie, puis à la femme d’affaires libanaise Mouna Ayoub.

Le fondateur de Free en a fait l’acquisition en 2010, aux côtés des frères Steve et Jean-Emile Rosenblum, les fondateurs du site Pixmania. Leurs holdings respectives, NJJ Capital et Dotcorp Finance, sont en effet actionnaires à 50 % chacune de la société maltaise Phocea Limited, propriétaire du bateau, lui-même immatriculé au Luxembourg. Si le montant de l’achat est inconnu, Mediapart indique que la mise à prix a été fixée à 10 millions d’euros.

Loué à des clients fortunés et confié à Pascal Saken, un administrateur à la réputation sulfureuse, le Phocea a connu depuis ce rachat des déboires à répétition : bloqué pendant plusieurs mois en 2012 au Vanuatu à la suite d’une affaire mêlant corruption et faux documents, le yacht a ensuite été gravement endommagé par une tempête en Thaïlande. Selon Mediapart, le superyacht est aujourd’hui aux mains de Pascal Saken en Malaisie, mais appartient toujours à Xavier Niel et aux frères Rosenblum. Sollicité par Le Monde, M. Niel n’a pas souhaité faire de commentaire sur le sujet.

  • D’autres chefs d’entreprise également concernés

Le patron de Free n’est pas le seul homme d’affaires français a posséder un yacht immatriculé à Malte. Mediapart cite également Maurice Ricci, patron et actionnaire majoritaire du géant des services informatiques Akka Technologies, qui posséderait plusieurs navires immatriculés dans l’île méditerranéenne ; Hubert Martigny, fondateur de la société de services informatiques Altran ; ou encore, Olivier Bertrand, patron du groupe éponyme, qui exploite de grandes brasseries parisiennes (Lipp, Le Procope) et les enseignes Bert’s ou Burger King.

4 300 yachts battent pavillon maltais

Pourquoi s’immatriculer à Malte ? L’île offre de nombreux avantages, dont le « leasing maltais », qui consiste à faire acheter le bateau par une société, qui le loue à une seconde avant de le revendre pour de bon au propriétaire quelques années plus tard. A Malte, cette pratique permet une grosse économie de TVA : un taux de 5,4 % contre 10 % avec le même système de « leasing » en Italie ou en France. Ces avantages font de l’île le second port de plaisance en Europe après le Royaume-Uni, avec 4 300 yachts battant son pavillon. Plusieurs propriétaires de navire interrogés par Mediapart ne cachent d’ailleurs pas l’intérêt essentiellement fiscal de ces montages.

Plus largement, à l’instar du Luxembourg ou de Madère, Malte ressemble fort à un paradis fiscal niché au cœur de l’Europe, et qui offre une série d’avantages en matière de création de sociétés ou de domiciliation d’actifs. Mediapart évoque, citant des enquêtes européennes, un manque à gagner de plus de 2 milliards d’euros par an pour les fiscalités européennes du fait de capitaux placés dans l’île afin d’en optimiser la fiscalité.

Ainsi, si le taux d’impôt sur les sociétés est théoriquement de 35 % (contre 33,3 % en France), en réalité, une société maltaise détenue par des étrangers peut se faire rembourser jusqu’à 85 % de l’impôt sur les dividendes distribués à ses actionnaires, ce qui aboutit à un taux réel d’imposition de 5 %. Ce système devrait être modifié d’ici à 2021, l’île consentant quelques efforts en réponse aux pressions de ses partenaires européens.

Malte est d’ailleurs secoué depuis plusieurs semaines par un scandale lié à de l’évasion fiscale. Le premier ministre, Joseph Muscat (gauche), fragilisé par des révélations sur le compte offshore de son épouse, a été contraint début mai de convoquer des élections législatives anticipées pour rasseoir sa légitimité.

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